Très rapidement, les compagnies internationales ont relancé leur production de pétrole. Il faudra, toutefois, moderniser l’ensemble de la filière.
Entre 22 000 et 25 000 personnes auraient été tuées pendant la guerre civile en Libye. La révolution, qui a duré officiellement huit mois (entre le 17 février et le 23 octobre 2011), a été menée par la jeunesse de ce pays. Une jeunesse avide de liberté, enthousiaste après le printemps arabe en Tunisie. En Libye, l’âge moyen est inférieur à 25 ans et les moins de 15 ans composent un tiers de la population. Cette jeunesse est confrontée au chômage, voire à la pauvreté. Le chômage toucherait un tiers des actifs et si nombre d’entre eux ne recouraient pas à l’économie informelle, la barre des 40 % serait sans doute franchie.
Pour un gouvernement qui doit déjà « remettre les gens au travail », l’ampleur de la tâche est considérable. Il va falloir à la fois créer de l’emploi, former les actifs, moderniser l’économie, ouvrir certains secteurs comme le tourisme, rénover, relancer de grands projets et en proposer de nouveaux. Fort heureusement, « les grandes entreprises ont retrouvé les chemins de la Libye », observe Michel Casals, à la tête de la chambre de commerce franco-libyenne.
Dès le 26 septembre, le géant pétrolier italien Eni avait annoncé la reprise de l’activité sur le gisement d’Abu-Attifel, situé à 300 kilomètres au sud de Benghazi (est du pays). Les autres majors sont aussi de retour. La récolte d’or noir de Total serait ainsi égale à la moitié de celle d’avant la révolution. Quant à la production globale du pays, estimée à la mi-octobre au quart de celle d’avant la guerre, elle devrait rapidement atteindre le volume d’avant-guerre.
Comme le pétrole est le poumon économique de la Libye, les autorités en place ont réagi très vite. À la tête de la compagnie publique National Oil Company (Noc) a été nommé un nouveau président, Nuri Berruien, ancien directeur de l’ingénierie de l’entreprise pétrolière Agoco (Arabian Gulf Oil Company). Et des discussions ont pu être entamées avec de grandes entreprises occidentales de la filière des hydrocarbures pour tenter de déterminer les besoins et les urgences. « L’outil de production n’était déjà pas assez performant avant la révolution », rappelle Jean-Jacques Royant, directeur de la coopération internationale au Groupement des entreprises parapétrolières et paragazières-Association des techniciens et professionnels du pétrole (Gep-AFTP), citant, notamment, les unités de liquéfaction de gaz (LNG) et les raffineries libyennes. La rénovation ou la reconstruction de certains équipements ou installations doivent aussi être réalisées, comme les sites de stockage de produits ou d’embouteillage de gaz.
Enfin, de façon générale, la filière libyenne manque cruellement de matériel et de technologies. Compte tenu du contexte politique, il n’est pas certain que les sociétés occidentales obtiennent rapidement des réponses à toutes leurs questions. Par exemple, est-ce que les autorités libyennes sont prêtes à raccourcir les délais d’achat des pièces de rechange indispensables à la maintenance de l’outil de production ? Personne ne peut dire aujourd’hui non plus si elles décideront de poursuivre la modernisation nécessaire de la raffinerie d’Azzawyia (50 km à l’ouest de Tripoli) et des installations de LNG à Marsa El Bregha (est du pays).
F. P.