Présidente de la section Hong Kong des CCEF (conseillers du commerce extérieur de la France), ancienne Managing director Asie Pacifique du groupe américain Dow Jones, qui publie le Wall Street Journal, Christine Brendle développe actuellement l’entreprise Kids Dailies, magazines en ligne pour enfants, qu’elle a fondée en 2004.
Le Moci. Comment expliquez-vous l’effet attractif de Hong Kong sur les entreprises et les entrepreneurs français ?
Christine Brendle. Hong Kong a plusieurs atouts importants. Hong Kong offre aux nouveaux arrivants occidentaux et en particulier français un cadre juridique familier qui permet d’asseoir toutes activités commerciales ou financières avec les garanties que l’on connaît en Europe. C’est d’un grand confort. C’est la ville idéale pour installer un centre régional. Lorsque j’occupais des fonctions de direction régionale, d’abord pour Hachette Filipacchi puis pour Dow Jones, j’ai eu l’occasion de tester l’efficacité des infrastructures qui permettent de rayonner dans toute la région de manière optimale. L’aéroport dessert des centaines de destinations et on y accède très facilement par un train rapide fiable et fréquent. En outre, l’usage très répandu de l’anglais fait que vous pouvez presque tout faire sans connaître le cantonais. Une langue très difficile par ailleurs et qu’après 22 ans à Hong Kong, je regrette de ne toujours pas parler ! Beaucoup d’étrangers sont pourtant comme moi ici, et ce serait impossible ailleurs en Asie. Hong Kong est également une ville où, moyennant un minimum de moyens, il fait bon élever une famille : les écoles sont de très bon niveau, la sécurité n’est jamais un souci, il est facile de s’installer et de trouver de l’aide domestique… J’ai eu, avant de venir à Hong Kong, une activité régionale depuis Tokyo et c’était en fait assez pénible. Quand j’ai rejoint le groupe de presse américain Dow Jones, j’ai pleinement apprécié les garanties sur la liberté de la presse qui existent à Hong Kong, ce qui pour une entreprise de presse est évidemment essentiel. Et là non plus, ce n’est pas le cas partout en Asie.
Le Moci. Depuis votre arrivée en 1993, comment avez-vous vu évoluer Hong Kong comme terre d’accueil des entreprises étrangères ?
C. B. Depuis cinq ans environ, un nouvel élan est en train de transformer l’ambiance et le milieu des affaires, encore largement dominé par le monde de la finance et de la banque. On voit apparaître chaque mois de nouveaux incubateurs de start-up (qu’il s’agisse de Cocoon, Nest, Paperclip, etc). L’apparition de réseaux de start-up et de petites et moyennes entreprises correspond en fait bien à l’ADN de Hong Kong et dynamise l’éco-système. Ce mouvement est efficacement soutenu par certaines instances locales comme « HKTDC » et « Invest HK ». Cyberport décolle enfin, de même que HK Science et Techno park. Tout cela connecte Hong Kong avec les grandes villes du monde qui connaissent le même élan : East London Tech City, Silicon Alley in NY et bien sûr Silicon Valley. Le niveau des loyers est difficile à justifier, mais le « sharing » (partage) que les incubateurs offrent permet de contourner le problème.
L’autre chose qui a beaucoup évolué depuis mon arrivée en 1993, c’est la qualité et la diversité de la scène gastronomique. Des quartiers entiers se sont transformés, les lieux sympas pour sortir, boire et manger se sont multipliés. En 1993 il n’y avait guère que les restaurants de dimsums, les clubs ou les restaurants d’hôtels ! Les Français ont eu un rôle non négligeable dans cette transformation.
Le Moci. Quelles ont été pour vous les « bonnes surprises » de Hong Kong ?
C. B. En abandonnant son tissu industriel au profit de métiers de services, Hong Kong a permis aux talents créatifs de s’épanouir. On trouve donc à Hong Kong un pool de personnes créatives et qualifiées, on trouve des « self-starters » (autrement dit des gens à qui on peut soumettre un problème et les laisser le prendre en main pour le résoudre), des gens qui parlent 3 ou 4 langues couramment sans se rendre compte de ce que cela « vaut » et une mentalité du « rien n’est impossible ».
Avoir des employés en qui vous pouvez avoir confiance est un très grand atout. Avec un peu de recul, je constate qu’en 20 ans de coopération avec des employés hongkongais, je n’ai pas eu la moindre « entourloupe ». La droiture des Hongkongais est donc une autre qualité très appréciable.
Pour des entreprises ou des entrepreneurs qui souhaitent tenter leur chance à Hong Kong, il ne faut pas hésiter à tirer pleinement avantage des structures d’accueil déjà citées plus haut ainsi que des chambres de commerce. Et bien anticiper la résolution de l’équation loyer pour son logement et éventuellement ses bureaux, car c’est vraiment le principal point noir. Sinon c’est go go go !
Propos recueillis par Florence de Changy