Singapouriens, Coréens, Chinois… l’Asie convoite les ressources naturelles du Gabon (le bois, le pétrole). Mais elle participe aussi à la diversification économique du pays.
Au Gabon, le groupe singapourien Olam serait le premier investisseur hors pétrole. Le géant agroalimentaire s’est notamment engagé à injecter 2,5 milliards de dollars dans le palmier à huile et l’hévéa d’ici à 2016. Mais, d’après nos informations, son investissement à ce jour n’aurait pas franchi la barre des 410 millions de dollars.
Olam a signé une convention de partenariat avec la République gabonaise, qui comprend aussi le développement de la zone économique spéciale (ZES) de Nkok. Un investissement qui n’était pas prévu au départ, mais, Olam n’a pas eu le choix. Rassuré par l’arrivée d’Ali Bongo au pouvoir en 2009, Olam Gabon, qui avait prévu de se retirer du pays, a changé son fusil d’épaule à l’instigation de son directeur général indien Gagan Gupta.
La transformation du bois – l’activité forestière étant la première du groupe chronologiquement – est la seule où Olam est aujourd’hui seul à la barre. Dans le palmier à huile, la République gabonaise est partenaire à 30 % d’une joint-venture développant un projet de l’ordre de 394 milliards de francs CFA à Kango (7 300 hectares) et Mouila (19 160 ha). Sa part est moindre, de 20 %, dans la joint-venture qui conduit les plantations d’hévéa de Bitam (28 000 ha), un projet estimé à 91,5 milliards de francs CFA. Il s’agit aussi d’un partenariat public-privé (PPP) dans le cas de la ZES, la participation de l’État dans le projet s’élevant cette fois à 40 %.
La Corée est aussi représentée. Impliqué dans le financement du projet e-gouvernement, Samsung se serait aussi engagé à construire pour 2016 une raffinerie d’une capacité de trois millions de tonnes par an dans la Zone économique spéciale de Mandji, près de Port Gentil. Le coût serait de l’ordre d’un milliard d’euros.
La Chine a un fort ancrage dans les BTP. Dans les travaux publics, ses entreprises paraétatiques, qui bénéficiaient de dotations en matériel de Pékin, étaient capables de proposer des prix inférieurs de 30 % dans les routes. « Ce n’est plus le cas. Les prix sont semblables maintenant », constate Jacques Alquier, administrateur délégué général d’Entraco, une société qui s’est diversifiée peu à peu, en commençant par le bâtiment, puis les petites routes, le génie civil, les grandes routes, ce qui lui a permis de couvrir toute la chaîne du BTP, y compris le concassage et l’enrobage. Dans la construction, c’est la compagnie chinoise Sinohydro qui a été retenue pour le chantier du barrage hydroélectrique de Grand Poubara, devant alimenter en électricité la province du Haut-Ogooué, notamment le complexe de silicomanganèse (capacité : 65 000 tonnes par an) et de manganèse métal (capacité : 20 000 t/ an) que la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) fait construire, à proximité de ses installations minières existantes à Moanda. Pékin est surtout intéressé par le pétrole et l’extraction minière, mais son engagement dans ces secteurs est aujourd’hui freiné, en raison de différents sérieux qui l’opposent à Libreville, touchant à deux dossiers sensibles. D’abord, la mine de fer de Belinga, dont l’exploitation a été attribuée en juin 2010 à un groupement chinois du nom de China national Machinery and Equipment import and export Corporation (CMEC), mais qui n’a pas démarré, dit-on du côté du partenaire étranger, faute d’infrastructures, notamment de voies ferrées. Toujours est-il que le gouvernement gabonais aurait suspendu la convention minière liant l’État à la Compagnie minière de Belinga (Comibel), filiale à 75 % de CMEC.
Autre dossier qui oppose Pékin et Libreville, celui du groupe pétrolier Addax, filiale de Sinopec depuis 2009, qui pourrait faire l’objet d’une prise de participation de la compagnie publique Gabon Oil Company (GOC).
François Pargny