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Guide business Côte d’Ivoire 2018 : relations bilatérales

Malgré la présence commerciale de la Chine, la France conserve des positions fortes dans de nombreux secteurs, comme la téléphonie, la banque, l’énergie. Reste à s’adapter à la réalité d’un marché, limité et très concentré sur Abidjan, favorable à une offre moins disante en provenance des pays émergents.

 

Depuis l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara en mai 2011, la Côte d’Ivoire est courtisée. La Chine y a fait une entrée fracassante, devenant même son premier fournisseur en 2016, avec une part de marché de 18 %, contre 13 % à la France.

Est-ce que Paris doit s’inquiéter de la première place de Pékin ? La réponse doit être nuancée, car l’Hexagone demeure de loin le premier fournisseur d’aide et d’investissements directs étrangers (IDE). En l’occurrence, l’Agence française de développement (AFD) gère deux ambitieux contrats de désendettement et de développement (C2D), représentant des montants importants : 630 millions d’euros le premier et 1,13 milliard d’euros pour le deuxième C2D qui se termine en 2020.

Côté investissement, la France reste en stock un leader solide, avec 2,5 milliards d’euros fin 2016 sur un total d’IDE en Côte d’Ivoire de 6,63 milliards d’euros (7,6 milliards de dollars). D’après le Service économique régional à Abidjan, 700 entreprises françaises sont implantées, dont près de 200 filiales, qui contribuent à 50 % des recettes de l’Etat en matière de TVA, de redevances et d’impôts sur les sociétés. Quant à leur chiffre d’affaires cumulé, il représenterait environ 30 % du produit intérieur brut (PIB). Autre motif de satisfaction, le 15 juin dernier, Airbus a signé un protocole d’accord de coopération visant à soutenir le développement d’une industrie aéronautique et spatiale en Côte d’Ivoire. Or, il s’agit d’un domaine jugé prioritaire par ce pays.

Cette situation favorable sur le plan des investissements et de la coopération industrielle ne signifie pas qu’il ne faut pas s’inquiéter de l’affaissement de la France sur le plan commercial. D’autant que l’année en cours risque de s’achever par un recul assez net. En 2017, la livraison de 2 Airbus avait contribué à la hausse de 10 % des exportations françaises, qui s’étaient élevées à 1,181 milliard d’euros.

Premier poste d’exportation, la pharmacie se montrait toujours active et en bonne santé, avec une hausse de près de 4 %. Cette année, c’est le gros coup de fatigue, avec une chute de 36,55 % sur huit mois. Malgré un bond de 22,53 % par rapport à janvier-août 2017 de la mécanique, devenue premier poste à l’export, les ventes tricolores ont ainsi accusé une perte de 10 % à 688,7 millions d’euros entre janvier et août 2018. D’après la base de données GTA (groupe IHS Markit), la Chine disposerait à cette date d’une part de marché de 14,18 % et la France de 10,35 % dans les importations ivoiriennes.

Le Nigeria se serait hissé au deuxième rang, avec une part de 12,84 %, en raison de livraisons importantes d’hydrocarbures, qui constituent la totalité de ses fournitures à la Côte d’Ivoire.

Les raisons de « la baisse marquée » des ventes françaises de pharmacie ne sont pas encore connues. « Nous observons cette baisse non seulement dans ce pays mais dans toute l’Afrique de l’Ouest », indique François Sporrer, le chef du Service économique régional, basé à Abidjan. Des phénomènes de saisonnalité-stockage-déstockage auraient joué.

S’agissant des structures d’importation et de distribution pharmaceutique, la France domine toujours, avec des sociétés comme Laborex, DPCI ou CFAO. Ce n’est pas le seul secteur où elle tient le haut du pavé. Dans la téléphonie, d’après les chiffres récoltés par l’Autorité de régulation des télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI) au deuxième trimestre 2018, Orange détient 97 % du marché du fixe (300 000 abonnés), 43 % du mobile (14, 558 millions), 98 % de l’internet fixe (152 975). Sa part de marché dans le chiffre d’affaires total des acteurs de l’internet mobile serait aussi de 46 %. Dans l’hôtellerie, Accor est très actif. On lui prête de vouloir créer un hub africain à Abidjan et de construire rapidement un Mercure.

Bien sûr, on trouve des secteurs où la France est largement concurrencée, comme le BTP, par les Marocains, le Tunisiens, les Chinois, les Turcs. « Mais Il y a des secteurs dans lesquels la France est très compétitive et où les perspectives sont particulièrement attrayantes. C’est notamment le cas du secteur de l’énergie, avec des compagnies telles qu’Engie, Schneider, Eranove, Vinci Energie, Bouygues Energie ou Veolia », observe Julien Delcourt, délégué de la Chambre de commerce européenne en Côte d’Ivoire.

Malgré le dynamisme de certaines banques étrangères, comme le groupe marocain Attijariwafa, la Société Générale fait toujours la course en tête. Certes, la Chine est de plus en plus présente avec ses financements très avantageux. Ainsi, les travaux du barrage de Soubré, d’un coût supérieur à 500 millions d’euros, ont été financés à 85 % par la banque d’import-export chinoise Eximbank. Et c’est une entreprise chinoise, Sinohydro, qui a réalisé l’ouvrage.

Il faut que les entreprises apprennent à se positionner dans une région qui n’est plus une zone de confort. « Il y a d’abord des investissements de rattrapage par rapport à la période difficile. Ensuite, on voit ici des pays qui n’y étaient pas autrefois. Enfin, il y a la mondialisation des marchés. Or, les Ivoiriens sont curieux et ils testent », prévient Jean-Louis Giacometti, directeur général de CCI France Côte d’Ivoire.

Pour autant, il y a des différences de culture et d’approche et la France connaît bien le marché et le peuple ivoiriens. Un atout indéniable. Mais il faut aussi « comprendre que le marché n’est pas aussi gros que cela », fait remarquer Jean-Louis Giacometti. La Banque mondiale a établi que le taux de pauvreté nationale était de 46 % en 2015. Et 60 % du PIB sont concentrés dans une seule ville de 5 millions d’habitants, Abidjan.

Or, remarque encore le dirigeant de la compagnie consulaire, « les pays émergents viennent avec des produits et des outils de production moins chers ». Selon lui, il faut comprendre que « le marché n’a pas forcément les moyens d’absorber des produits de qualité ». D’où l’intérêt également de choisir la voie de l’implantation pour fabriquer localement.

Pendant ce temps, la Chine poursuit son offensive. Adama Koné, le ministre ivoirien de l’Economie et des finances, s’est rendu du 23 au 31 octobre à Pékin pour participer à un séminaire sur l’initiative « la ceinture et la route » au centre international de la finance de Bank of China.

L’établissement bancaire, à cette occasion, aurait donné son accord à l’ouverture d’une agence à Abidjan. Un de ses représentants est ainsi attendu dans la capitale économique pour étudier le projet. 

François Pargny

 

 

AFD : vers un 3e C2D

Reconvertir la dette ivoirienne en projets au profit des entreprises françaises. Evoquée courant 2012, cette solution aura fait l’objet d’un premier contrat ou C2D (Contrat de désendettement et de développement) dès décembre de la même année, pour une période triennale (2012-2015), suivi, en 2017, d’un deuxième contrat de désendettement triennal, donc se terminant en 2020. Enfin, un troisième C2D, cette fois d’une période de cinq ans, a été annoncé pour 2020.
Depuis 2012, indique-t-on à l’Agence française de développement (AFD), qui gère les C2D, « son soutien s’inscrit principalement dans le cadre de deux contrats de désendettement et de développement pour un montant total d’1,7 milliard d’euros ». En ce qui concerne le futur C2D, Bruno Koné, le porte-parole du gouvernement ivoirien, le 4 avril, a cité le chiffre de 749 milliards FCFA, soit près de 1,14 milliard d’euros.
Lors des deux premiers C2D, si l’on exclut l’appui budgétaire dit ciblé, qui concentre 21 % des deux enveloppes, et 2 % également dévolus à des études et à la réinsertion professionnelle des militaires démobilisés, les grands secteurs de répartition sont au nombre de six : infrastructures de transport, 20 % ; éducation, formation et emploi, 18 % ; développement urbain, eau et assainissement, 12 % ; agriculture, développement rural et environnement, 12 % ; santé et protection sociale, 9 % ; justice, 5 %. Le 3e C2D devrait ajouter à ces priorités celles du climat, des énergies renouvelables ou encore de l’État civil.
S’agissant du transport, explique l’AFD, « en 2012, les besoins de financement ont été évalués à 1 500 milliards de FCFA (2,3 milliards d’euros) pour la remise en état d’un réseau prioritaire d’environ 33 000 km. Il faut y ajouter environ 100 milliards de FCFA (150 millions d’euros) pour l’entretien annuel ». Dans les routes, les deux premiers programmes ont porté largement sur les routes interurbaines. À Abidjan, le 8 avril dernier, les travaux de rénovation du pont Félix-Houphouët-Boigny achevé en 1957 ont été lancés par Eiffage et Spie Batignolles avec un financement de 62,5 millions d’euros dans le cadre du 2e C2D. De même, dans l’eau à Abidjan, « seule 65 % de la population bénéficiait d’une connexion au réseau en 2014, et plus de 60 % des abonnés ne sont pas desservis en continu », précise-t-on à l’AFD. Ainsi, 30,5 millions d’euros sont dégagés pour mener des travaux de renforcement et d’extension du réseau d’eau potable et l’optimisation de l’utilisation de la ressource en eau de la capitale économique.

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