À l’instar des pays occidentaux, la Corée du Sud est une économie développée avec des besoins en matière de technologie dans l’information, la communication ou la cybersécurité. Le marché se modernise, comme le montre l’essor de l’e-commerce et la recherche de produits gourmets. Enfin, le vieillissement de la population génère une demande dans le logement, les loisirs et la santé.
Agroalimentaire : un appétit croissant pour les produits gourmets
Toujours plus curieux et à la recherche de qualité, les consommateurs sud-coréens sont devenus friands de produits alimentaires Made in France. Entre 2008 et 2012, les importations de fromages français ont augmenté de 215 %. Un chiffre qui s’explique autant par l’accord de libre-échange, qui a éliminé les droits de douane sur la quasi-totalité des exportations agricoles européennes, que par « l’occidentalisation des goûts et la curiosité pour les nouvelles découvertes », analyse Sukyoung Chung, directrice Sopexa Corée, une agence de communication internationale spécialisée dans l’alimentaire, le vin et l’art de vivre.
Les desserts et autres gourmandises ont particulièrement le vent en poupe. « Depuis six ans, les macarons, les crèmes, les biscuits et les chocolats connaissent une croissance fulgurante dans les cafés ou dans les boutiques de cadeaux ». En témoigne l’arrivée récente et couronnée de succès, à Séoul, des enseignes Pierre Hermé et la Maison du Chocolat. « C’est un marché intéressant car il en faut pour tous les prix. Pour l’instant, les marques françaises ont tendance à se positionner sur le haut de gamme. Mais il y a peut-être des opportunités à saisir dans des gammes de prix plus abordables. Il n’y a qu’à voir le succès des Ferrero Rocher pour la Saint-Valentin », explique Sukyoung Chung.
« Bien qu’il soit détenu à 76 % par les entreprises Lotte Confectionary, Crown Haitai Confectionary et Orion, le marché des produits sucrés présente de belles opportunités pour les entreprises étrangères, et particulièrement pour les entreprises françaises disposant de produits haut de gamme et de qualité. Ainsi, le marché du chocolat se révèle être très prometteur avec une consommation qui a doublé en dix ans et des importations s’élevant à 260 millions de dollars US en 2012 », analyse Business France à Séoul dans sa dernière étude sur le secteur. Depuis 2013, les entreprises françaises agréées peuvent exporter de la charcuterie vers le marché sud-coréen. La même année, trois entreprises industrielles venues de l’Hexagone ont été les premières à obtenir l’autorisation sanitaire nécessaire. Celles qui souhaiteraient faire de même doivent en faire la demande auprès de FranceAgrimer afin d’obtenir un agrément préalable.
E-commerce : la montée des achats en ligne chez les 20-39 ans
Acheter sur Internet, perçu comme facile et pratique, est devenu un réflexe pour les Sud-Coréens.
Les distributeurs présents sur place le savent bien : pour réussir sur le marché coréen, la présence sur Internet est indispensable, si ce n’est prioritaire. Le pays, qui compte 47 millions d’internautes, est champion en matière d’e-shopping ou m-shopping (achats sur téléphone portable). En 2012, 67 % de la population sud-coréenne déclaraient acheter en ligne, pour un montant qui avoisinait les 45 euros par mois en 2013. Principaux représentants de cette consommation en ligne : les 20-39 ans. « Je n’aurais jamais cru qu’on puisse vendre autant de chocolats en ligne. En France, ce serait difficile », témoigne Hubert Paré, importateur de produits gourmets, dont les ventes en ligne enregistrent annuellement un taux de croissance de 15 à 20 %. Pour réussir le pari du shopping en ligne, les entreprises étrangères, doivent toutefois apprendre à maîtriser les subtilités de l’environnement informatique coréen et s’adapter au marché du e-commerce local (visuels, codes marketings, exigences législatives en matière de description des produits, référencement sur le moteur de recherche Naver et sur les blogs influents, etc.).
Silver economy : des affaires en or dans le logement, les loisirs et la santé
De profondes mutations sociologiques (les enfants prennent de moins en moins en charge leurs parents retraités), une population vieillissante (les plus de 60 ans représenteront 39 % de la population en 2050) et avide de nouvelles technologies : trois éléments qui expliquent que le marché des seniors en Corée du Sud est particulièrement porteur et riche en opportunités pour les acteurs français de l’innovation, à l’instar du laboratoire Orange Labs qui travaille en réseau avec des acteurs locaux sur les villes ou les réseaux intelligents.
La silver economy, priorité affichée des gouvernements français comme coréen, recouvre aussi bien la domotique que l’e-santé. À Songdo et dans les nouveaux complexes d’appartements, les habitations sont déjà équipées pour des consultations médicales à distance. Mais si les grandes marques coréennes se sont déjà lancées dans la course aux maisons intelligentes et aux objets connectés, il reste encore des besoins pour des solutions innovantes en termes de service comme de produits, de logiciels comme de sécurité. La France ayant également de grandes ambitions dans ce domaine, de fructueux partenariats devraient voir le jour, au niveau industriel comme universitaire. Autre marché en devenir bénéficiant d’un gros potentiel : les silver towns, résidences de luxe entièrement pensées pour les personnes âgées et combinant logements, infrastructures médicales, de bien-être et de loisirs. Déjà présents pour une population très aisée, ces complexes devraient se généraliser. « L’expertise française en matière de maisons de retraite sera alors utile », prédit David-Pierre Jalicon, président de D.P.J. & Partners Architecture. « Certaines entreprises spécialisées dans les résidences seniors prennent d’ores et déjà leurs marques en Corée », assure l’architecte.
De même, les services à domicile, quasi-absents en Corée, sont prompts à se développer sur le modèle à la française. Alors que la génération des baby-boomers
arrivera à la retraite à l’horizon 2020, il manquerait déjà quelque 150 000 places en maisons de retraite.
Depuis 1996, la loi sur la protection sociale des personnes âgées autorise la création d’établissements de retraite privés. Mais pour que ce secteur encore balbutiant émerge véritablement, il faudra cependant attendre une meilleure coordination entre secteurs public et privé, et les investissements conséquents qui suivront.
TIC : un marché pour l’innovation française et les technologies de pointe
« Économie créative ». C’est avec ce concept phare que la présidente sud-coréenne Park Geun-hye a promis de soutenir la croissance au pays du matin calme. Cette économie créative, qui a pour but de créer de nouveaux marchés et de nouveaux emplois, est aussi synonyme d’opportunités pour les PME françaises. Par exemple, le gouvernement coréen a décidé de mettre sur pied des « clusters d’innovation ». L’un des derniers exemples en date : « la vallée industrielle urbaine et high-tech », dévoilée par le ministère de l‘Aménagement du territoire en début d’année, qui doit devenir une communauté d’entreprises de logiciels. Le site devrait attirer jusqu’à 121 millions d’euros d’investissements et employer à terme plus de 100 000 salariés. « Si la Corée décide de jouer la carte de l’ouverture aux étrangers, ces clusters constitueront un formidable écosystème pour accueillir des startups françaises », s’enthousiasme David-Pierre Jalicon, président de la chambre de commerce franco-coréenne. « Nous nous battons, via le label French Tech, pour être partie prenante de cette économie créative pleine de potentiel ». L’initiative French Tech, lancée en novembre dernier par la secrétaire d’État chargée du numérique, vise à promouvoir l’écosystème high-tech français à l’étranger.
La Corée du Sud, l’une des nations les plus connectées au monde et qui travaille déjà à la 5G, investit depuis des années dans l’industrie de pointe. Que peuvent apporter les Français au pays des géants de l’électronique Samsung et LG, en matière de nouvelles technologies ? Des produits, des softwares et des innovations technologiques de pointe. C’était d’ailleurs tout l’objet de la visite de Fleur Pellerin à Séoul au printemps 2013. Persuadée que les start-up françaises sont en mesure de conclure des contrats avec les grands groupes coréens, la ministre chargée à l’époque des PME, de l’innovation et de l’économie numérique, a profité de l’occasion pour encourager les entreprises françaises à attaquer le marché sud-coréen des TIC. Très forts en matière de hardware, les Coréens sont en revanche plutôt à la traîne en matière de logiciels et de certains services informatiques. Business France estime d’ailleurs que près de 80 % des logiciels sur le marché seraient d’origine étrangère.
Eva John
Cybersécurité : un créneau sensible pour les PME
Férus de nouvelles technologies, les Coréens ont tendance à leur faire entièrement confiance… et parfois trop. Régulièrement sujet à des cyber-attaques, le pays va devoir renforcer sa sécurité informatique. « Les besoins en logiciels de sécurité vont augmenter. Et les PME françaises auront une carte à jouer, en proposant des solutions innovantes », prédit Sylvère Smoliga, fondateur d’IT-Concept, une entreprise spécialisée dans les systèmes réseaux. Si le segment est pour l’instant dominé par les solutions coréennes, la demande pour une meilleure protection des données ne va cesser d’augmenter à mesure que l’environnement informatique va s’ouvrir. D’après le ministère coréen des Sciences, des TIC et de la Planification, le taux de croissance dans le secteur serait estimé à 7,7 % sur la période 2012-2016.
Duty free : une croissance de 20 % par an
Avec un chiffre d’affaires de 7,8 milliards de dollars en 2014, le marché coréen du duty-free est le plus gros du monde en termes de volume. Il affiche une croissance d’environ 20 % chaque année. Derrière ce succès, l’engouement des Asiatiques les produits des marques de luxe étrangères et la structure de duty-free particulière à la Corée du Sud, avec des magasins qui proposent des prix détaxés en plein centre-ville. Initialement mis en place pour attirer les Japonais dans l’après-guerre, ce système profite aujourd’hui en majorité aux touristes chinois, qui sont 6 millions à se rendre à Séoul chaque année. Du fait de la hausse des prix du luxe, les Coréens se dirigent de plus en plus vers les marques premium. “C’est là un segment porteur pour les marques françaises… à condition d’être innovantes et de bénéficier déjà d’une certaine notoriété. Car ici plus qu’ailleurs, c’est la renommée d’une marque qui fait son succès”, assure Daniel Mayran, président de Bluebell Korea, qui gère la distribution en duty-free de produits de luxe, notamment du groupe LVMH.