La France détient de solides positions commerciales et industrielles en Colombie. Le traité de libre-échange avec l’Union européenne ouvre des perspectives nouvelles dans un contexte de renforcement de la relation bilatérale : plusieurs visites officielles sont prévues en 2015.
En moins d’une décennie, les échanges commerciaux franco-colombiens ont triplé, passant ainsi de 490 millions d’euros en 2004 1,6 milliard en 2013. L’an dernier, les seules exportations françaises ont augmenté de 25 % grâce à des livraisons de matériel aéronautique pour atteindre 1,05 milliard. Depuis 2006, le solde affiche un excédent au bénéfice de la France.
Plus encore, l’entrée en vigueur le 1er août 2013 de l’accord multipartite entre l’Union européenne, le Pérou et la Colombie, ouvre des perspectives très favorables pour les exportations tricolores. À l’issue d’une période de transition, les produits industriels ainsi que les produits de la pêche seront libéralisés, tandis que les échanges de produits agricoles seront plus ouverts même si quelques produits ont été exclus tels que le riz, le maïs ou la viande de porc. Certains produits ont bénéficié d’un accès libre immédiat, sans droit de douane, comme le vin pour lequel les ventes françaises ont progressé de 52 % pendant les huit premiers mois de 2014, atteignant ainsi un montant de 3,5 millions d’euros. Pour l’Hexagone, c’est un nouveau débouché qui s’ouvre dans un secteur traditionnellement dominé par les producteurs argentins et chiliens.
L’offre française est bien en phase avec un marché colombien demandeur de biens de consommation et de biens d’équipement. La France occupe d’ailleurs une bonne position : 8e fournisseur de la Colombie en 2013 (2,4 % du marché), elle occupe le deuxième rang européen après l’Allemagne (3,7 % du marché). Les États-Unis, qui ont également signé un traité de libre-échange avec la Colombie, entré en vigueur le 15 mai 2012, sont solidement installés avec une part de marché de 27,6 % en 2013.
Un autre point fort de la présence française réside dans l’importance des investissements étrangers. Plusieurs grands groupes français disposent d’une présence historique en Colombie : Renault, Casino, qui contrôle le Groupe Exito, leader de la distribution, Saint-Gobain, Sodexo, etc. « Ces grands groupes sont restés en Colombie malgré les crises », souligne Jean-Hugues Chailley, président de la section Colombie des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF).
Au cours des trois dernières années, il y a eu un net regain d’intérêt pour la Colombie. Le succès de la politique de « sécurité démocratique » du président Alvaro Uribe et la croissance de l’économie, ont incité plusieurs grands groupes tricolores à investir en Colombie par le biais de rachats partiels ou complets de sociétés. « Plusieurs groupes du CAC 40 qui ne s’étaient jamais intéressés à la Colombie ont pris pied sur le marché », confirme Jean-Hugues Chailley.
Ainsi, Essilor a créé une filiale en 2012 puis racheté en 2013 Servi Optica, numéro un de la distribution de verres ophtalmiques. En 2012, L’Oréal a acquis la marque Vogue, le leader du maquillage en grande diffusion. La même année, Sanofi a pris le contrôle de Genfar, leader de la fabrication de médicaments. Grâce à cette opération, Sanofi est devenu le numéro 1 du marché pharmaceutique colombien et a élargi sa présence en Amérique latine, Genfar étant présent commercialement dans une douzaine de pays de la région. Le dernier gros investissement en date concerne le groupe Axa qui a acquis en 2013 51 % de Colpatria Seguros, un des principaux acteurs du marché colombien des assurances, pour un montant de 279 millions d’euros.
Les PME s’intéressent également au marché colombien, mais l’exportation prend le pas sur l’investissement, du moins dans un premier temps. La Colombie reste en effet un marché ouvert aux produits étrangers. Cependant, on assiste à un développement de la présence d’entrepreneurs individuels dans les secteurs les plus variés : distribution alimentaire, services, conseil aux entreprises, etc. La Chambre franco-colombienne de commerce et d’industrie (CFCCI) dispose d’une pépinière qui héberge 17 entreprises.
Selon le Service économique de Bogota, il y a 130 filiales d’entreprises françaises en Colombie, employant 83 000 salariés. À cela s’ajoutent les entreprises non recensées, soit un total d’au moins 200 entreprises, source de 200 000 emplois directs et indirects. Ce poids économique de la France ne s’est pas toujours reflété dans la qualité des relations bilatérales, surtout lors des tractations pour la libération d’Ingrid Betancourt, qui ont froissé le président Uribe. Cependant, les Colombiens ne sont pas rancuniers et souhaitent développer les relations dans les domaines les plus variés.
Du côté français, le rythme des visites s’est intensifié au cours des dernières années. Nicole Bricq, alors ministre du Commerce extérieur, s’est rendue en Colombie à la fin de 2012 et Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du développement international, en 2013. Une visite officielle du président de la République de Colombie, Juan Manuel Santos, en France est prévue les 26 et 27 janvier. Le déplacement de Manuel Valls, la première visite d’un Premier ministre français en Colombie, initialement prévu en décembre 2014, a été reporté à mars-avril 2015.
L’année 2014 a vu un événement capital pour la relation bilatérale. L’accord sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements entre la France et la Colombie (APRI) a été signé le 10 juillet à Bogota. Le texte doit être ratifié par les parlements des deux pays et soumis à l’examen de la cour constitutionnelle de Colombie. Un accord de non-double imposition est actuellement en cours de négociation. « Le texte est quasiment finalisé et il y a une volonté d’aboutir des deux parties », affirme-t-on à la Direction générale du Trésor (DGT).
Le moment est donc propice pour s’intéresser à la Colombie. L’expérience des grands groupes montre cependant l’importance d’arriver au bon moment. « Il faut se dépêcher, car la concurrence est forte. Une fois que les positions seront consolidées, le coût d’entrée sur le marché sera plus élevé », souligne Jean-Hugues Chailley.
Daniel Solano
L’AFD finance le tramway et le Métrocable à Medellín
Les financements de l’Agence française de développement (AFD) ne sont pas directement liés à l’activité exportatrice française. L’AFD se veut cependant soucieuse, au travers des projets qu’elle finance, de valoriser le savoir faire français. Un prêt de 250 millions de dollars à la municipalité de Medellín permet ainsi de financer la ligne de tramway de 4,2 km (société Translohr) et deux lignes de Métrocable (entreprise POMA). Depuis l’ouverture en 2009 de son bureau à Bogota, l’AFD a accordé au total une dizaine de prêts en Colombie pour un total de 1,2 milliard d’euros. L’Agence finance deux types d’acteurs : le gouvernement central colombien pour accompagner les politiques de décentralisation, de gestion intégrée des ressources en eau et de protection sociale en matière de santé ; et les collectivités et entreprises publiques territoriales, essentiellement du département d’Antioquia.