L’Australie est ouverte aux investisseurs internationaux. Pour autant, ce pays-continent possède des règles fiscales qui lui sont propres et que les entreprises étrangères doivent absolument adopter. C’est ce qu’explique ici une Française des antipodes, Martine Joly, fondatrice du cabinet d’expertise comptable Bilateral Solutions, à Sydney.
La fiscalité appliquée en Australie est plutôt libérale. Elle n’est pas « bloquante » pour le développement de votre projet, mais elle existe bien ! Ainsi, ce pays-continent n’impose pas de taxe locale et régionale aux entreprises. De même, il n’existe pas d’impôt forfaitaire annuel et d’obligation de réserve légale et les déficits sont reportables sans limitation de durée.
Pour les particuliers, il n’y a ni droits de succession ni d’ISF (impôt sur la fortune). Pour ce qui est des charges sociales de l’employeur, elles se situent entre 10 et 15 % du salaire brut et il n’existe pas de retenues sociales salariales.
À noter, toutefois, que, pour les entreprises internationales, la réglementation est renforcée pour les prix de transfert. En outre, la fiscalité est importante sur les avantages en nature et il n’y a pas de déduction fiscale des provisions. Pour les particuliers, il n’existe pas de quotient familial, de déduction forfaitaire ou de couverture sociale universelle (Medicare) pour les résidents temporaires.
L’Australie est très avancée en matière d’information sur la fiscalité. L’Australian Taxation Office (ATO) est de loin la première organisation en matière d’utilisation de technologies de pointe et de data. ATO offre ainsi une application à télécharger sur smartphone rendant accessible en un clic les informations fiscales pour les entreprises et les particuliers (informations générales avec simulateurs de calculs).
De plus, tout compte en banque ou site internet ouvert en Australie est automatiquement lié à votre numéro fiscal (numéro d’identité fiscal personnel pour une entreprise ou un particulier). Il existe une convention fiscale franco-australienne depuis 1976, et la version actuelle, datant de 2006 et entrée en vigueur le 1er juin, 2009 régit non seulement les notions de résidence et de bases fiscales visant à éviter les doubles impositions, mais aussi les modalités d’échanges réciproques d’information et d’aide au recouvrement !
Actualité : pour soutenir la croissance, la loi de finances présentée le 12 mai 2015 prévoit pour les PME (chiffre d’affaires de moins de deux millions de dollars australiens/AUD), la possibilité de déduire immédiatement tout investissement à hauteur de 20 000 AUD et la réduction de leur taux d’IS (impôt sur les sociétés) de 30 % à 28,5 %.
1/ Présentation du système en place
• L’exercice fiscal australien s’étend du 1er juillet au 30 juin pour l’ensemble des déclarations fiscales personnelles et professionnelles. Seules les sociétés dont les parts sont détenues a plus de 50 % par une société étrangère peuvent demander une dérogation (SAP – Substituted Accounting Period) pour s’aligner sur la date de clôture du groupe.
• L’impôt sur les sociétés (Income Tax) est au taux linéaire de 30 %. La différence majeure pour le calcul de la base imposable porte principalement sur les amortissements, les provisions et le report illimité des pertes antérieures.
• Les calculs de prix de transfert et leur documentation sont soumis aux règles OCDE 2010. Il existe des règles de limitation en cas de sous-capitalisation (Thin Capitalisation), mais celles-ci ne s’appliquent que lorsque le montant des intérêts déduits dépasse 250 000 AUD par an. La convention fiscale bilatérale fixe les taux de retenues à la source (Withholding Tax), à 10 % sur les intérêts versés (0 % si versés à un organisme gouvernemental ou bancaire), à 5 % sur les redevances et à 0 % sur les dividendes, si la distribution porte sur des revenus après IS ou si la participation du receveur est supérieure à 10 %, et enfin à15 % en cas de distribution de revenus non soumis à l’IS.
• La GST (Good and Services Tax – TVA) est au taux uniforme de 10 %. Il existe, néanmoins, un taux zéro pour les denrées alimentaires de base, les services liés à l’éducation, et les soins médicaux. Les services financiers, quant à eux, sont exclus du champ d’application.
Conseil : Il est possible pour une PME d’optimiser la gestion de son cash-flow, en choisissant de payer la GST (services et marchandises) sur encaissement – décaissements et non pas au système « TVA en engagement ». Vous éviterez ainsi de payer en avance la GST non encaissée sur vos comptes clients !
• La déclaration de BAS (Business Activity Statement) est mensuelle ou trimestrielle. Elle regroupe l’ensemble de vos obligations fiscales, à savoir déclaration de GST, reversement des retenues à la source sur les salaires versés (PAYG – Pay as You Go), acomptes IS, et de taxe sur les avantages en nature (FBT – Fringe Benefit Tax).
Particularité, il n’existe pas de système de report d’une déclaration à une autre. Chaque BAS est traité distinctement. Aussi, si le montant est négatif, il sera automatiquement remboursé dans les 14 jours par virement direct sur votre compte en banque. Pour les importations de marchandises, l’Australie applique comme l’Union Européenne le système douanier harmonisé. Les droits de douane sont donc faibles et se situent généralement entre 0 et 5 %. Ils sont appliqués par catégorie de produits. Les modalités de dédouanement sont précisées sur le site www.customs.gov.au. La GST de 10 % sera due lors du passage en douane sur le coût de vos marchandises augmenté du prix du transport et des assurances.
Conseil : Pour les importateurs, il est possible de demander le régime du DGST (Deferred GST System) qui permettra d’auto-liquider la GST lors du passage en douane des marchandises (GST déclarée et récupérée en simultané sans aucun débours de trésorerie).
2/ Coût salarial
Le salaire net d’un employé correspond à son salaire brut sous déduction unique de la retenue à la source de son impôt sur le revenu. Pour l’employé ? le net du son bulletin de salaire est ainsi le net disponible après impôts. Le coût pour l’employeur est le brut.
Les charges de l’employeur se composent d’une assurance accident de travail (Workers’ Compensation) dont le taux varie en fonction du secteur d’activité (idem Urssaf AT), du paiement de la retraite obligatoire par capitalisation (Superannuation) sur le compte d’épargne retraite personnel de chaque salarié au taux actuel de 9,5 % (12 % à l’horizon 2020) et d’une taxe additionnelle (Payroll Tax) si la masse salariale dépasse les seuils fixés par État (4,75 à 6,85 % au-dessus d’un seuil de masse salariale allant de 550 000 à 1,85 million AUD).
Attention : Il existe une taxe (FBT) sur les avantages en nature consentis aux salariés. Cette taxe est à la charge exclusive de l’entreprise et déductible de ses résultats. Néanmoins, cette taxe représente environ 87 % de l’avantage attribué !
En ce qui concerne les résidents temporaires, il existe une exemption totale sur les frais de scolarité, les frais de déménagement (personnes et biens) et un abattement de 50 % sur la base d’un voyage par an pour la famille vers le pays d’origine.
Conseil : Toujours faire vérifier au préalable par un Tax Agent l’impact du FBT si vous envisagez de donner des avantages sociaux tels que mutuelle complémentaire ou voiture de fonction…
En résumé l’Australie offre un régime fiscal relativement avantageux pour un pays membre de l’OCDE, mais ce n’est pas non plus un eldorado fiscal. Les règles y sont bien définies, expliquées et appliquées !
Martine Joly, Expert-comptable (CA)et Tax Agent Cabinet Bilateral Solutions