Envoyer à l’étranger pour une période de 6 à 24 mois un jeune diplômé (de 18 à 28 ans) de l’Espace économique européen pour y développer l’activité de son entreprise ou prospecter de nouveaux marchés, tel est l’objectif du volontariat international en entreprise, plus connu sous son sigle V.I.E.
Et la formule est gagnante : Business France avance que 73 % des entreprises qui ont eu recours au VIE ont vu leur chiffre d’affaires progresser, 72 % ont accru leur notoriété et 60 % estiment avoir gagné de nouveaux clients. Alors que les premiers volontaires sont partis dès 2001, ce sont plus de 71 200 jeunes qui leur ont succédé, pour le compte de 7 100 entreprises. Et le dispositif connaît un succès croissant. En janvier 2018, 1 956 entreprises avaient missionné 10 152 V.I.E dans 129 pays.
« Le V.I.E. est un outil permettant d’embaucher facilement des jeunes souhaitant travailler à l’étranger grâce à la souplesse des contrats et de leur durée et une prise en charge par Business France du package social. Notre rôle se limite à déposer les offres et à sélectionner les candidats », se félicite Sandrine Courti, responsable administrative et RH de Gregori International, PME familiale spécialisée dans l’aménagement d’espaces verts haut de gamme et la construction de terrains de sport.
Les entreprises apprécient également d’accéder à un vivier de jeunes diplômés issus des meilleures grandes écoles. « Mais un diplômé d’école de commerce, d’ingénieur ou de fac et d’économie n’est pas un spécialiste du commerce national, il faut donc attirer l’attention de ces jeunes sur la nécessité de suivre des Master dédiés car il y a une telle sophistication aujourd’hui des modèles d’export, que les compétences pointues sont essentielles », met en garde Étienne Vauchez, président de l’OSCI, la fédération des sociétés d’accompagnement et de commerce international.
Les PME restent les premières utilisatrices
Si les grands groupes pourvoient un volume élevé de missions, les PME restent les premières utilisatrices. En janvier 2018, elles représentaient 65 % des employeurs. Business France, qui gère le dispositif, propose d’ailleurs des solutions adaptées pour les petites sociétés. Il est par exemple possible de bénéficier d’un portage par un grand groupe ou une société d’accompagnement à l’international (SCI) pour suivre le volontaire au cours de sa mission, de bénéficier des structures d’accueil ou d’encadrement des Chambres de commerce et d’industrie françaises à l’international (CCIFI) ou encore de faire parrainer un V.I.E. par un Conseiller du commerce extérieur de la France (CCEF). Des formules de temps partagé entre PME ciblant un pays commun existent également.
Gregori international a déjà proposé une demi-douzaine de missions très variées : conducteur de travaux, commercial, comptable, responsable hygiène et sécurité
environnement ou encore responsable achats et logistique. « Nos missions correspondent pour moitié à un chantier d’une durée précise, et pour l’autre à une période de test qui peut ensuite conduire à une embauche », avance Sandrine Courti.
Un formidable tremplin vers l’emploi
Le V.I.E. s’avère en effet un formidable tremplin vers l’emploi. Lui-même ancien volontaire international, Ivan Lebeau, président de Gamestream, une société de jeux vidéo en streaming, vient de pourvoir deux offres, à Dubaï et Jakarta. « La première mission consiste à développer le business auprès des hôtels, l’autre suppose un profil plus technique pour superviser le déploiement de serveurs dans les différents data centers. Si les missions se passent bien, nous recruterons les jeunes », assure-t-il.
Selon Business France, 68 % des volontaires se voient proposer une embauche à l’issue de leur mission. Diplômé de l’Edhec et de l’Institut français du pétrole, Hervé Kacou a par exemple passé 18 mois en V.I.E. chez Total avant d’être embauché en début d’année comme économiste spécialisé sur le marché brésilien.
Les missions, généralement à fortes responsabilités, évoluent aussi selon l’engagement du jeune. En V.I.E. à Madrid depuis juillet pour Selectra, Elisa Lopez fait de l’acquisition payante sur le Web : elle a démarré par les marchés belges, autrichiens et italiens pour s’occuper désormais de la France, le plus gros marché. Ces responsabilités supposent une grande maturité et de l’autonomie… mais aussi l’envie de s’expatrier. « Or on constate que beaucoup de candidats qui postulent font machine arrière lorsqu’ils se rendent compte de ce que cela implique », déplore Ivan Lebeau.
Gaëlle Ginibrière
Selectra tourne avec un volant d’une douzaine de V.I.E.
Ce ne sont pas moins de 12 V.I.E. que le comparateur de fournisseurs d’électricité et de gaz Selectra (500 employés dans le monde) compte parmi ses 300 collaborateurs travaillant en Espagne. « Trois autres devraient nous rejoindre dans les prochains mois », explique Laura Chérubin, chargée de recrutement. Un engagement qui lui a valu de recevoir le Prix V.I.E. 2017 de la PME de croissance, remis par le Medef, Business France et les CCE.
La société recherche deux principaux profils, qui se répartissent quasi également : des ingénieurs informatiques et développeurs Web pour faire du code sur le site Web et l’appli de l’entreprise, et des Web marketeurs, chargés d’écrire des articles, de faire de l’acquisition Web ou du référencement sur Google. « À travers le V.I.E., nous attirons des candidats qui présentent un bon parcours académique, généralement issus d’écoles d’ingénieurs ou de management. Mais nous sommes également attentifs à ce que leur état d’esprit corresponde à nos valeurs : des gens passionnés par leur travail, et qui font preuve de rigueur », poursuit Laura Chérubin.
Les missions – qui durent de 18 à 24 mois – peuvent évoluer au gré des compétences et des appétences des jeunes volontaires, et il n’est pas rare qu’elles débouchent sur une proposition de recrutement lorsque la personne a donné satisfaction.
Témoignage : Gwendoline Jehannin, Volontaire au Mexique
Une année universitaire en Écosse de césure, un Master in international management 100 % en anglais suivi d’un double diplôme de MBA en marketing en Colombie, des stages au Mexique et à Barcelone… Gwendoline Jehannin s’est donné les moyens dès sa formation à l’EM Normandie de démarrer une carrière professionnelle à l’international. « C’est d’ailleurs pour cela que j’avais choisi cette école après le bac : c’était la seule à l’époque à proposer de partir un an plutôt que deux fois 6 mois », explique la jeune fille de 25 ans. C’est donc assez naturellement qu’elle s’est intéressée au V.I.E. à l’issue de son cursus. « Je cherchais une mission en gestion de projet et en marketing, dans un pays en voie de développement. Je savais qu’à l’étranger, on me confierait des responsabilités que je ne pourrais pas avoir en France en tant que jeune diplômée », poursuit-elle. De fait, elle est missionnée par ViaDirect, une société qui propose des bornes interactives d’information à la fois comme chef de projet et consultante avant-vente pour développer la filiale mexicaine avec un autre volontaire et un ancien V.I.E fraîchement recruté. Un challenge qu’elle accepte avec enthousiasme. « C’est une expérience qui m’a fait beaucoup grandir », témoigne-t-elle. Sa mission s’achève en novembre prochain, et elle souhaiterait pouvoir intégrer définitivement l’entreprise.
Le V.I.E mode d’emploi
Voici une petite fiche pratique extraite du Guide 2018 de l’accompagnement à l’export du Moci*.
Guichet : Business France
Description : ce dispositif permet de recruter un jeune de 18 à 28 ans, homme ou femme, de profil varié, pour lui confier une mission à l’étranger : étude de marché, prospection, renforcement d’équipes locales, accompagnement d’un contrat, d’un chantier, participation à la création d’une structure locale, animation d’un réseau de distribution, support technique d’un agent, etc.
Recrutement : Business France fournit une assistance au recrutement, incluant la présélection de profils en fonction des besoins de l’entreprise. Elle a aussi mis en place une base de données des candidats, Civiweb, permettant aux entreprises de trouver plus facilement les profils recherchés.
Durée de la mission : de 6 à 24 mois, renouvelable une fois dans cette limite.
Organisation de la mission : un V.I.E peut passer jusqu’à 165 jours par an en France par année de mission, mais l’entreprise s’engage à affecter son candidat à l’étranger. L’entreprise peut également couvrir jusqu’à huit pays avec un même volontaire, grâce au V.I.E régional.
Mesures d’incitation : afin d’encourager les PME et TPE à utiliser la formule, le dispositif s’adapte régulièrement grâce à de nouvelles mesures.
Voici les dernières mises en avant par Business France :
• le portage par des grands groupes ou des possibilités d’hébergement au sein de ses bureaux, les chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger (CCIFE), solutions qui peuvent aller du simple hébergement au suivi du V.I.E durant sa mission ; des sociétés privées d’accompagnement à l’international proposent également ce service ;
• le parrainage du V.I.E par les conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) en France et dans son pays de mission ;
• la formule du V.I.E à temps partagé, qui permet de bénéficier d’un V.I.E tout en partageant ses services et son coût avec d’autres entreprises, au sein d’une même filière professionnelle ou d’une même région ; il suffit que les entreprises aient un projet de développement dans un pays commun et qu’elles désignent l’une d’elles comme chef de file et interlocuteur de Business France pour les aspects juridiques et financiers (voir encadré sur l’Imed).
• des organismes fédérateurs, par ailleurs, proposent aux PME de se regrouper autour d’un V.I.E à temps partagé en favorisant le rapprochement d’entreprises ayant un projet sur la même destination.
Dépenses à la charge de l’entreprise : frais de voyage aller et retour et de transport de bagage ; indemnité forfaitaire mensuelle variable selon les pays (entre 1 400 et 5 000 euros) ; frais de gestion des dossiers (protection sociale incluse) ; dépenses opérationnelles liées à la mission confiée.
Contacts
• Pour les entreprises : n° Azur : 0810 659 659 ; [email protected]
• Pour les jeunes : n° Azur : 0810 101 828 ; [email protected]
*France/Europe Guide 2018 de l’accompagnement à l’export pour les PME et ETI, 1ère édition. Moci n° 2053, avril 2018. Disponible sur www.lemoci.com.