Alors que les accords de libre-échange ne cessent de se multiplier, le Forum du Moci, du 14 juin dernier, consacré à ce thème, a débuté par une triple analyse. Ce sont successivement un cabinet de recherche économique, un assureur-crédit, et une déléguée du Parlement européen qui ont livré leur analyse.
Pour Thierry Apoteker, fondateur et directeur de Thierry Apoteker Consultats (TAC) «quasiment aucune région dans le monde échappe au phénomène des zones de libre-échange. Nous avons recensé 300 accords commerciaux régionaux en vigueur ou en négociation». Elles ont toutes pour point commun de s’être constituées selon le même modèle : «elles sont quasiment toutes structurées autour d’un pays important». Une autre caractéristique est la tendance naturelle à travailler plus facilement vers les marchés proches : «Ainsi, l’Union européenne réalise les deux tiers de ses échanges avec sa zone étendue aux pays voisins de l’Est du continent européen.
De même, les dix pays de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud Est) effectuent plus de la moitié de leur commerce entre eux et avec le reste de l’Asie». Du point de vue des entreprises étrangères, Thierry Apotheker met pourtant en garde : «ces rapprochements ne sont utiles que s’ils présentent un avantage concurrentiel et sont gagnant-gagnant si on travaille avec un partenaire local. Or, il arrive que les règlementations ultérieures, comme les règles d’origine, ou des interdictions douanières, fassent perdre tout intérêt à une zone de libre-échange».
Ludovic Subran, chef économiste de l’assureur crédit Euler Hermes prône la même prudence : «mieux vaut ne pas baser une stratégie commerciale ou d’implantation sur un accord de libre-échange qui semble avantageux. En effet, à tout moment, en cas de crise par exemple, un pays peut mettre des barrières rédhibitoires. Le cas tout récent de l’Argentine est là pour le rappeler». Qui plus est, au sein d’une même zone, des pays peuvent poursuivre des buts différents. Certaines zones, surtout en Afrique et en Amérique latine, ne doivent pas être vues comme des «accélératrices de commerce». Selon Ludovic Subran, la bonne approche est celle qui privilégie «les échanges avec le pays principal pour ensuite s’intéresser aux pays plus petits. Il faut également considérer une zone de libre échange comme un relais, mais pas comme une moyen facilitant l’ancrage».
De son côté, Maria Joao Podgorny, conseiller du président de la commission «Commerce international» au Parlement européen, a rappelé que «pour les pays de l’Union européenne, seule la Commission est habilitée à conclure des accords de libre-échange». Elle a surtout insisté sur le fait que, depuis 2009, le Parlement européen a un rôle élargi en matière de politique commerciale, qui est symbolisé par son droit de véto, ce qui permet aux opérateurs économiques de mettre en avant leurs intérêts ou de faire part de leurs préoccupations auprès des membres du Parlement. Par ailleurs, les nouveaux accords iront bien au-delà du simple libre-échange. Maria Joao Pordgorny, a indiqué qu’ils porteront aussi sur :«l’accès aux marchés publics, la suppression des obstacles non tarifaires, la création de règles communes en matière de standards techniques et sanitaires, et sur la protection renforcée des droits de la propriété intellectuelle».
Jean-François Tournoud
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