Concurrent de l’aérien, le rail opère sans fil, mais en toute sécurité. En effet, le wifi lui donne un avantage à bord incontestable. Les opérateurs imaginent ainsi de nouveaux services et investissent dans les nouvelles technologies.
Le 28 mai dernier, Eurostar a lancé son nouveau train e320 vers Bruxelles. En quelque sorte « une mise en jambes » avant le lancement de la nouvelle liaison directe Londres-Amsterdam et Rotterdam, prévu fin 2017 par la compagnie européenne entre les sociétés nationales des chemins de fer français (SNCF) et belge (SNCB) et la London and Continental Railways (LCR).
Plus que le train en lui-même – design de la maison italienne Pininfarina, capacité accrue de 20 % par rapport aux Eurostar d’origine – ce qu’en retiendra le voyageur d’affaires est la somme de services sophistiqués, empruntant largement au monde numérique. En effet, l’e320 offre une connexion wifi et 300 heures de films, séries, documentaires, jeux et d’informations disponibles sur ordinateur, téléphone ou tablette.
Eurostar fait ainsi le pari du wifi et du divertissement. Mais à vrai dire aujourd’hui, la liaison sans fil est une ardente obligation pour tous les opérateurs ferroviaires. C’est vrai pour la SNCF en France et à l’étranger, pour Eurostar également comme pour Thalys, la compagnie franco-belge (SNCF-SNCB) qui dessert la France, la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne. « Avec le wifi à bord, les professionnels choisissent le train plutôt que l’avion et, où on a mis le wifi, les voyageurs pros quittent l’avion », assure Fabien Soulet, directeur des Grandes entreprises et agences de voyages, Voyages SNCF. « Nos voyageurs d’affaires travaillent à bord et environ 90 % des travel managers du secteur privé considèrent que le train est meilleur en termes de productivité que l’avion », renchérit Bernard Fontenelle, Head of sales chez Thalys.
Premier opérateur ferroviaire européen à se lancer dans le wifi en 2007, la compagnie franco-belge, qui a conclu également un accord de coopération avec les chemins de fer néerlandais, creuse son sillon, en investissant toujours plus dans la technologie. Il y a près de dix ans, le sans fil était rendu possible par un réseau satellitaire. « Pour autant, la stabilité de la liaison n’était pas optimale, notamment aux Pays-Bas, où le train passe sous plusieurs tunnels », raconte Bernard Fontenelle. Un trou dans la raquette de l’hyper connectivité que Thalys s’est depuis efforcé de combler.
C’est ainsi qu’en mai 2016 a été signé un partenariat avec Icomera, une société suédoise qui a installé une solution sol-bord entièrement cellulaire, permettant aux flux des réseaux 3G/4G d’être convertis en signal wifi dans les trains. Un investissement rentable au regard de l’évolution des usages. Alors qu’ils n’étaient en 2014 que 44 % des professionnels à utiliser le wifi dans le train et 52 % avec un contrat d’entreprise, aujourd’hui, ces deux chiffres sont montés à 70 %. Quand on leur demande de quels outils ils sont dotés, il n’y a pas de réelle surprise : 80 % possèdent un smartphone, 70 % un ordinateur, mais seulement 20 % ont une tablette à bord.
Si les services à bord sont essentiels et clivants par rapport à la concurrence du transport aérien, les opérateurs ferroviaires, comme la SNCF, ne perdent pas de vue non plus le confort à quai du voyageur d’affaires. Avec l’application TGVPro à télécharger sur les téléphones, les voyageurs d’affaires français et étrangers accèdent à toute une série d’informations : horaire et numéro du quai de départ, échange de billet, réservation de taxi… Mais aussi le système de notifications et guidage Beacon permet d’orienter le voyageur d’affaires en fonction de son billet et de l’heure de son départ – dès son arrivée en gare, les iBeacons, qui sont des émetteurs de signaux Bluetooth géolocalisent automatiquement le passager pour l’accompagner ensuite vers le quai ou vers un salon de repos. TGVPro est prolongé à bord par un service original d’assistant de voyage, Anatol, avec lequel il est possible de dialoguer soit par SMS, soit à travers le portail TGV Connect, un site web qui offre des connexions wifi pour visualiser le trajet ou obtenir des services (taxis, restaurants…).
En février dernier, Eurostar a inauguré un salon Business Premier à la gare du Nord, équipé d’un accès gratuit au wifi, de prises USB et de chargeurs sans fil. Un espace propice au travail et aux rencontres professionnelles, mais aussi mixant plaisirs de la table (bar à cocktails, restauration) et culture (œuvres d’art contemporain). Les opérateurs ferroviaires ne sont jamais en panne pour améliorer la vie de leurs clients. Par exemple, Thalys propose l’application Ticketless, qui permet au passager de retrouver directement son billet sur son smartphone, sans avoir à l’imprimer. De même, les membres du programme ThalysTheCard peuvent télécharger l’application e-Presse&More sur leur smartphone ou tablette. Ces clients Platinium ou Platinium + peuvent ainsi choisir librement deux titres de leur choix parmi les quotidiens, magazines et bandes dessinées disponibles, en sus de la presse papier déjà présente à bord.
Les opérateurs ferroviaires sont dans l’obligation d’inventer constamment pour répondre à la demande toujours croissante de leurs clients et se démarquer. D’après Thalys, le temps de connexion moyen pour des trajets variant entre 1 h 22 (Paris-Bruxelles) et 4 heures (Paris-Düsseldorf-Essen-Dortmund) et la consommation moyenne par appareil s’élève à 70 Mégaoctets. Pas de quoi inquiéter la compagnie franco-belge, puisque la capacité disponible sur les Thalys tourne autour de 100 Mo. Pour autant, « on s’attend à ce que les exigences des voyageurs augmentent, confie Bertrand Fontenelle. On veut toujours que ça fonctionne plus rapidement ». De fait, s’il y a encore deux ans, la 3G dominait l’offre de réseaux des opérateurs mobiles, aujourd’hui, elle a cédé la place à la 4G. Mieux encore, on parle déjà de nouvelles générations de standards pour la téléphonie mobile. Bienvenue à la 4,5G et la 5G !
François Pargny