La « petite Chine » se réveille

Bac Ninh à 40 kilomètres au nord de Hanoi, capitale du Vietnam. « Il y a dix ans, il n’y avait que des rizières », sourit Lam Nguyen, responsable RH du français Air Liquide au Vietnam, qui a installé ici une usine de production de gaz. Aujourd’hui, exit les rizières. Bac Ninh est désormais l’une des plus grandes zones économiques du pays. 

En quelques années, de grands noms de l’industrie y ont installé leur QG ou leurs unités de production. On y croise Samsung Electronics (9 600 employés, la plus grande usine au monde du fabricant coréen), Canon (8 500 personnes) mais aussi le taïwanais Foxconn (5 600 ouvriers), premier fabricant mondial de produits électroniques… 

Le Vietnam, véritable moteur de la zone Asean (Association des nations d’Asie du Sud-Est) est, à en croire un investisseur de Ho Chi Minh-Ville (ex-Saigon, au sud) « une petite Chine ». « Le pays affiche depuis dix ans un taux de croissance annuel qui oscille entre 5 et 7 % (6,8 % en 2010) ! » Les investissements directs étrangers (1) représentent aujourd’hui plus de 30 % des investissements globaux. Les secteurs privilégiés en 2010 ont été ceux de l’industrie (4 milliards de dollars pour 385 projets) et des services d’utilité publique (6 projets dans les secteurs électricité, gaz et eau pour 3 milliards de dollars). « Géographiquement, le sud du pays accueille près des deux tiers des IDE », note un récent rapport du Service économique de l’ambassade de France à Hanoi. « La raison tient non seulement au dynamisme traditionnel de cette partie du Vietnam, mais aussi aux conditions d’accueil privilégiées et à la qualité des services et infrastructures des zones et parcs industriels de la région. Le nord du Vietnam accueille un quart des IDE. »

Chiffres clés
• Exportations françaises au Vietnam : 674 millions d’euros en 2010 (+ 24,2 % par rapport à 2009) dont
– matériel de transport : 232 millions d’euros,
– produits pharmaceutiques : 114 millions d’euros
– produits agroalimentaires : 64 millions d’euros
• Importations françaises : plus de 1,4 milliard d’euros en 2010 (+ 18,4 % en un an) dont
– textile-habillement, cuir et chaussures : 735 millions d’euros
• Investissements français : 3 milliards de dollars fin 2010 (la France est le 15e investisseur en stock – 1er européen ; et 5e bailleur de fonds)
• 250 filiales d’entreprises françaises présentes
• 24 000 emplois générés par la présence française (deux tiers sur Ho Chi Minh-Ville et sa région, un tiers sur Hanoi et environs)
Source : Ubifrance

La France n’est pas en reste. Les échanges bilatéraux ont en effet augmenté de 20 % en 2010, le premier poste d’exportations étant les matériels aéronautiques. Suivent, indique le même rapport, « les produits pharmaceutiques, en progression de 10 % (115 millions d’euros), qui témoignent du dynamisme des entreprises françaises du secteur implantées localement ». Quelles sont les opportunités à saisir ? « Elles sont immenses », confie depuis Hanoi Marc Cagnard, directeur d’Ubifrance, rappelant que l’un des axes du dernier Congrès du Parti communiste vietnamien est de faire du pays, avant 2020, « un grand pays industrialisé » 
(voir « Trois questions à » aricle suivant ). 

De nombreux observateurs notent ainsi une volonté de faire monter en valeur ajoutée les industries traditionnelles et de créer rapidement des filières entières dans les industries intermédiaires (qui n’existent pas aujourd’hui). Autant de secteurs sur lesquels les « Français peuvent se positionner », note Marc Cagnard. Mais il ne faut pas tarder, car les choses vont vite, très vite. . « Le marché se développe, la main-d’œuvre se qualifie et les salaires sont encore faibles », explique un entrepreneur européen à Ho Chi Minh-Ville. « Mais dans dix ans, ce sera différent… ». À bon entendeur.

Pierre Tiessen

(1) Les premiers investisseurs du pays sont, dans l’ordre, Singapour (4,5 milliards de 
dollars en 2010), la Corée du Sud (2,5 milliards de dollars) et le Japon (2,4 milliards de dollars). 
Source : DG Trésor.