Le président Macky Sall a fixé comme objectifs principaux de parvenir à l’autosuffisance alimentaire, notamment dans le riz, et de redynamiser la filière de l’arachide. Parallèlement, la diversification des cultures et la mécanisation doivent être poursuivies.
« Nous voulons produire plus et mieux pour atteindre l’autosuffisance alimentaire et pour exporter », affirmait, le 25 février à la CCI Paris Ile-de-France, le président du Sénégal Macky Sall, devant un parterre de dirigeants français, qu’il a assuré de sa volonté de « moderniser et de réorganiser » l’agriculture en encourageant la mécanisation et en réformant le système foncier. Une ambition qui, sur le papier, semble à porter de la main.
« Les terres arables ne manquent pas (3,8 millions d’hectares), pas plus que l’eau (35 milliards de m3), et le Sénégal dispose au total de 350 000 hectares (ha), dont seulement 130 000 sont développés à ce jour », selon Ibrahima Wade, le directeur de la Stratégie de croissance accélérée (SCA), une initiative du gouvernement visant notamment à améliorer l’environnement des affaires et à développer des grappes sectorielles à fort potentiel, comme l’agriculture, les produits de la mer ou l’aquaculture. Parmi les priorités, figurent ainsi l’autosuffisance en matière de riz – le Sénégal importe bon an mal an un million de tonnes de ce produit – et la revitalisation de la filière de l’arachide.
À la CCI Paris Ile-de-France, Jean-Christophe Saulay, directeur général des Grands Domaines du Sénégal (GDS), une filiale de la Compagnie fruitière à Saint-Louis, rappelait qu’en l’espace de dix ans, « la filière horticole s’était diversifiée à partir du seul haricot au départ ». Melons, pastèques ou poivrons sont aujourd’hui produits sur place et le Sénégal veut encore étendre son offre dans les oléagineux, les céréales, l’oignon, la noix de cajou, le sésame ou encore les fleurs coupées et le feuillage décoratif. Parmi ces produits, les légumes et les fruits de contre-saison posséderaient un potentiel d’exportation vers l’Europe évalué à 157 500 tonnes à l’horizon 2017, ce qui correspondrait grosso modo à une hausse de 10 % par an. Première société de maraîchage à s’implanter au Sénégal en 2003, la filiale de la Compagnie fruitière s’est elle-même diversifiée. Spécialiste de la tomate cerise, qui demeure son produit vedette (10 000 tonnes par an), elle exporte aujourd’hui notamment du maïs doux (1 500 tonnes). En dix ans, 30 millions d’euros ont été investis. « Le climat est favorable, les terres, l’eau sont disponibles, la main-d’œuvre est bien formée, l’Europe est proche et le statut d’entreprise franche d’exportation (EFE) offre un cadre juridique adapté », expose Jean-Christophe Saulay, qui dirige aujourd’hui une entreprise de 300 permanents, auxquels s’ajoutent, selon les périodes, 1 200 saisonniers et 800 journaliers, avec un chiffre d’affaires de 19 millions d’euros en 2013. Comme GDS, le groupe Sedima de l’homme d’affaires Babacar Ngom s’est diversifié dans la filière et en dehors (immobilier). « Parti avec 100 euros en 1976, j’ai bientôt acheté 120 poussins et maintenant je suis le leader dans la sous-région dans la production de volaille, disposant d’un cheptel de 1 million de poules pondeuses », raconte l’entrepreneur sénégalais, qui vient également d’investir dans une minoterie d’une centaine d’emplois à Rufisque et prévoit d’y accueillir aussi une usine d’aliments de bétail.
« Dans l’horticulture comme l’élevage et les productions animales, les opportunités d’affaires sont immenses », avance Ibrahima Wade, qui cite « l’aménagement des terres, la production et la commercialisation d’aliments, la vente de matériel agricole, les services logistiques, le bétail et la transformation de viande, le cuir et les peaux, le lait et ses dérivés et toujours l’aviculture ».
Valoriser et transformer les produits de la mer
Un mois après le voyage du président sénégalais Macky Sall, les 24 et 25 février à Paris, Ibrahima Wade, le directeur de la Stratégie de croissance accélérée (SCA), se trouvait dans la capitale française où il pouvait se féliciter du « partenariat gagnant-gagnant » noué avec Corsair, portant sur l’ouverture de la ligne de fret à l’aéroport d’Orly pour les produits de mer frais sénégalais, le week-end. Selon lui, le Sénégal souffre encore de « l’insuffisance de la chaîne logistique d’exportation ». Mais l’enjeu principal pour le Sénégal serait tout autre : valoriser une ressource, dont la transformation demeure faible (inférieure à 10 %). Et, parallèlement, développer l’aquaculture. Des zones auraient été définies vers Saint-Louis, Petite Côte, en Casamance ou dans la région du Sine-Saloum. Et un premier projet serait soutenu par la Banque nationale de développement économique (BNDE), établissement lancé officiellement au début de l’année pour financer l’activité des PME.
François Pargny