1 • S’informer avant le voyage
C’est un point essentiel trop souvent négligé par tous ceux qui envisagent un déplacement à l’étranger. Tous les experts contactés pour ce dossier le soulignent : il est primordial de s’intéresser au pays où l’on doit se rendre pour adopter le comportement adéquat. À commencer par les mœurs et coutumes, par exemple, en Algérie, Erys Group conseille dans son livret d’accueil à destination des personnels expatriés ou en déplacement dans ce pays, « d’éviter d’avoir des revues politiques présentant des thèses hostiles au régime en place, les discussions d’ordre politique sur des sujets de controverse (droits de l’homme, personnalités influentes et leaders politiques locaux, liberté de la presse) et d’ordre religieux ainsi que toute remarque pouvant être perçue comme une insulte pour le pays (colonisation, guerre d’indépendance, harkis) » (voir l’encadré Algérie, mode d’emploi). Il est également indispensable de se renseigner sur les risques et les dangers encourus dans le pays ainsi que sur l’actualité locale. Pour cela, consultez les fiches « Conseils aux voyageurs » du ministère des Affaires étrangères (voir notre chapitre précédent). En cas de voyage dans les pays à risque : s’inscrire préalablement sur le fil Ariane du ministère des Affaires étrangères, signaler son déplacement à l’ambassade ou au consulat et convenir d’un contact à intervalle régulier en France. En outre, ajoute Frédéric Bedouet de Control Risks, renseignez-vous sur votre partenaire potentiel et les risques de corruption.
2 • Faire une check-list des formalités
Le passeport Sécurité des voyageurs du CDSE* dresse une liste des précautions administratives à prendre avant de partir : obtenir une autorisation de déplacement de son organisme si elle est nécessaire, mettre en lieu sûr des copies de vos pièces d’identité (par exemple sur le site mon.service.public.fr, un portail internet gratuit et confidentiel permettant de créer facilement un espace de stockage accessible 24h/24), avoir son passeport et son visa à jour, les assurances et l’assistance, posséder les numéros de téléphone du consulat, de votre assistance, et de vos contacts locaux et de les conserver en permanence sur vous. Il est important de se renseigner également sur les formalités douanières du pays afin de connaître les modalités d’entrée des marchandises et de matériels sur le territoire tiers (hors UE) : déclaration préalable, normes, sécurité sanitaire. Et n’oubliez pas de déclarer la marchandise dès l’arrivée dans le pays tiers auprès des autorités douanières compétentes (visa du carnet ATA par exemple).
3 • Prendre des précautions de santé
Là aussi ces précautions élémentaires à prendre avant tout déplacement à l’étranger sont trop souvent oubliées. Avez-vous fait tous les vaccins indispensables à votre voyage ? Avez-vous pris dans vos bagages votre traitement médical, possédez-vous une copie des ordonnances (celle-ci est nécessaire afin de justifier la possession de produits parfois interdits dans certains pays) ? Vous êtes-vous muni d’un document informant, si nécessaire, de votre état de santé ? Vous êtes-vous muni de votre carte de groupe sanguin ? Enfin n’oubliez pas de consulter le site « Conseil aux voyageurs » qui donne des alertes dans le domaine de la santé. Des alertes ont été ainsi lancées fin 2014 concernant le virus d’Ebola qui sévit en Guinée Conakry, au Liberia et en Sierra Leone (voir notre partie 1 avec les conseils de SOS International aux voyageurs d’affaires) et l’épidémie de chikungunya qui s’étend dans les Antilles.
4 • Organiser son déplacement
Il est préférable lorsque vous arrivez dans un pays à risque de vous faire réceptionner par un chauffeur réservé au préalable et de choisir un établissement hôtelier sécurisé recommandé par le ministère des Affaires étrangères (voir liste par pays sur le site « Conseils aux voyageurs »). Toutes les sociétés privées de sûreté proposent des services de sécurisation des déplacements comportant une prise en charge dès l’aéroport, l’organisation des déplacements (voiture avec chauffeur local, réservation d’hôtels, prise de rendez-vous, etc.). Pour les séjours de moyenne à longue durée, des services sont proposés pour trouver des logements sécurisés pour le personnel expatrié, protéger les locaux professionnels, élaborer un plan d’évacuation, assurer un plan de continuité des activités en cas de crise.
5 • Être prudent dans ses communications
Cette règle paraît élémentaire, mais dans les faits la prudence est souvent oubliée dans les communications. Il faut laisser en France les documents qui ne sont pas indispensables à votre mission et dont le vol, la consultation ou la confiscation pourrait porter préjudice à vos activités. Pour votre ordinateur portable, désactivez les ports USB depuis le panneau de configuration. En cas de sensibilité particulière du déplacement, prévoir un ordinateur portable et un téléphone dédiés. Il est nécessaire de surveiller en permanence ses documents et ses moyens nomades de communication et de les conserver avec soi. Enfin, gardez à l’esprit que les conversations au téléphone ou par internet peuvent être interceptées (WiFi des hôtels, etc.). Et ne considérez pas le coffre-fort de votre hôtel comme un lieu sûr pour stocker des informations sensibles.
6 • Utiliser ses appareils nomades de façon sécurisée
Si les appareils nomades (ordinateurs portables, smartphones, tablettes, lecteurs MP3) sont utiles, leur usage expose le voyageur d’affaires à des risques nouveaux de perte ou de captation d’informations stratégiques qu’il est nécessaire de bien maîtriser en prenant certaines précautions élémentaires, signale une fiche pratique de la D2IE*. Parmi celles-ci : désactiver la connexion automatique des appareils nomades aux points d’accès WiFi ouverts ; en plus du code PIN protégeant la carte téléphonique, utiliser un mot de passe pour sécuriser l’accès à son appareil nomade et le configurer pour qu’il se verrouille automatiquement après un court moment d’inactivité ; activer le chiffrement des supports de stockage lorsque cela est possible. Autre précaution importante : n’installer que les applications nécessaires et vérifier à quelles données elles permettent l’accès avant de les télécharger sur l’appareil nomade (informations géographiques, contacts, appels téléphoniques, etc.). Enfin, il faut effectuer des sauvegardes régulières des contenus sur un support externe pour pouvoir les conserver en cas de restauration de l’appareil dans son état initial.
7 • Adopter un comportement adéquat
Là aussi des règles élémentaires de bon sens doivent être appliquées. Il s’agit de rester vigilant dans ses relations et son comportement et d’adopter une attitude conforme aux règles du pays. Il faut ainsi éviter les sollicitations impromptues demandées à titre amical ainsi que les excès de toute nature susceptibles d’être utilisés à son encontre. Ne vous exposez pas non plus à tout ce qui pourrait relever de la provocation, y compris de vos partenaires, dans le cas d’une demande sortant du cadre officiel. Évitez également les signes d’appartenance ou d’identification à un établissement ou à une organisation. Ne divulguez pas le nom de votre société, votre nationalité, votre métier… D’une manière générale, évitez d’attirer l’attention de par vos tenues, vos bijoux, des signes religieux, etc. Restez discret dans les lieux publics : évitez les conversations sensibles ou confidentielles dans les chambres d’hôtels, chez un particulier ou au restaurant. Dans les débits de boisson, surveillez votre verre. Restez lucide sur les rencontres locales. Évitez les habitudes de lieux et d’horaires en variant vos déplacements. Dans les salons internationaux, maîtrisez l’information à diffuser, méfiez-vous des faux clients et des sollicitations multiples (consultez la fiche pratique de la D2IE « Participer à un salon professionnel »). Enfin, prenez systématiquement les cartes de visite et les coordonnées de vos interlocuteurs.
8 • Sécuriser ses relations commerciales
Des précautions doivent être prises lors de l’établissement de relations commerciales avec des partenaires extérieurs (financeurs, clients, fournisseurs, prestataires), signale une fiche pratique de la D2IE. Parmi celles-ci : prévoir dans les contrats des clauses expresses relatives aux échanges d’information et de confidentialité, au non-débauchage de personnel, au respect des législations applicables, à la non-concurrence et à l’obligation de signaler toute relation nouvelle avec un concurrent, aux pénalités en cas de rupture d’approvisionnement, de non-respect des délais de livraison et de défaut de qualité, etc. Autres précautions : demander une confirmation écrite pour tout acte engageant votre société et ses partenaires. Confirmer chaque échange ou entrevue par un courriel, un reçu ou un fax à l’en-tête de l’établissement. Ne jamais traiter avec des subordonnés du partenaire ou du prestataire sans avoir vérifié leur mandat. Veiller à ce que tous les exemplaires « originaux » des contrats soient numérotés, signés et paraphés. Limiter le nombre de personnes impliquées dans de nouveaux projets en externe comme en interne tant que les clauses de confidentialités ne sont pas signées. Enfin, utilisez des salles de réunion plutôt que des bureaux pour les échanges ou séances de travail avec des clients, partenaires et/ou fournisseurs.
9 • Bien identifier les informations stratégiques à protéger
Que l’on soit expatrié ou en déplacement professionnel, il est important de bien savoir quelle est l’information stratégique que l’on ne doit pas divulguer à l’extérieur. Une fiche pratique de la D2IE explique comment l’identifier. Pour cela, un auto-diagnostic en deux étapes est proposé : analyser dans un premier temps le préjudice causé par la divulgation de l’information (dommage pour l’activité de la structure ou le déroulement d’un projet, impact financier ou technique, impact sur le personnel, incidences sur la confiance des actionnaires ou des banques, perte de confiance d’un partenaire ou client important). Puis, si les impacts sont considérés comme forts et que l’information est donc qualifiée comme stratégique, il faut définir le degré d’exposition aux risques de fuite. Là aussi, il suffit de répondre à quelques questions comme le nombre de personnes ayant accès à cette information (entourage restreint autour du PDG ou une grande partie du personnel) ou sa durée de vie (de quelques heures pour une conférence de presse à plusieurs années pour un secret de fabrication) pour savoir le moyen le plus adapté à utiliser pour protéger cette information. Il s’agit ensuite de définir en fonction du support et de la vie opérationnelle de l’information les moyens les plus adaptés de protection et d’échange : meuble ou pièce sécurisée, conditions de stockage, chiffrement des données, codes d’accès, utilisation d’une plateforme d’échanges sécurisés, clause spécifique dans les contrats de travail, etc. Enfin, il ne faut pas oublier d’organiser la gestion des informations stratégiques tout au long de leur vie : qualification/déqualification, diffusion, reproduction, conservation, destruction.
10 • Debriefing après le séjour
De retour en France, quelques règles pratiques sont à respecter comme ne pas utiliser les supports informatiques remis lors de votre voyage (clés USB) avant de les avoir fait minutieusement analyser ou rendre compte de tout problème rencontré ou de tout fait qui aura suscité votre étonnement. En outre, il est recommandé d’organiser des échanges de bonnes pratiques avec des collègues ou des confrères sur le déplacement dans le pays. Autre précaution : conserver les documents prouvant que la marchandise transportée n’a pas été acquise dans un pays tiers (carnet ATA ou déclaration d’exportation temporaire sous conditions) afin de ne pas se voir réclamer le paiement de droits de douane éventuels ou de la TVA. Après la participation à un salon professionnel, des précautions sont à prendre : faire place nette sur le stand après la clôture et vérifier l’ensemble des matériels et des documents ; faire un débriefing et rédiger un rapport d’étonnement relatant tout problème ou événement inattendu survenu lors du salon ; exploiter les cartes de visite des « démarcheurs » en se demandant s’ils sont des clients ou des concurrents potentiels et enfin établir un bilan de l’activité en suivant les commentaires au sein de la profession et des médias.
Isabelle Verdier
* Passeport du CDSE : www.cdse.fr/passeport-securite-des-voyageurs.html
* Fiches pratiques de la D2IE : www.intelligence-economique.gouv.fr/methodes-et-outils/la-securite-economique-au-quotidien
Algérie, mode d’emploi
Erys Group a établi un livret d’accueil à destination des personnels expatriés ou en déplacement en Algérie dont nous reproduisons certains des conseils pratiques s’appliquant spécifiquement à ce pays. Concernant votre passeport, la préfecture de votre domicile peut vous octroyer un nouveau passeport si le vôtre comporte des visas et des tampons incompatibles avec l’Algérie (Israël…). Attention à bien le ranger dans une poche fermée car les passeports se volent et se revendent bien au marché noir.
Un visa délivré par le consulat de votre domicile est indispensable pour entrer en Algérie : il faut tenir compte des délais d’obtention qui peuvent être de plusieurs jours. Les cartes de crédit sont très peu usitées en Algérie, vous pourrez les utiliser essentiellement dans les grands hôtels, dans certains restaurants habituellement fréquentés par la clientèle étrangère, ainsi que pour l’achat de billets d’avion dans les agences Air Algérie et Air France de l’aéroport. Il est recommandé de voyager avec une somme d’argent en espèces (en euros) suffisante pour faire face aux frais quotidiens (consommations, restaurants, achats divers).
Dès votre arrivée à l’aéroport, il est obligatoire de déclarer aux services des douanes algériennes les devises importées. Pour votre santé, il est conseillé de prévoir une quantité suffisante de médicaments afin d’anticiper toutes les difficultés à se les procurer en Algérie. Lors de votre arrivée, il est préférable que vous soyez attendu par votre chauffeur ou celui de votre entreprise. En cas d’absence, restez dans l’aérogare et téléphonez à votre contact local (secrétariat, responsable de sécurité, etc.). Lors de vos déplacements, verrouillez les portières, roulez les vitres fermées, faites le plein dès que le réservoir est à moitié vide. Ne vous déplacez pas de nuit hors du grand Alger (Alger et communes mitoyennes), n’empruntez que des artères principales du centre-ville quadrillées par de nombreux check point de police. Ne répondez pas aux gestes ou comportements agressifs.
Attention aux faux accidents ou accrochages qui sont régulièrement utilisés pour stopper les véhicules et agresser les occupants. Enfin, s’agissant des règles de comportement, Erys Group met l’accent sur des règles de bons sens (ne pas agir sans réfléchir, ne pas sortir seul, ne pas aller dans une zone à risques, la Casbah par exemple, par bravade et/ou envie de transgresser les règles et les interdits, toujours prévenir quelqu’un de ses déplacements, de ses horaires et de son itinéraire, toujours être porteur d’un moyen de transmission et d’une fiche avec les numéros de téléphone et adresses utiles). Il est également essentiel d’être tolérant vis-à-vis de la religion et des cultures du pays et d’accepter les différences de croyances, de pensées et de relations à la famille, au travail, au temps et à Dieu. « La prise en compte des pratiques religieuses liées à l’islam (prières, pèlerinage et surtout le ramadan) est impérative pour de bonnes relations à la fois dans le travail et en dehors », conclut Erys Group.