Sixième plus vaste surface agricole utile au monde, le Kazakhstan est un grand pays agricole avec un fort potentiel de développement, notamment dans l’agroalimentaire. Il consacre d’importants efforts d’investissement dans différentes filières.
Le Kazakhstan n’est pas l’immense désert infertile que l’on pourrait imaginer depuis l’Europe de l’Ouest. Loin s’en faut. Certes, le sud du pays a un climat semi-désertique voir désertique, mais le Nord correspond à une zone de « terres noires » (le fameux tchernoziom) particulièrement fertiles. Malgré une pluviométrie globalement insuffisante (il pleut entre 150 et 320 mm par an dans les zones de cultures) et un climat très rigoureux avec des hivers longs et glaciaux, des étés caniculaires et courts, et pratiquement pas d’intersaisons, les terres arables occupent 29,4 millions d’hectares (contre 18,3 en France, à titre de comparaison).
Le Kazakhstan est doté de la 6e plus vaste surface agricole utile au monde. Avec 1,5 ha/habitant, le pays arrive au deuxième rang mondial derrière l’Australie en termes de disponibilité de terre arable par habitant. Malgré l’exode rural, 42 % de la population vivent encore en zone rurale et un habitant sur cinq travaille dans le domaine agricole ou l’industrie agroalimentaire.
Un secteur qui n’a pas encore atteint son plein potentiel
La star de l’agriculture kazakhstanaise est le blé dont le pays est le sixième exportateur mondial. Sa culture occupe 75 % des 216 millions d’hectares de terres agricoles cultivées et ne représente pas moins de 88 % des récoltes. La production de céréales en général atteint environ 22 millions de tonnes dont six millions sont dédiés à la consommation intérieure.
Le pays exporte annuellement près de 15 millions de tonnes de céréales par an, dont 10 de blé, ce qui représente 5 % du commerce mondial. Il est devenu le deuxième exportateur mondial de farine de blé derrière la Turquie en 2017. Du fait de conditions climatiques extrêmes, les rendements demeurent faibles avec moins de 20 quintaux par hectares.
Cependant, la variabilité du climat n’est pas seule en cause. Des marges de progression sont en effet possibles dans l’amélioration et l’expansion des techniques d’irrigation (moins de 1 % des terres agricoles est irrigué) ainsi que l’usage de fertilisants (actuellement en moyenne 3,1 kg/ha) et de semis.
Dans les secteurs de la viande et des produits laitiers, le manque de moyens de stockage et de transports frigorifiques freine les exportations kazakhstanaises. Même si la production annuelle de lait, provenant à 90 % de lopins de terre familiaux, atteint 6,4 millions de tonnes, le pays importe du beurre et du fromage depuis l’Union européenne et la Russie. Malgré ces difficultés, les cheptels grossissent chaque année, en particulier de bovins. Les autorités souhaitent développer la production de viande bovine de haute qualité et se sont fixées pour objectif d’en exporter 60 000 tonnes par an vers les autres membres de l’Union douanière asiatique, la Russie et la Biélorussie. Un important effort a également été fourni dans le domaine vétérinaire avec le durcissement des sanctions en cas de violation des règles sanitaires et un renforcement du contrôle des produits phytosanitaires.
Une politique volontariste
La coopération avec la France est particulièrement soutenue dans ce secteur de l’élevage. Ainsi, en 2015, une étude FASEP a été réalisée par l’Institut de l’élevage français afin d’aider le gouvernement kazakhstanais à mettre en place un schéma directeur pour le développement de la filière. L’Inra coopère avec Kazagro Innovation sur l’amélioration des analyses de laboratoire. Plusieurs projets sont également à l’étude pour la production de vaccins et de médicaments vétérinaires et la sélection génétique.
Environ 60 % des produits transformés consommés au Kazakhstan sont importés. D’où la mise en place par les autorités en 2013 d’un ambitieux programme gouvernemental jusqu’en 2020, baptisé Agrobusiness 2020. Doté d’un montant total de 15,2 milliards d’euros (dont 400 millions d’euros de subventions pour les cultures et moitié moins pour l’élevage), il définit trois axes de développement : la production animale, la production végétale ainsi que les infrastructures et les équipements. Un nouveau programme de subventions couvrant la période 2017-2021 est venu renforcer le soutien aux petits exploitants et augmenter les subventions dans les domaines des infrastructures de stockage et de transport, des intrants et des machines agricoles. Notons également qu’en 2016 ont été publiés des textes de loi encadrant la création de coopératives et d’une filière biologique.
Autre aide gouvernementale visant à lancer l’agriculture : l’allègement de plusieurs taxes pour les agriculteurs. Ils bénéficient en effet d’un abattement de 70 % sur cinq impôts. Pour les exploitations de moins de 3 500 hectares, ces taxes sont remplacées par une taxe unique représentant 10 % du chiffre d’affaires.
Présence tricolore
Les entreprises françaises n’ont pas attendu les initiatives officielles pour pénétrer ce marché pourtant réputé difficile. Soufflet y exploite une malterie. Danone et Lactalis sont présents de longue date (depuis respectivement 2010 et 2004). La première y possède une usine de 300 personnes produisant une cinquantaine de références de produits laitiers adaptés au marché local. La seconde a installé trois usines de productions et racheté deux fermes spécialisées dans la production de lait. Ce géant français des produits laitiers est aujourd’hui leader dans son domaine au Kazakhstan. Avec la volonté du gouvernement de booster le développement de l’agrobusiness et le haut niveau d’expertise des entreprises françaises, d’autres pourraient leur emboîter le pas.
La filière laitière s’oriente vers davantage de qualité
À l’initiative de l’Union laitière kazakhstanaise et avec le soutien de la BERD et de la FAO (l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), le Kazakhstan a signé en août dernier une feuille de route visant à élever la qualité de la production de lait et de ses processus de transformation aux standards en vigueur dans les pays de l’Union économique eurasiatique, qui regroupe la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan, notamment grâce à des mesures portant sur le suivi de la santé du bétail et les analyses en laboratoire du lait cru. Le développement de la filière laitière au Kazakhstan, qui a produit l’an dernier 3,8 millions de tonnes de lait, est actuellement ralenti par une qualité insuffisante du lait produit dans de petites exploitations familiales. Bilan : le pays a importé l’an passé 448 000 tonnes de lait et les unités de transformation, insuffisamment approvisionnées en matière première, ne tournent pas au maximum de leur capacité. Un comble dans un pays où la tradition de l’élevage est solidement implantée et dont les habitants sont de grands consommateurs de produits laitiers. La signature de cette feuille de route intervient dans le contexte d’une politique plus large sur la filière laitière. En 2018, le pays a en effet lancé un important programme de développement à l’horizon 2027. Son objectif est double : faire passer le cheptel actuel de 72 000 têtes à 170 266 en travaillant à l’amélioration de la génétique. Mais aussi élever la qualité de toute la filière, de la production de la matière première à sa transformation. C’est en ce sens, afin de mettre en avant des produits alimentaires, notamment laitiers, de bonne qualité et fabriqués localement, que les autorités ont mis en place un label « Made in Kazakhstan » destiné à des aliments biologiques de bonne qualité et bon marché, élaborés sur place avec des matières premières locales.