Les entreprises qui préparent leurs salons, y soignent leur participation et en assurent un suivi précis engrangent des succès en France, comme à l’étranger. À côté des incontournables, il y a toujours des opérations à découvrir, en fonction de ses cibles stratégiques. Démonstration avec quatre PME qui intègrent des salons dans leur démarche d’internationalisation.
Clextral
25 à 30 salons systématiquement tous les ans
Fabricant de lignes de production pour l’agroalimentaire, la pâte à papier ou la chimie, Clextral a réalisé à l’international plus de 80 % de son chiffre d’affaires, qui s’est élevé à 62 millions d’euros en 2017.
Cette entreprise de 300 salariés établit chaque année un programme de 25 à 30 salons dans le monde, « ce qui nous permet d’être partout où nous sommes déjà implantés, de prospecter et de défricher », confiait le 27 septembre Gilles Maller, le vice-président en charge du Commerce et de l’international, alors qu’il se trouvait à Bombay sur le salon FoodTec India (27-29 septembre).
La PME de Firminy (Loire) y exposait sur le Pavillon monté par l’Association pour le développement des échanges internationaux de produits et techniques agroalimentaires (Adepta), dont elle est membre. « Une approche collaborative », qu’apprécie Gilles Maller, car elle permet « d’échanger et de partager des expériences entre entrepreneurs ». La solution du pilotage par l’Adepta a d’autres avantages, notamment en termes de logistique et de prix. Le coût d’un salon est ainsi réduit de 25 à 50 %. L’entreprise ligérienne a ainsi participé à une demi-douzaine de salons avec l’Adepta : FoodTec India, Djazagro en Algérie, Sira au Sénégal, Fispal au Brésil ou Allpack Asia en Indonésie.
Pour Clextral, FoodTec India (près de 600 exposants et 16 500 visiteurs) est un salon généraliste à dimension régionale. Dans son programme annuel, figurent également des manifestations spécialisées, à l’instar du salon Petfood Forum à Kansas City. « Cet évènement, qui se situe sur un marché porteur, les États-Unis, a également un rayonnement régional sur l’ensemble de l’Amérique du Nord. Mais c’est un évènement spécialisé, en l’occurrence dans l’industrie de l’alimentation des animaux », expliquait Gilles Maller.
Certains rendez-vous sont incontournables, comme l’évènement mondial du conditionnement et des process Interpack à Düsseldorf. Une grande messe du packaging qui se tient tous les ans depuis quarante ans. Attirant plus de 170 000 visiteurs, dont 75 % d’étrangers, elle est un carrefour unique pour entretenir des relations et trouver de nouveaux clients.
À côté, Clextral participe à des salons plus modestes, par exemple, AllPack à Djakarta (850 exposants de 40 nations et 37 200 visiteurs). « Au début, on s’y est rendu pour voir. Puis, on s’est rendu compte que 250 millions d’Indonésiens, c’était un marché important, et que le salon couvrait une zone en expansion, à savoir l’Asie du Sud-est. Finalement, l’an dernier, nous avons ouvert un bureau à Djakarta », relatait Gilles Maller.
Très internationalisé, Clextral ne participe à aucun salon dans l’Hexagone. Le seul, qui intéresserait la PME est le Carrefour des fournisseurs de l’industrie alimentaire (CFIA), à Rennes. « Ce salon prend de l’ampleur. Il serait intéressant pour nos clients français, mais nous ne parvenons pas à y obtenir de place », regrettait Gilles Maller.
Chaque année, le menu des salons diffère. En fonction évidemment de l’impact que l’entreprise veut avoir sur une zone géographique : l’Asie, par exemple, aux dépens de l’Allemagne, avec plusieurs salons sur la zone plutôt qu’un gros évènement outre-Rhin. Ou c’est le résultat de l’évaluation des salons où l’entreprise a participé. Il ne faut surtout pas éviter de se poser les bonnes questions. Faut-il refaire tel salon ? Si oui, sous le même format ? Avec un stand plus grand ou plus petit ? Avec une force de frappe plus importante ?
Au départ, une ou deux personnes sont dépêchés sur un salon. Il s’agit d’un petit stand : 9-12 m2. À Interpack, 10 à 15 salariés sont présents. En outre, une machine est installée sur le stand, qui peut atteindre 200 m2. Ses matériels valant au minimum un million d’euros pièce, ce n’est pas sur les salons qu’ils sont vendus. En revanche, les prises de contact et les discussions techniques y sont courantes. Dans les grands salons, des salles de réunion sont prévues sur le stand. En revanche, quelle que soit la taille du stand, c’est la même charte graphique qui est reprise.
« Un salon se prépare, insistait Gilles Maller. Ce qui signifie avoir des commerciaux pour rencontrer les clients, ce qui signifie aussi préparer en amont le ou les messages qu’ils vont délivrer de façon à ce qu’ils soient les mêmes ». De même, il faut s’assurer qu’il y aura toujours une présence sur le stand. Enfin, c’est l’occasion pour les spécialistes de la Recherche et développement et des Achats de satisfaire leur curiosité professionnelle, soit qu’en amont ils aient déterminé des cibles, soit qu’ils partent à la découverte au gré des visites.
Coval
Créer un stand attractif et animer
Basé à Valence, Coval conçoit et commercialise des systèmes et des composants pour la préhension par le vide. Positionnée sur une niche, face à des concurrents parfois dix fois plus gros, la PME drômoise se doit d’offrir aux constructeurs de machines qui sont ses clients des produits innovants : ventouses pour la manipulation des emballages, mini-pompes économes en énergie à destination de l’industrie du packaging, de la robotique et la plasturgie, etc.
Cette entreprise, labellisée French Fab et membre de l’Adepta (Association pour le développement des échanges internationaux de produits et techniques agroalimentaires), a consacré à la R&D 12 % de son chiffre d’affaires, d’un montant de 16 millions d’euros en 2017. Avec ses 135 salariés, elle a aussi enregistré près de la moitié de ses ventes à l’étranger, grâce à son réseau mondial de 35 distributeurs et cinq filiales commerciales : États-Unis, Italie, Espagne, Allemagne, Chine. Avec deux conséquences : les filiales sont responsables des salons dans leur pays ; et chez Coval, on parle les cinq langues. Du coup, les sites web, les brochures pour faciliter l’acte d’achat et les notices d’explication des produits sont aussi dans toutes les langues.
Pour l’image de la société et pour présenter du matériel dans une exposition, Coval ne descend jamais sous une surface de stand de 33 à 38 m2. Le stand est modulaire et monté par une société française, propriétaire de la structure, alors que le mobilier et les visuels appartiennent au fabricant qui loue l’espace. Le coq de la French Fab est bien visible sur le stand et sur des postes, comme imprimé en 3 D sur le site de l’entreprise. « Ça permet entre autres de nous identifier auprès des entreprises françaises qui appartiennent au réseau French Fab et ainsi de nouer des relations », se félicite Stéphane Garcia, responsable Marketing et communication de Coval.
L’animation sur le stand est essentielle. La difficulté pour le spécialiste drômois est qu’il produit des composants, pas une machine. Les exposer, certes, mais les faire tourner, c’est mieux. C’est pourquoi un partenariat est noué avec un fournisseur de robots. Autrefois, c’était Kuka. Aujourd’hui Staubli lui prête un robot où il peut faire tourner ses composants sur son stand. Avantage pour les fournisseurs du robot : une publicité gratuite.
Sur le stand, il n’y a pas de chaises, seulement des tabourets hauts pour permettre aux commerciaux de se reposer « en cas de besoin », s’amuse Stéphane Garcia. Ces responsables de vente – quatre à six, selon les manifestations – par roulement parcourent les allées des salons pour s’informer de la concurrence et la clientèle potentielle. Le cas échéant, ils distribuent des invitations pour des dégustations de produits locaux et des « apéroDrôme ». À cet égard, pour le responsable Marketing et communication, « ce n’est pas parce qu’on est dans l’industrie qu’il faut est triste ». Et « ça marche, assume-t-il. On a des clients qui nous visitent à 12 heures 30 ! ».
Évidemment, un salon se prépare en amont, détaille-t-il, « avec un e-mailing que nous réalisons à partir de notre base de données de clients prospects, avec un ciblage pour certains que nos commerciaux sont, ensuite, chargés de convaincre, avec aussi notre site web et les réseaux sociaux sur lesquels nous annonçons notre présence à un salon et la présentation de nos innovations, quand c’est le cas, ce qui est un plus pour l’attractivité de notre offre ».
Depuis plusieurs années, Coval travaille aussi avec une agence internationale de relations publiques. Alors que l’entreprise veut renforcer sa marque, la première expérience en Allemagne a été concluante, avec 15 articles publiés dans des journaux. Enfin, après le salon, il faut assurer le suivi. Ce qui se traduit par des lettres de remerciement et des fiches contact. À la clôture de chaque exercice fin septembre, l’entreprise a pu juger de la qualité des contacts, voire de la quantité, et décider de la suite à donner. La PME française vient ainsi juste d’établir sa feuille de route pour l’année 2018-2019. Coval entend bien trouver de nouveaux clients sur les salons. En France comme à l’étranger.
« En France, même sur un salon comme le Carrefour des fournisseurs des industries alimentaires, le CFIA à Rennes où notre équipe revient tous les ans, nous fidélisons principalement des clients français, car les étrangers préfèrent se rendre sur les grandes manifestations en Allemagne ou en Italie », observe Stéphane Garcia. Ainsi, dans la masse des contacts établis cette année, lors du salon Ipack-Ima 2018, à Milan, figuraient 35 % d’étrangers, notamment des Grecs, des Russes ou encore des professionnels des pays de l’Est.
Quand l’entreprise française a créé sa filiale commerciale outre-Atlantique il y a dix ans, plusieurs outils de prospection ont été mis en place : outre le site web et la documentation, les-emails et les salons qui sont indispensables pour se faire connaître et chasser le prospect, comme Pack Expo à Chicago ou Las Vegas et Assembly Show à Rosemont. Coval y fait maintenant beaucoup de fidélisation et son objectif est plutôt de recruter pour étendre sa couverture géographique de l’est des États-Unis à la côte ouest.
Dès que Coval a créé une société à l’étranger, elle a investi dans les salons. En Allemagne, où la filiale commerciale a été ouverte il y a quatre ans, on a privilégié pour se faire connaître les salons plus petits et moins chers que la Foire industrielle de Hanovre, comme le salon des solutions de l’emballage FachPack à Nüremberg et le grand rendez-vous de l’automatisation Automatica à Münich. « La Foire de Hanovre, on aimerait y exposer. Mais c’est gigantesque. Et si ce devait être pour y disposer de 20 m2, ce serait peine perdue », juge Stéphane Garcia. En effet, le principal concurrent allemand de Coval dispose de plus de 100 m2.
Escal
Les deux incontournables, Anuga et Seafood
Spécialiste des produits surgelés (escargots, moules, sardines, spécialités de la mer, crevettes…) et produits frais (tartes fines, tartes flambées…), Escal travaille généralement en direct tant en France qu’à l’étranger où la PME strasbourgeoise réalise les trois quarts de son activité dans 25 pays. Cette société familiale de 250 salariés et au chiffre d’affaires de 130 millions d’euros en 2017 n’utilise les salons que pour des raisons particulières.
Pour sa directrice générale et directrice Export Constance Radke, il y a deux types de manifestations :
1. les salons qui constituent « le fonds de roulement » de l’entreprise. Ils sont au nombre de deux : le Salon international de l’alimentation de Cologne, l’Anuga, et le rendez-vous mondial des professionnels des produits de la mer à Bruxelles, Seafood Expo Global ;
2. les salons « à essayer » pour percer sur un marché. Avec son offre de qualité, voire haut de gamme, Escal doit viser des clientèles avec un certain niveau de vie et plutôt dans des pays avancés. D’où le choix de certains salons, comme le Fancy Food Show de New York, premier événement nord-américain dans l’alimentation et les boissons, et Bakery à Shanghai, rendez-vous asiatique de la boulangerie et pâtisserie.
« Pour nous, les salons sont une petite porte d’entrée. Néanmoins, explique Constance Radke, nous devons être à l’Anuga, qui est très important pour le marché germanique ». L’Allemagne, en particulier, est le deuxième marché d’Escal après la France (36 % du chiffre d’affaires contre 40 %). Quant au Seafood, présent sur ce salon depuis plus de 20 ans, de façon précise depuis la deuxième édition de l’événement bruxellois, la PME y rencontre ses clients habituels, auxquels elle peut présenter sa nouvelle gamme, et établir de nouveaux contacts.
Jusqu’à présent, la participation d’Escal au Fancy Food Show et à Bakery n’a pas été couronnée de succès. « Pour les États-Unis, nous n’étions pas prêts. Promouvoir sur ce marché des escargots n’y est pas facile et, avant de distribuer, il faut un importateur et mettre en place un système logistique », souligne la directrice de l’entreprise française. Quant à Bakery, « nos produits, type tarte flambée, spécialité alsacienne, n’étaient tout simplement pas adaptés à la demande », relate-t-elle.
Cette année, le Salon international de Paris (21-25 octobre 2018), le Sial, est au menu. À nouveau, car après l’avoir boudé pendant plusieurs années, faute de résultats – « et nous étions aussi rebutés par les risques de grèves et d’embouteillages pour parvenir jusqu’au parc de Villepinte », reconnaît Constance Radke – Escal y revient, avec le soutien de la région Grand Est. La CCI annonce ainsi au Sial un pavillon agroalimentaire de 30 entreprises.
Quatre produits d’Escal ont notamment été retenus pour les Grands Prix Sial Innovation 2018 : moules à croquer, escargots bio, tarte fine au saumon, tarte fine forestière. « Avec des produits typiquement français, produits apéritifs et de la gastronomie, nous espérons gagner de nouveaux clients », confie la dirigeante de l’entreprise alsacienne.
Escal exposera au Sial sur un stand de 20 m2, contre 50 m2 à l’Anuga et 80 m2 au Seafood. Trois commerciaux y seront présents. Pour cette entreprise à l’ADN franco-allemand, la connaissance des langues, trois au minimum, est obligatoire : le français, l’anglais, l’allemand ou l’espagnol. Quatre, c’est mieux. Au Sial, les cibles géographiques seront l’Asie et l’Amérique du Nord. Et si les retours sont bons, alors Escal pourrait à nouveau exposer au Fancy Food Show de New York et à Bakery Shanghai pour « essayer » l’Amérique du Nord et l’Asie. Réponse le 25 octobre.
NBC
Pollutec São Paulo et Lyon pour exporter de Guyane
« Pour une petite société basée à Cayenne, à la frontière avec le Brésil, qui a réalisé 700 000 euros de chiffre d’affaires en 2017, participer à des salons à l’étranger serait impossible sans les aides financières de la Chambre de commerce et d’industrie et du ministère des Outremers (Mom) et sans l’accompagnement de Business France ». L’homme qui parle, Nicolas Brehm, participe régulièrement aux salons Pollutec à São Paulo et Lyon. Il a fondé et dirige le cabinet d’étude guyanais NBC, spécialisé dans l’eau et l’environnement, et exposera, pour la deuxième fois, du 27 au 30 novembre 2018, au salon international des équipements, des technologies et des services de l’environnement, à Lyon.
Participer à Pollutec sur le Pavillon des outremers ne lui pose aucun problème. Au contraire, il peut échanger avec d’autres sociétés confrontées à des problèmes similaires de logistique et rencontrer en un lieu unique ses partenaires et ses clients. Pollutec Lyon est un salon auquel ne pourrait pas participer NBC sans l’aide du Mom et de Business France. Nicolas Brehm estime que ce salon lui coûtera en gros 2 000 euros, alors qu’il devait lui revenir cinq fois plus cher. Avec ses 7 ingénieurs, NBC réalise 30 % de son activité à l’export. Après avoir participé à Pollutec São Paulo 2016, la très petite entreprise (TPE) a pu bénéficier des services d’un volontaire international en entreprise (VIE) pendant deux ans pour opérer sur la République dominicaine. Un contrat qui va être renouvelé pour une nouvelle période de deux ans sur ce même pays.
En 2016, Pollutec São Paulo a particulièrement réussi à la société guyanaise, qui a noué un partenariat, à cette occasion, avec un autre exposant, la société belge Kamps, fabricant d’aérateurs de station d’épuration fonctionnant uniquement à l’énergie solaire. « Nous étions à la recherche d’une solution similaire pour un client important en République dominicaine, afin de traiter un effluent industriel en site isolé par lagunage aéré », se souvient Nicolas Brehm.
Après avoir discuté des questions techniques, les deux sociétés ont défini un projet qui a été finalement réalisé au début de cette année. Une lagune d’assainissement des eaux usées d’une usine avec des aérateurs solaires a ainsi été construite, associant un procédé écologique à une énergie renouvelable en milieu tropical. « La lagune est ainsi autonome en énergie et les eaux sont retraitées avant d’être jetées », précise Nicolas Brehm.
Quelques années plus tôt, en 2013, NBC avait exposé à Pollutec Paris. À cette occasion, avait été engagée une coopération avec la société française Apilab pour adapter des protocoles de bio surveillance en milieu urbain. La TPE guyanaise a ainsi développé un outil de bio surveillance de la qualité de l’air. En l’occurrence, ce sont des abeilles butineuses qui, de façon passive, collectent les particules dans l’air. Les polluants (métaux lourds, pesticides…) accumulés sont ensuite retrouvés dans la cire des ruches exposées. Ce système intéressant les collectivités locales, comme les industriels, soucieux d’engager une politique de responsabilité sociale et environnementale (RSE), NBC, qui exposait sur le Pavillon Outremer de Pollutec 2016, y a signé un contrat avec Air Liquide Dominica, basé à Saint-Domingue.
La Jamaïque est justement une destination qui intéresse le cabinet d’étude de Cayenne. Son directeur se rendra dans une quinzaine de jours au premier Touch of France, monté par l’ambassade de France à Kingston et l’association Club France Jamaïque. Ce salon multisectoriel ouvert aux entreprises françaises exportatrices se déroulera du 8 au 10 novembre prochains.
François Pargny