Antibiotiques, analgésiques, traitements contre la malaria, le diabète, le cancer et les maladies cardiaques… Un nouveau rapport* publié le 23 mars par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime la valeur totale des produits pharmaceutiques de contrefaçon commercialisés dans le monde à 4,03 milliards d’euros.
Le rapport de 94 pages rédigé en anglais couvre la période 2014-2016. Il analyse les données relatives aux saisies douanières réalisées par des organes internationaux répressifs, notamment l’Organisation mondiale des douanes (OMD), la Direction générale de la fiscalité et de l’Union douanière (DG TAXUD) de la Commission européenne et le département américain de la Sécurité intérieure.
Les données relatives aux saisies douanières analysées dans le rapport montrent que les antibiotiques et les analgésiques de contrefaçon sont les produits les plus souvent saisis.
Toutefois, les douanes ont également saisi d’autres médicaments de contrefaçon, tels que des médicaments pour le traitement du cancer, du diabète, de la malaria, du VIH ainsi que des médicaments contre les maladies cardiaques et des anesthésiques locaux.
L’Inde, premier producteur mondial de produits pharmaceutiques de contrefaçon
L’Inde demeure la première économie de provenance des produits pharmaceutiques de contrefaçon au niveau mondial. Le pays, révèle le rapport, est à l’origine de 53 % de la valeur totale des produits pharmaceutiques et médicaments contrefaits saisis dans le monde en 2016, suivi par la Chine (30 % au cours de la période 2014-2016).
L’Inde est également, toujours en valeur, la principale économie de provenance des produits pharmaceutiques contrefaits expédiés vers l’Union européenne (UE). Le marché indien est en effet à l’origine de 47 % de la valeur totale des produits pharmaceutiques et médicaments contrefaits saisis par les autorités douanières de l’UE. Il est suivi par la Chine (37 %) et Hong Kong (8 %).
Globalement, d’après le rapport, les deux pays les plus peuplés du globe et certaines économies d’Asie d’Extrême-Orient, dont le Vietnam, l’Indonésie, le Pakistan et les Philippines, seraient les principaux producteurs de produits pharmaceutiques contrefaits commercialisés dans le monde.
Hong Kong et les Émirats arabes unis, plateformes de transit
Hong Kong et les Émirats arabes unis sont les principaux points de transit des produits pharmaceutiques de contrefaçon commercialisés dans le monde. Reste que selon le rapport Singapour apparaît également comme un point de transit. En outre, la Cité-État présente à la fois une grande capacité de production et une grande capacité de réexportation de produits pharmaceutiques observe le rapport.
Étant donné que les douanes singapouriennes n’ont signalé aucune saisie de produits pharmaceutiques contrefaits, des entretiens structurés avec des experts de l’industrie et de l’application des lois ont été nécessaires pour conclure qu’il s’agit d’un point de transit pour les médicaments contrefaits, précise encore le rapport.
Les envois postaux, principal mode de transport des produits pharmaceutiques contrefaits
S’agissant du mode opératoire, les contrefacteurs de produits pharmaceutiques exploitent les faiblesses des chaînes d’approvisionnement, qui sont souvent fragmentées.
Ce commerce de contrefaçon est ainsi facilité par l’augmentation du nombre d’envois par petits colis postaux ou par lettres, qui sont plus difficiles à détecter par les agents des douanes. Le rapport dévoile ainsi qu’entre 2014 et 2016, 96 % de l’ensemble des saisies douanières de produits pharmaceutiques de contrefaçon concernaient des envois postaux ou des livraisons par courrier express.
En volume, le transport aérien constitue un moyen de transport majeur dans le commerce mondial de faux produits pharmaceutiques. Mais en valeur, le transport par voie maritime a été le principal mode de transport des faux médicaments et produits pharmaceutiques au cours de la période 2011-2013. Toutefois, il a été devancé par le transport par la route ainsi que les services postaux d’envoi de courrier au cours de la période 2014-2016.
Les produits pharmaceutiques de contrefaçon peuvent constituer une menace directe pour la santé et la vie. Leur entrée dans l’UE, souvent au moyen de petits colis et de ventes sur Internet, représente un défi pour les autorités répressives estime l’EUIPO.
Devant l’utilisation abusive de petits colis pour le commerce de médicaments contrefaits et l’essor du commerce électronique tout comme son rôle dans ce commerce illicite, l’EUIPO et l’OCDE déplorent une dissuasion insuffisante en raison de sanctions relativement légères – les peines d’emprisonnement demeurant en particulier insuffisamment dissuasives.
Ch. Peugeot (Unifab) : « Il faut impérativement tirer la sonnette d’alarme »
« Ce rapport arrive à point nommé, le contexte actuel de crise sanitaire dû au Covid-19 ouvre une brèche », a déclaré Christian Peugeot, président de l’Union des fabricants (Unifab), lors de la parution du rapport.
Environ 2 000 annonces en ligne qui concernaient des faux produits pharmaceutiques liés à cette catastrophe sanitaire ont été démantelées par Interpol, a-t-il ainsi rappelé. Ce qui a conduit à la saisie de plus de 34 mille faux masques chirurgicaux.
« Il faut impérativement tirer la sonnette d’alarme et sensibiliser les consommateurs en leur faisant prendre conscience des enjeux majeurs que cela représente », a insisté le président de la principale association française de lutte anti-contrefaçon.
Car la mondialisation ouvre de nouvelles possibilités aux réseaux criminels d’élargir la portée et l’ampleur de leur commerce illicite de produits contrefaits et piratés.
L’analyse présentée dans le rapport vise à aider les décideurs des secteurs public et privé à mieux comprendre la nature et l’ampleur du commerce mondial des produits pharmaceutiques contrefaits et à élaborer des réponses politiques appropriées.
Desk Moci
Pour en savoir plus :
Consultez le rapport sur le commerce de produits pharmaceutiques contrefaits publié par l’EUIPO et l’OCDE en PDF joint ci-dessous