📌 L’essentiel : Avec ses thermostats connectés, Voltalis permet aux réseaux de gérer les pics de consommation électrique. Leader en France, elle se déploie en parallèle au Royaume-Uni où elle ambitionne d’atteindre les mêmes volumes que sur le territoire national. Présente dans huit pays européens, elle est freinée par un marché de l’électricité non- intégré et dont les règles propres à chaque pays ne lui permettent pas de mettre en œuvre son business model. La parade ? Voltalis s’appuie sur des programmes européens pour essaimer ses démonstrateurs à travers toute l’Union européenne.
🔑Les clés de la réussite :
-Un thermostat innovant qui surfe sur les besoins d’optimiser la production et la consommation d’énergie
-Un business model original et économique pour les opérateurs
-Des pilotes ou démonstrateurs pour tester les marchés et les convaincre
Temps de lecture : 5 mn
L’HISTOIRE
Business model innovant à base de thermostats connectés
En France, la solution Voltalis est installée dans 250 000 sites (principalement des logements mais aussi des locaux commerciaux). Au total, l’entreprise créée en 2006 (et propriété du fonds Meridiam, spécialiste des infrastructures), pilote la consommation énergétique d’environ 1,5 million d’appareils électriques dans le pays.
Elle agrège des économies d’énergie de l’ordre d’un gigawatt en France et vise une multiplication par dix d’ici 2030, notamment grâce à des partenariats avec les collectivités locales, les bailleurs sociaux etc. Voltalis (500 salariés) revendique 60 % des parts de marché en France, où elle est reconnu en tant qu’agrégateur d’énergie.
Le Business model est original, comment ça marche ?

Voltalis fournit aux utilisateurs des thermostats qu’elle installe sur les appareils électriques (radiateurs, ballons d’eau chaude, pompes à chaleur, climatiseurs etc). Ces thermostats sont connectés au réseau électrique français. A la demande du gestionnaire du réseau, RTE donc, Voltalis opère de brèves réductions de consommation sur les appareils équipés de son thermostat, ce qui permet, notamment en période hivernale, de soulager le réseau quand il fait face à des pics de demande. Cette flexibilité doit permettre à RTE d’éviter les ruptures de fournitures d’électricité et/ou de recourir à des centrales d’appoint, gaz ou charbon notamment, plus polluantes évidemment.
« Dans une logique de transition énergétique, la flexibilité est un point essentiel car une transition ne peut se faire avec des risques de rupture », explique Sébastien Condom, Senior Vice President, Head of International Business. Ces microcoupures de quelques minutes restent sans impact, selon Voltalis, sur la température d’une pièce ou, en tout cas, le ressenti de ses occupants.
En revanche, les clients finaux de l’entreprise réaliseraient chaque année une économie d’énergie de 15 %. Pour eux, la solution est gratuite, Voltalis étant rémunérée par l’opérateur du réseau RTE d’une part et par les marchés de l’énergie sur lesquels l’agrégateur d’énergie commercialise l’énergie économisée, au même titre que les producteurs.
Des pilotes pour tester les marchés et réglementations européennes
Ce business model n’est déployable immédiatement à l’international que sur les pays où ce statut d’agrégateur de Voltalis lui permet de vendre l’électricité économisée sur les marchés de gros. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui dans un certain nombre de pays.

« Dans ce cas, nous pouvons nous installer mais pas générer de chiffre d’affaires suffisant, ce qui évidemment n’est pas envisageable, précise Sébastien Condom. En revanche, dans beaucoup de pays, ce sujet est sur la table, en débat et nous pouvons alors prendre la décision de faire nos premiers pas via des projets pilotes, des démonstrateurs. Cela nous permet de nous préparer à l’ouverture du marché, d’évaluer le potentiel du pays, de vérifier que nos installations sont bien conformes aux règles locales en matière d’installations électriques, d’opérer des tests d’agrégation et de construire un plan d’investissement ».
Ces pilotes, – dont le coût unitaire s’élève à plusieurs centaines de milliers d’euros, permettent aussi de démontrer l’intérêt de la solution aux acteurs de l’écosystème local, et de peser dans les discussions réglementaires. « Nous participons à ces débats, avec nos spécialistes de l’activité réglementaire, appuyés par des ressources locales » confirme le directeur international.
La mise en place de ces pilotes est facilitée, en général, par des partenaires locaux que Voltalis va convaincre de l’intérêt de son thermostat connecté. L’entreprise est très ouverte sur ce sujet. En Finlande, ça a été une association de consommateurs ; en Espagne, un fournisseur d’électricité ; au Portugal, une université….
Pour l’heure, Voltalis a installé un, ou plusieurs démonstrateurs, dans huit pays : l’Espagne, le Portugal, la Slovénie, la République Tchèque, la Hongrie, la Suède, la Finlande et la Belgique. Les prochains sont envisagés pour la Grèce et l’Estonie.
Dé-risquer l’investissement en s’appuyant sur des programmes européens
Plusieurs de ces pilotes sont déployés dans le cadre de consortiums constitués pour des réponses à des appels d’offres de programmes européens (avec donc des soutiens financiers à la clé). C’est le cas en République Tchèque et Hongrie par exemple (2024 et 2025), en Finlande (premier pilote il y a quatre ans et un second en 2024) et en Espagne.
Voltalis a pris part à plusieurs de ces programmes européens. Les trois plus récents étant les programmes Eclipse, BunGees et DR-Rise.
Le premier, Eclipse, vise à mettre en œuvre et à démontrer le Cadre européen commun de référence (CERF) pour les applications destinées aux consommateurs d’énergie dans toute l’UE. D’ici août 2026, les pilotes seront déployés dans 17 pays de l’Union européenne par 23 partenaires (dont Voltalis, donc).
Le second, BunGees, veut permettre le développement d’une offre intégrée (guichet unique) de nouveaux services intelligents d’efficacité énergétique. Sur le site dédié il est ainsi indiqué : « Compte tenu des différences actuelles entre les marchés des services d’efficacité énergétique et l’environnement réglementaire applicable dans les États membres de l’UE, l’évolution des services d’efficacité énergétique intelligents variera d’un pays à l’autre. Le projet analysera les conditions réglementaires permettant d’exploiter pleinement le potentiel des services intégrés d’efficacité énergétique et déterminera si des mesures d’organisation du marché seraient nécessaires ». BunGees a démarré en 2022 et doit s’achever cette fin d’année.
Enfin, le dernier, DR-Rise, réunit 14 partenaires européens. Il vise à constituer un ensemble complet d’outils et de services destinés à accompagner les consommateurs européens finaux dans leur parcours pour devenir des utilisateurs actifs sur le marché de l’énergie.
Une équipe dédiée aux appels d’offres
Deux personnes, chez Voltalis, sont chargées de piloter les réponses à ces appels d’offres européens. « C’est accessible, même à une PME, commente Sébastien Condom. Ces appels d’offres et ces consortiums constituent aujourd’hui notre voie privilégiée de déploiement en Europe. Ils permettent de dérisquer les implantations ». Il précise qu’une veille assidue est assurée sur les nouveaux appels à projets.
En parallèle, les services de l’Union européenne, auprès desquels Voltalis est désormais bien identifiée, viennent solliciter régulièrement l’entreprise française pour la mettre en relation avec d’autres partenaires lors des process de construction de consortiums.
Sur place, Voltalis s’appuie soit sur des partenaires locaux, soit sur ses propres ressources. C’est le cas par exemple pour la Finlande et la Suède, pour lesquels un Finlandais a été recruté. « La connaissance de la culture locale est importante, nous avons d’ailleurs une quinzaine de nationalités différentes dans notre équipe » observe le dirigeant.
Développer à partir de ces pilotes, lorsqu’ils sont validés
C’est exactement comme cela que l’aventure avait commencé au Royaume-Uni. « Nous avons commencé par faire deux pilotes, dans le cadre de deux projets européens il y a cinq ans environs. Cela nous a permis de bien tester le marché, de nous assurer du business à venir et aussi de créer des contacts avec les acteurs de ce marché », raconte le directeur international.
Un chargé de projet a été recruté en Ecosse pour gérer le projet et préparer le travail réglementaire. Finalement, une filiale a été ouverte en novembre 2023, elle compte désormais une vingtaine de salariés. Les premiers thermostats (hors démonstrateurs) ont été installés à l’été dernier.
« Un des premiers contrats a d’ailleurs été signé avec un partenaire que nous avions rencontré lors du pilote ». Objectif : 100 MW d’ici 2026, pour à terme construire un modèle comparable à celui de la France. « Beaucoup de foyers sont équipés au Royaume-Uni de radiateurs électriques, et de plus en plus de pompes à chaleur ».
Un appui de Business France au-delà de l’Europe
Les ambitions de Voltalis ne s’arrêtent pas aux frontières de l’Europe. L’entreprise surveille d’autres territoires, en s’appuyant sur Business France. Elle a été sélectionnée, il y a quelques mois, dans le cadre du programme France 2030 Export. Elle avait été repérée à la suite d’une candidature à un projet.
Avec l’agence publique en charge de l’internationalisation des entreprises, elle a mené l’année dernière par exemple, une mission de prospection aux États-Unis. « Grâce au réseau Business France, nous avons pu aussi obtenir des rendez-vous en Australie, au Canada, en Chine, à Singapour… Ce programme nous donne accès à un interlocuteur dédié, avec des coûts réduits. Cela facilite vraiment notre approche sur ces territoires et les premières prises de contacts », estime le directeur international de Voltalis.
D’ici 2030, Voltalis espère agréger 10 GW en France et autant à l’international.
📖✨🧠Les leçons :
- Les pilotes permettent à Voltalis de tester à moindre frais un nouveau marché et de se créer un premier réseau sur place
- S’ils sont validés, ces pilotes permettent de développer de vrais projets
- Utiliser les programmes de financement de projets européens en faveur de la transition énergétique permet de Dérisquer les investissements de l’entreprise
Stéphanie Gallo