La China International Import Expo (CIIE), foire d’importation de Shanghai dont la France est l’un des six pays invités d’honneur, s’est ouverte le 4 novembre dans un pays dont la consommation intérieure est atone et dont les exportations sont menacées par le regain de protectionnisme ambiant. Un plan de relance de l’ordre de 4000 milliards de yuans se prépare. Quel impact en attendre ?
Le 4 novembre s’est ouvert à Pékin une session du comité permanent de l’Assemblée nationale populaire dont les résultats seront suivis à la loupe par les économistes du monde entier mais aussi les entreprises qui ont des relations économiques avec le pays. Le principal sujet à l’ordre du jour : un plan de relance massif endiguer la crise de l’immobilier, stimuler la consommation intérieure et relancer l’économie.
Car l’économie chinoise, embourbée dans la crise de son secteur immobilier (principale destination de l’épargne des Chinois) depuis la fin de la Covid-19, n’en finit plus de ralentir. Les stocks de logements vides et de chantiers en arrêt ont bondi et les centres commerciaux sont désertés par une population qui a perdu confiance en l’avenir et est devenue économe. Le taux de chômage des jeunes a bondi à 18,8 % en août.
D’après les montants distillés dans la presse économique internationale, il serait question d’un plan à au moins 4000 milliards de yuan (Md CNY), soit près de 520 Md EUR, si l’on additionne les mesures de type monétaire et financier, et celles d’ordre budgétaire. Son objectif : tenir l’objectif de 5 % de croissance en 2024 fixé par les autorités (après + 5,2 % en 2023 selon la Banque mondiale), pour le moment inférieure à ce taux, et accélérer en 2025.
Baisse des taux et relance du crédit
Depuis plusieurs semaines, les autorités chinoises font des annonces à ce sujet et ont déjà mis en œuvre plusieurs mesures d’ordre monétaire et financier, pour un montant global de 1800 Md CNY (234 Md EUR) visant à relancer la consommation et les investissements des ménages, en berne depuis des mois.
Les principales ont été annoncées le 24 octobre par la Banque populaire de Chine (BPC), la banque centrale chinoise, en coordination avec les autorités de régulation financière. Son principal taux directeur, le taux à une semaine, a ainsi été abaissé de 1,7 % à 1,5 %, tandis que le taux de réserve imposé aux banques a été réduit de 0,5 point pour atteindre son plus bas niveau depuis 2018, dans l’espoir de libérer jusqu’à 1 000 Md CNY (130 Md EUR) de liquidités dans le système bancaire
Le taux des crédits immobiliers en cours a été aligné sur celui des nouveaux prêts, soit une baisse de 0,5 point en moyenne, réduisant ainsi le coût des remboursements de 150 Md CNY par an pour une cinquantaine de millions de foyers chinois. Par ailleurs, afin de relancer les achats d’appartements, l’apport exigé de l’acheteur d’un deuxième bien immobilier a été réduite de 25 % à 15 %. Enfin, la banque centrale a décidé de couvrir 100 % des prêts aux collectivités locales qui rachètent des logements invendus, au lieu de 60 % auparavant.
Côté marché boursier, en baisse depuis plusieurs mois, la banque centrale a annoncé une facilité de 500 Md CNY (65 Md EUR) pour les fonds, maisons de courtage et assureurs destinés à l’achat d’actions et une autre ligne de 300 Md CNY (39 Md EUR) destinés aux rachats d’actions par les entreprises cotées.
Un volet budgétaire de l’ordre de 2100 Md CNY
Le plan de relance chinois contient également un important volet budgétaire puisque le gouvernement prévoit un stimulus budgétaire équivalent à 300 Md de dollars (plus de 2100 Md CNY) financé par des obligations souveraines spéciales émises par l’État central.
D’après une note récente de l’institut Rexecode, près de la moitié de ces fonds (142 Md USD) serait dédiée au sauvetage du système bancaire plombé par l’effondrement du secteur immobilier, en premier lieu au « renflouement des banques publiques d’État » afin de leur redonner une capacité « à soutenir l’économie par le canal du crédit, et de les aider à acquérir de plus petits établissements bancaires en difficulté ». L’autre moitié visera à soutenir la consommation des ménages.
D’après Rexecode, « même s’il ne faut pas s’attendre à un rééquilibrage rapide de la croissance chinoise vers davantage de demande, ces mesures vont dans cette direction » car elle vise à stimuler la demande et non plus seulement la production. Mais elles mettront quelques mois à produire un effet tangible sur la croissance : « Si l’impact sur les marchés financiers est déjà visible (hausse de 21,5% de la Bourse de Shanghai sur les dix derniers jours), les effets sur l’économie réelle se manifesteront avec plus de délai, confirme Rexecode. Les mesures n’auront pas, ou peu, d’impact sur la croissance de 2024, mais devraient se matérialiser en grande partie l’année prochaine. Ce soutien à la demande devrait également stimuler les prix et interrompre la déflation telle que reflétée par le déflateur du PIB, qui est en recul depuis cinq trimestres consécutifs ».
Beaucoup d’observateurs parient également sur le fait que ce plan sera réajusté en fonction du résultat des élections américaines du 4 novembre car si Donald Trump revient à la Maison Blanche, le marché américain risque de se fermer un peu plus comme débouché pour la production chinoise. Un économiste de Nomura cité par l’AFP estime ainsi que « l’ampleur des mesures de relance budgétaire (…) pourrait être de 10 à 20 % supérieure en cas de victoire de Trump », même si les principaux défis auxquels font face les autorités de Pékin sont en Chine, et non pas à l’étranger.
Pour beaucoup d’entreprises françaises opérant en Chine et touchées par le ralentissement de la consommation (véhicules thermiques, luxe, cosmétique, Vins & spiritueux, biens de consommation divers…), l’enjeu est donc loin d’être négligeable. A suivre…
C.G