Le retour de l’Argentine sur le marché mondial du blé n’est pas une bonne nouvelle pour la France. Et ce, à un double titre : d’abord, parce que l’offre est déjà supérieure à la demande, ensuite, parce que, malgré la baisse des prix, cette demande ne repart pas. L’abandon par Buenos Aires de ses taxes à l’exportation de blé ne va rien arranger.
L’Argentine vient ainsi d’engranger sa première vente depuis octobre 2012 auprès de l’Autorité générale de l’approvisionnement en produits de base (Gasc) en Égypte. Il s’agissait d’un blé à 11,5 % de taux de protéines, livré avec un fret particulièrement attractif à 15,4 dollars la tonne. De fait, remarque-t-on chez FranceAgrimer, « à la faiblesse des prix FOB (Free on board) que l’Argentine est désormais en mesure de proposer, s’ajoute l’aide du taux de fret ».
De façon concrète, le 23 décembre dernier, le pays latino américain a remporté auprès du Gasc un appel d’offres de 120 000 tonnes. « En définitive, on risque de perdre à la fois sur l’Égypte et l’Asie du Sud-est, mais savoir dans quelle proportion sur les deux destinations est difficile. Cela dépendra notamment des qualités qui seront offertes par les Argentins », confiait ainsi Ludovic Pâris, délégué des filières Grandes cultures de FranceAgrimer, à l’issue d’une conférence de presse, le 13 janvier.
Une production argentine dégradée par la météo
« Normalement, l’Argentine propose une marchandise à taux de protéine de 12,5 %, mais, cette année, elle va être présente sur différentes qualités, car la production a été dégradée par la météo, a expliqué Olivia Lamer (notre photo), responsable de l’unité Grandes cultures de FranceAgrimer. En fait, peut-être 50 % de la récolte pourrait présenter un bas niveau de protéine et nourrir une offre fourragère. Sans compter la livraison éventuelle de l’ancienne récolte argentine encore sur le marché intérieur, aujourd’hui mal conservée dans les silos bags (poches plastique) ». Entre différentes qualités (12,5 %, 11,5 %, 10,5 %), les écarts de prix, au demeurant grandissants, peuvent être significatifs en atteignant jusqu’à 50 dollars par tonne.
Un certain nombre d’opérateurs de l’Hexagone stockent, en attendant que les prix remontent. Mais jusqu’à aujourd’hui en vain. La production mondiale de blé a augmenté de 14 % pendant la dernière décennie.
Pour corser l’affaire, le Gasc et le ministre égyptien de l’Agriculture semblent aux prises à des luttes de territoire, qui aboutissent à de nouvelles contraintes auxquelles il va bien falloir s’adapter : paiement à trois mois, abaissement du seuil d’ergot à zéro. Heureusement pour la France, le Maghreb est moins compliqué, « les contraintes en matière de qualité sont moins fortes et l’Algérie demeure pour nous un débouché privilégié », a pointé Rémi Haquin, président du Conseil spécialisé Céréales de FranceAgrimer.
Une autre destination génère l’intérêt des Français, l’Iran. A priori, la qualité demandée serait un produit à un taux de protéine au minium de 12,5 %.
François Pargny