Malgré la mobilisation sociale de
juin dernier au Brésil et le ralentissement de la première économie d’Amérique
du Sud, l’Office national de Ducroire (ONDD), dans son dernier rapport sur ce pays,
a décidé de ne pas dégrader la note sur le risque souverain.
Ainsi, s’agissant du risque
commercial, le Brésil figurait déjà dans la catégorie la plus risquée (C), ce
qui s’explique, écrit Sebastian Vanderlinden, analyste risque pays, par
« les taux d’intérêt en vigueur élevés, la dépréciation récente du real et
l’environnement des affaires difficile ». En ce qui concerne le risque
politique, pas de changement non plus : à court terme, le Brésil présente
un risque limité, « du fait de sa position solide en matière de
liquidités, avec seulement le taux de la dette par rapport aux exportations
modérément haut », ce qui justifie le maintien de la note à 2 (sur une
échelle qui en compte 7).
A moyen terme, ce pays est classé
en catégorie 3, les principales préoccupations de l’ONDD concernant « la
faiblesse des taux d’épargne et d’investissement et le ratio relativement élevé
de la dette extérieure par rapport aux exportations ».
Un cadre monétaire et fiscal fort
« Nous sommes attentifs,
mais la situation ne justifie pas un changement de notre part. Le Brésil s’est
doté d’un cadre fiscal et monétaire fort. Et cela ne va pas disparaître du jour
au lendemain, même si un nouveau pouvoir devait se mettre en place, après
l’échéance présidentielle d’octobre 2014 », explique à www.lemoci.com Sebastian Vanderlinden.
En fait,
l’assureur-crédit belge ne croit pas à une défaite de la présidente Dilma
Rousseff (notre photo), qui dirige le pays depuis janvier
2011. « Les principales figures de l’opposition, tel que Aécio Neves du
principal parti d’opposition PSDB (Parti social démocrate brésilien) et
l’ancien ministre de l’Environnement Marina Silva, semblent incapables de tirer
un bénéfice réel des contestations ».
C’est la classe moyenne
émergente – représentant 53 % de la population, au lieu de seulement 32 %
en 2002 – qui est descendue dans la rue pour demander de meilleurs services
publics et protester contre la corruption. Or, parallèlement, la croissance
économique est en panne. Alors que ce grand pays phare des Bric (Brésil, Russie,
Inde, Chine) avait annoncé en début d’année une croissance de son produit
intérieur brut de 3 %, le ministre des Finances Guido Mantega a reconnu
récemment que la hausse du PIB plafonnerait à 2,5 % en 2013, « un chiffre
qui fait maintenant consensus », précise Sebastian Vanderlinden.
L’inflation dépasse les 6 %
En fait, la confiance des consommateurs
est peu à peu sapée par les hausses de prix. L’inflation est élevée, supérieure
à 6 %. Or, c’est la consommation qui a soutenu l’économie jusqu’à présent,
l’ancien président, Luiz Inácio Lula da Silva, sous son double
mandat (2003-2011), ayant favorisé le crédit et engagé des mesures de
redistribution aux plus pauvres. Autre inquiétude, la mauvaise conjoncture
internationale, caractérisée par une baisse de la croissance en Chine et une
demande modérée aux États-Unis et dans la zone euro.
Ayant déjà subi
une dépréciation de sa monnaie face au dollar américain et pour anticiper,
comme d’autres pays émergents (Turquie, Inde…), l’arrêt des injections massives
de liquidités pratiquées par la Banque centrale américaine pour soutenir la
croissance des États-Unis, le Brésil a décidé de défendre sa monnaie.
« Introduire des réformes
structurelles »
La Banque centrale
brésilienne va mobiliser quelque 55 milliards de dollars d’ici à la fin
d’année. « Les marchés financiers internationaux semblent apprécier le
signal politique ainsi donné, considérant qu’une approche visant à combattre la
volatilité des taux de change est particulièrement adaptée à leurs besoins et
donc à ceux des entreprises », commente Sebastian Vanderlinden.
Pour de multiples
raisons (infrastructures déficientes,
impôts élevés, accès difficile au crédit…), pendant de nombreuses années,
l’investissement a été à la
traîne. Il faut maintenant « un coup de pouce correspondant
à une mobilisation de l’épargne intérieure », affirme Sebastian
Vanderlinden. Et de préciser « l’énorme défi » qui
« consiste à introduire des réformes structurelles pour soutenir la
compétitivité, comme la réduction des impôts et la mise
en place de concessions dans les
infrastructures, tout en respectant la discipline
budgétaire ».
François Pargny