Les ventes de voitures électriques en Europe ont bondi de 53,8 % au cours du premier semestre selon l’Association des constructeurs européens. Ces derniers s’inquiètent de la concurrence des marques chinoises et des restrictions d’exportations de métaux critiques imposées par Pékin.
En juin dernier, il s’est vendu pour la première fois plus de voitures électriques que de diesel et leur part de marché atteint désormais 15,1 %, contre 10,7 % il y a un an. Sur ce seul mois, les ventes ont littéralement explosé aux Pays-Bas (+ 90,1 %), en Allemagne (+ 64,4 %) et en France (+ 52 %). Sur les six premiers mois de l’année, 703 586 véhicules particuliers propres ont trouvé preneur, soit une hausse de 53,8 %. A l’évidence, les automobilistes anticipent l’interdiction des ventes de véhicules neufs à motorisation thermique en 2035, annoncée par l’Union européenne à l’automne dernier.
Sur ce marché en plein essor, Tesla, la marque d’Elon Musk, arrive en tête avec 137 000 unités, soit 20 % des ventes en Europe, grâce à une politique très agressive sur les prix. Celui de son modèle d’entrée de gamme, la Model 3, par exemple, a dégringolé de 16 500 euros depuis le début de l’année avec une première baisse de 8 500 euros en janvier (la rendant éligible au bonus écologique de 5 000 euros) et un nouveau coup de rabot de 3 000 euros en avril.
Deux modèles français dans le top 10
Au premier trimestre 2023, c’est la Model Y qui est arrivée en tête du top 10 des ventes enregistrant un bon de 173 % en glissement annuel, à 71 683 unités. Viennent ensuite la Model 3, les Volkswagen ID.3 et ID.4, la Dacia Spring, la Volvo XC40 Recharge, la Fiat 500 Electrique, la Peugeot e-208, la MG4 et la Megane E-Tech. La marque au losange a fait le Paris du « fabriqué en France » pour ses modèles électriques en lançant en 2021 sa filiale ElectriCity qui regroupe les sites industriels de Douai, Maubeuge et Ruitz où sont fabriquées la Mégane, la Zoé ainsi que la Kangoo E-Tech.
Hors Europe, le constructeur tricolore et Nissan ont jeté leur dévolu sur l’Inde où il vend déjà quelque 100 000 véhicules thermiques par an dont la Kwid, également produite au Brésil. L’alliance ambitionne de lancer à Chennai la production de quatre SUV et deux citadines pour le marché indien et également pour l’export. L’Inde est actuellement l’objet de toutes les convoitises.
Inquiétudes sur l’approvisionnement en métaux critiques
Après un premier coup d’épée dans l’eau en 2022, Tesla souhaite y ouvrir prochainement une usine capable de produire 500 000 véhicules par an pour le marché local et ceux de la région indo-pacifique. Selon une information publiée mi-juillet par le Times of India, Elon Musk serait entré en négociations avec le gouvernement indien pour préciser ce projet d’investissement.
Si l’explosion des ventes en Europe constitue une bonne nouvelle pour les constructeurs après une période de vache maigre en raison de la crise sanitaire, les industriels européens se disent en revanche inquiets de la récente décision de Pékin de réduire les ventes internationales de gallium et de germanium qui font l’objet de licences d’exportation depuis le 1er août. Ces deux métaux sont en effet indispensables à la production de semi-conducteurs et à l’électronique de puissance des véhicules. Sans parler de la concurrence des marques chinoises et de leurs véhicules électriques à bas coût.
Les marques chinoises à l’assaut du marché européen
Toutes motorisations confondues, la Chine est devenue est 2022 le deuxième exportateur mondial juste derrière le Japon et devant l’Allemagne avec des ventes internationales en hausse de 54 %, à 3,11 millions d’unités, selon l’Association chinoise des constructeurs automobiles (CAAM). Sur les six premiers mois de 2023, elle a exporté 2,14 millions de voitures, dont 534 000 véhicules propres. Ce dernier segment (regroupant hydrides et 100 % électriques) s’est envolé de 160 % en glissement annuel. A 70 %, ces voitures électriques prennent la direction de l’Europe, principalement le Royaume-Uni et la Belgique.
BYD, constructeur spécialisé dans l’électrique a vendu en 2022 81 000 voitures à l’étranger, enregistrant une hausse de 1060 %. Les exportations de Chery ont quant à elle bondi de 170 % et les modèles de SAIC bénéficient d’une bonne dynamique au Mexique, en Australie et au Royaume-Uni. Les importations de voitures électriques chinoises ont beau être taxées de 10 % à leur entrée sur le marché unique européen, leurs bas prix séduisent des consommateurs qui se débattent toujours avec une inflation élevée.
Début juillet, Jean-Dominique Senard, le président de Renaut évoquait au cours d’un entretien avec l’agence Reuters début juillet « un orage chinois ». « Quand je parle d’orage chinois, je parle de la forte pression aujourd’hui des importations de véhicules chinois en Europe qui se fait au moment où nous parlons, a déclaré le dirigeant. On est capable de faire des véhicules électriques, mais on est en train de se battre pour assurer la sécurité de nos approvisionnements. »
Sophie Creusillet