Encore utopique il y a quelques années, la voiture autonome passe la vitesse supérieure à l’ère des objets connectés et trace sa route lentement, certes, mais sûrement dans l’industrie automobile. La conduite autonome est un marché estimé à plus de 500 milliards d’euros à horizon 2035 que se disputent constructeurs et équipementiers. C’est ce que révèle le cabinet international de conseil en stratégie A.T. Kearney, qui a dévoilé le 3 septembre, à Paris, en avant première mondiale son étude relative à la voiture autonome intitulée « Roadmap towards Autonomous Driving ».
Équipée de capteurs numériques (caméra, radar…) et de systèmes d’assistance à la conduite, la voiture autonome est capable de rouler automatiquement et en toute autonomie, sans conducteur à bord. Elle devrait réduire la consommation de carburant et donc les émissions de CO2 grâce à une conduite plus économe car plus efficace que l’humain. Ces véhicules pourront conduire de manière autonome dans les embouteillages, c’est-à-dire que lorsque la voiture détectera une file dans les embouteillages, le conducteur aura la possibilité de lâcher le volant et les pédales. La voiture se déplacera alors de manière totalement autonome dans la circulation en suivant les files.
Ces véhicules innovants devraient également réduire les accidents de la route en contrôlant les excès de vitesse ou encore en détectant les dangers dans leur environnement. Les trajets deviendront ainsi plus sûrs. Enfin, grâce aux différentes applications numériques, les trajets seront plus agréables pour le conducteur qui pourra se divertir en écoutant de la musique via diverses applications (Deezer, iTunes…) ou en faisant des achats en ligne.
« La voiture autonome, c’est la vision du futur. Mais ce marché se fera étape par étape », a déclaré lors de la présentation de l’étude Rémi Cornubert, partner au bureau parisien d’A.T. Kearney France et spécialiste du secteur automobile. Face à une population mondiale urbaine croissante, les villes sont de plus en plus congestionnées et les automobilistes passent de plus en plus de temps dans les embouteillages. Les conducteurs de voitures autonomes pourront consulter leurs emails ou faire des achats en ligne. Les embouteillages ne seront plus considérés comme une perte de temps.
Dans une première phase, la technologie intégrée dans les véhicules permettra de sécuriser certaines phases de conduite comme les situations d’embouteillage sur voies rapides et les manœuvres de parking. Dans une deuxième phase, les fonctions de conduite autonome ne nécessiteront plus d’interaction avec le conducteur. Le véhicule pourra évoluer seul, avec une délégation de conduite plus étendue, mais l’automobiliste devra toujours rester en mesure de reprendre la main à tout moment si le véhicule lui demande.
La commercialisation à grande échelle des voitures « totalement autonomes » reste, elle, encore freinée par le cadre législatif. La convention de Vienne sur la circulation routière exige en effet que le conducteur garde les mains sur le volant du véhicule.
« On va évoluer vers une conduite qui sera automatisée partiellement puis totalement », a expliqué Rémi Cornubert. À horizon 2020, la conduite sera fortement automatisée. « Les véhicules pourront conduire de manière autonome dans les embouteillages », a-t-il illustré. C’est-à-dire que lorsque le véhicule détectera une file dans les embouteillages, le conducteur pourra lâcher le volant et les pédales. La voiture se déplacera de manière totalement autonome dans la circulation en suivant les files. Mais il faudra patienter vingt ans, à horizon 2035 pour parler de « véhicule complètement automatisé », a précisé Rémi Cornubert. « C’est un marché, a-t-il prévenu, qui va être en très forte croissance ». Le marché de la voiture autonome devrait représenter plus de 500 milliards d’euros en 2035.
Quels sont les principaux fournisseurs sur le marché ?
« La Californie s’est positionnée comme le hub naturel de la voiture autonome », a indiqué l’associé du cabinet de conseil. Avec 37 millions d’habitants, la Californie est l’un des États le plus peuplé des États-Unis. Elle est également celui doté du réseau autoroutier le plus dense du pays lequel a la réputation d’être souvent embouteillé. La plupart des acteurs traditionnels de la voiture autonomes sont nés dans cet État, qui s’est engagé à limiter les émissions de gaz à effet de serre avec de nombreuses mesures prises en ce sens.
Baptisée Google car, la première voiture autonome a vu le jour dans la Silicon Valley où est implantée sa maison-mère, créatrice du célèbre moteur de recherche du même nom. Le constructeur de voitures électriques Tesla, originaire de Palo Alto, est lui aussi entré sur ce marché de demain en ajoutant des systèmes d’aide à la conduite sur ses véhicules électriques.
Outre-Rhin, les constructeurs travaillent sur des projets de voiture autonome et s’associent à des équipementiers automobiles chargés de construire les composants nécessaires à l’installation du système de conduite autonome. Mercedes-Benz a ainsi noué un partenariat avec Bosch et BMW s’est associé à Continental.
Les Français ne sont pas en reste et ont une carte à jouer. Côté constructeur, Renault devrait commercialiser ses premières voitures sans conducteur à horizon 2020. À partir de 2018, PSA Peugeot Citroën proposera à ses clients des véhicules équipés de fonctions de conduite autonome, sous surveillance du conducteur. Celui-ci devra conserver la maîtrise de la conduite de manière permanente afin de pouvoir reprendre la main à tout moment. Côté équipementier, un acteur se distingue, Valeo, spécialiste des systèmes d’assistance à la conduite active.
Émergence de nouveaux acteurs
« C’est un écosystème en pleine évolution », a souligné Rémi Cornubert. En effet, les constructeurs et équipementiers automobiles traditionnels (Audi, Bosch, Renault-Nissan, Valeo…) ne sont pas les seuls acteurs concernés par le marché de la conduite autonome. Des fabricants de produits hight tech tels que les géants américains Google et Apple, des fournisseurs de logiciels (Microsoft), de services en ligne (Deezer) veulent se positionner.
« Les fournisseurs de logiciels auront des marges beaucoup plus élevées car ce sont eux qui fournissent la valeur ajoutée », faisait remarquer Rémi Cornubert. C’est pour cela que les acteurs traditionnels doivent se positionner les premiers sur ce marché. Le véritable enjeu entre constructeurs et nouveaux entrants se situe là. Dans une industrie à faible marge comme l’automobile, les constructeurs et équipementiers courent le risque de laisser les revenus à haute valeur ajoutée aux nouveaux entrants s’ils ne sont pas vigilants.
S’agissant des acheteurs, les Chinois, qui démontrent un intérêt plus grand pour la conduite autonome et dont la classe aisée a l’habitude des voitures avec chauffeur, pourraient constitués de potentiels clients. En Allemagne, patrie de l’automobile, les clients sont eux plus septiques.
« Il y a un vrai marché. C’est un marché en pleine croissance qui va devenir grand. Cette révolution va rebattre les cartes avec des nouveaux acteurs qui se positionneront. Les acteurs traditionnels doivent donc être les premiers à se positionner », a conclu Rémi Cornubert.
Venice Affre