L’entreprise française ne se porterait pas si mal. Bien au contraire, si l’on croit Business France, qui vient de publier la première édition du « Tableau de bord de l’entrepreneuriat », une analyse comparée des tendances de l’entreprenariat au sein de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Dans un communiqué du 8 février, l’agence publique, qui, outre le soutien à l’export, est en charge de l’attraction des investissements étrangers, va même jusqu’à qualifier la France de « nouvel eldorado pour des entrepreneurs ».
A l’appui de cette campagne, quatre arguments qui se fondent sur les récentes tendances de la création d’entreprise et du financement dans l’Hexagone.
Capital-risque : la France, numéro un pour la levée de fonds
1- La France, avec 550 000 nouvelles entreprises tous les ans, tous statuts confondus, est devenue la première « productrice » de startups en Europe.
2- La création d’entreprises y est forte et les défaillances sont en baisse. Le taux de création est « parmi les plus élevés en Europe » et le taux de disparition « parmi les plus faibles », se félicite Christophe Lecourtier, le directeur général de Business France. De façon concrète, avec un taux de création d’entreprise* de 9,4 % en 2015, l’Hexagone occupe le quatrième rang, après le Royaume-Uni (14,8 %), la Pologne (12,1 %) et juste derrière les Pays-Bas (9,7 %).
En 2015, Eurostat recense 328 884 créations d’entreprise en France dans l’industrie et les services marchands, ce qui est « 4,3 % de moins qu’au Royaume-Uni et 17,8 % de plus qu’en Italie », remarque Business France. Enfin, relève l’agence, « en 2015, la France présente un taux de disparition des entreprises parmi les plus faibles** avec 5,3 %, derrière l’Irlande (2 %) et la Belgique (3 %) ».
3- Le coût du financement est bas et les startups trouvent des fonds dans l’Hexagone. Pendant les huit premiers mois de 2017, d’après les fonds Dealroom (Fundraising by European venture capital funds), pour la première fois, la France est devenue la première nation européenne pour la levée de fonds en capital-risque. Les sociétés françaises de capital-risque auraient ainsi levé 2,7 milliards d’euros, soit neuf fois plus qu’en 2014 (0,3 Md€), un montant, au demeurant, supérieur aux levées de fonds des concurrentes britanniques (2,3 Md€) et allemandes (1,1 Md€).
4- La France reçoit de nombreux investissements étrangers. Ainsi, d’’après Eurostat, elle est en 2015 le premier pays d’accueil de filiales étrangères en Europe, avec plus de 28 000 unités recensées, contre 27 700 en Allemagne et 22 200 au Royaume-Uni.
Un bémol toutefois, le communiqué de presse de Business France est muet sur deux points essentiels moins favorables, pourtant largement traités dans ce premier Tableau de bord de l’entrepreneuriat : l’export et le taux de marge.
La faible part des PME et TPE à l’export
Ce n’est pas une surprise : la part de PME et ETI à l’export est faible. Si on s’en tient aux données de l’Insee, les PME et TPE constituent plus de 95 % des entreprises exportatrices françaises mais ne réalisent que 14 % des montants exportés en 2016 et les ETI représentent 4 % en nombre et 32 % du montant exportations, alors que les grandes entreprises (seulement 0,4 % du total des sociétés) représentent, à elles seules, une part de 54 %.
Toutefois, selon l’OCDE*** en valeur, 45,2 % des exportations françaises sont issues des PME en 2014, un chiffre supérieur à celui de l’Allemagne (25 %) et du Royaume–Uni (35,5 %), mais moins élevé qu’en Espagne (47,9 %) ou en Italie (53,9 %) ». Une proportion qui, néanmoins, a tendance à se réduire dès l’année suivante en raison du poids croissant du secteur aéronautique. Ainsi, en 2015, la part des PME dans les exportations françaises n’est plus que de 32 %, une part comparable à celle de l’Allemagne (33 %).
De fait, pointe Business France, « la France se distingue par une part de marché de 16 % dans les exportations mondiales du secteur de l’industrie aérospatiale. C’est la première place parmi les pays européens. Elle est également bien placée en ce qui concerne les exportations de l’industrie pharmaceutique, avec 5,9 % de parts de marché mondial ».
Un motif de satisfaction et d’espoir pour l’avenir : en Europe, pour le rapport produits de haute technologie sur exportations totales, la France, avec un peu plus de 21,6 %, est numéro deux en Europe, après l’Irlande, avec 24 %, devançant ainsi les Pays-Bas (20 %), le Royaume-Uni (16,7 %) et l’Allemagne (14,8 %).
Un faible taux de marge, malgré le CICE
Le taux de marge des entreprises****est mauvais. Certes, Business France estime que les comparaisons en la matière sont difficiles. Il n’en reste pas moins que ce taux, même s’il a progressé de 1,3 % en 2015 grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), est le plus faible de tous, d’après Eurostat, qui prend en compte l’industrie, la construction et les services, à l’exception des activités financières et d’assurance. De façon concrète, il atteint 26,6 %, soit environ 40 points de moins par rapport à l’Irlande et 10 points par rapport à l’Allemagne.
D’après Eurostat, globalement la France possède 2,9 millions d’entreprises et n’est ainsi devancée que par l’Italie, avec 3,7 millions de sociétés, l’Espagne (2,5 millions) et l’Allemagne (2,4 millions) suivant. Toutefois, quand l’Allemagne enregistre 34 % de son chiffre d’affaires dans l’industrie, cette part n’est que de 24 % en France, la Pologne, l’Italie et même l’Espagne étant au-dessus, avec respectivement 31 % pour les deux premiers et 26 % pour le troisième.
La France peut se consoler en mettant en avant sa main d’œuvre « particulièrement productive », note Business France. Elle est ainsi numéro quatre pour la productivité du travail tant par personne en France, avec 99 543 dollars, que par heure travaillée, avec 68,3 dollars, dans le premier cas, derrière l’Irlande, la Belgique et la Suède, dans le second cas, après l’Irlande, la Belgique et les Pays-Bas.
François Pargny
* Nombre d’entreprises créées / population totale des entreprises.
** Nombre de cessations d’activité / population totale des entreprises.
*** Entreprises dont les effectifs sont compris entre 1 et 250 employés.
**** Excédent brut d’exploitation / valeur ajoutée aux coûts des facteurs.
Pour prolonger :
Lire dans notre numéro spécial Palmarès 2017 des PME et ETI leaders à l’international : 200 000 exportateurs en 2022 : enquête sur un défi français