Victime de son succès et sans doute aussi d’utilisateurs un peu trop opportunistes, l’assurance prospection (AP) a couté trop cher à l’État en 2013 et devrait faire l’objet de restrictions. Les professionnels sont montés au créneau pour éviter un « rabotage » trop peu ciblé à leur goût.
Entre les mesures de simplification et la relance de la diffusion de cet instrument phare du soutien des PME à l’export, le nombre d’entreprises bénéficiaires de l’assurance prospection (AP) a considérablement augmenté ces cinq dernières années. Mais en parallèle, le nombre d’échecs des prospections, et donc les sommes non remboursées par les bénéficiaires à l’État ont « doublé » entre 2009 et 2013. Résultat : de 50 millions d’euros en 2009, le coût final de l’AP pour les finances publiques est passé à 120 millions l’an dernier, soit une zone d’autant plus rouge pour Bercy que l’AP pourrait être, si ce niveau de perte devait perdurer, considérée comme une subvention cachée par Bruxelles. D’où un train de restrictions proposé par la DG Trésor, qui touche aux quotités (pourcentage du budget de prospection pris en charge) et au plafonnement des frais couverts : suppression des « coups de pouces » aux sociétés innovantes avec des quotités garanties ramenées à 65 % (au lieu de 75 %), soit le taux normal ; baisse du montant forfaitaire des frais de mission couverts de 300 à 200 euros par jour ; réduction de 75 à 50 % du plafond des dépenses de conseils et d’études externes pouvant être couvertes ; plafonnement à 10 % du chiffre d’affaires des sociétés bénéficiaires du montant éligible pour l’A3P (assurance prospection premiers pas, réservée aux TPE), avec toujours un montant de prise en charge plafonné à 30 000 euros.
Révélé par La Lettre confidentielle du Moci* en mai dernier, ce projet a provoqué un certain remous dans les fédérations professionnelles : cette décision a été prise en effet par les anciens ministres de l’Économie et des finances et du Commerce extérieur, Pierre Moscovici et Nicole Bricq, juste avant le remaniement ministériel d’avril, sans consultation avec les entreprises. CGPME, Medef, OSCI (Opérateurs spécialisés du commerce international), qui ont des contre-propositions, ont obtenu d’être entendus par les nouveaux ministres à Bercy, avec les encouragements du quai d’Orsay. À l’heure où nous mettons sous presse, le 16 juin, Coface n’a toujours pas modifié la documentation sur l’AP en ligne sur son site Internet, dans sa rubrique « Garanties publiques ». Si la rationalisation est certaine, les modalités finales pourraient tenir compte des attentes des entreprises.
Christine Gilguy
* Voir les numéros 100, 101, 102 et 104 de La Lettre confidentielle sur notre site Internet en suivant l’URL : http://www. www.lemoci.com/32-lettre-confidentielle.htmv
Cautions à l’export : les assureurs-crédits ont de l’appétit
Taux de croissance de + 70 % en 2013, et probablement autant en 2014, près de 1,9 milliard d’engagements : chez Euler Hermes France, l’activité caution est en plein boom, tirée par l’expansion internationale des sociétés qui soumissionnent à des appels d’offres à l’étranger. Le service dédié a recruté trois personnes l’an dernier, portant son effectif à huit.
« Il y a quelques années, c’était une activité essentiellement assurée par les banques car elles disposaient de réseaux à l’étranger. Comme il y a un tassement du marché bancaire, les entreprises se tournent vers les assureurs », indiquait Gille Goaoc, directeur de l’activité cautions et garanties chez EH France, lors d’une présentation le 19 mai dernier. En 2008, lors de sa création, ce service travaillait à 100 % sur le marché français : aujourd’hui, la part de l’international atteint 50 % !
C’est que les besoins croissent au fur et à mesure que les entreprises se tournent vers les marchés internationaux, où l’exigence de cautions par les donneurs d’ordre est devenue systématique : « Ce n’est pas un marché de confort, attestait le responsable. Pas de caution, pas de contrat, en particulier à l’export ». Les grands groupes de BTP ou de services, qui ont besoin de lignes de cautions de plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros, ne sont pas les seuls concernés. Chez EH France, il est arrivé d’organiser des « petites » syndications de lignes de cautions de l’ordre de 3 millions d’euros.
Caution de soumission, caution de bonne fin, caution de retenue de garantie, caution de restitution d’acomptes, garantie de paiement des sous-traitants… Sur certains contrats remportés dans le cadre d’appels d’offres, les cautions fournies par les soumissionnaires peuvent atteindre jusqu’à 50 % du montant d’un contrat. En outre, les garants doivent être de tout premier ordre : noté A pour les assureurs, banques de 1er rang pour les banquiers. Les assureur-crédits, en particulier ceux qui disposent de réseaux internationaux, sont bien positionnés pour fournir leurs propres clients, mais aussi intervenir en réassurance de banques ou de pools bancaires.
EH France est d’autant plus offensif sur ce marché qu’il s’appuie sur la trentaine de bureaux à l’étranger que comptent, à eux deux, Euler Hermes et sa maison mère Allianz : les plus récemment ouverts cette année l’on été en Turquie et en Australie. Car, c’est une autre tendance lourde de ce marché à l’international : les donneurs d’ordres exigent de plus en plus que le garant soit un acteur local, par exemple au Moyen orient, en Afrique et en Amérique du sud, voire, plus proche de nous, en Angleterre…
C. G.