Sans surprise, les trois grands groupes qui dominent depuis des années le marché français privé de l’assurance-crédit court terme, y compris à l’export, sont aussi les trois premiers mondiaux. Ils sont tous d’origine européenne. Alors que tous ont dû procéder à des travaux internes pour mettre en conformité leur modèle de gestion des risques et le niveau de leur fonds propres aux nouvelles règles prudentielles dites de « Solvabilité II » -ce qu’ils ont tous fait avec succès selon leur communiqués de presse-, leurs principaux résultats financiers, présentés ces dernières semaines, confortent une hiérarchie qui ne varie pas depuis plusieurs années.
Numéro 1 : Euler Hermes
L’assureur-crédit d’origine allemande (groupe Allianz) reste le numéro 1 mondial de l’assurance-crédit par le chiffre d’affaires des primes, position qu’il tient depuis plusieurs années. En 2015, son chiffre d’affaires consolidé a atteint 2638 millions d’euros (M EUR) en 2015, en hausse de 4,4 %, dont 2205,4 M EUR en primes brutes acquises (+3,7 %) et 432,9 M EUR en prestations de services (+ 7,9 %). Son résultat net (part du groupe) est resté stable à 302,5 M EUR (+0,1 %), dans un environnement marqué par les turbulences de la chute des prix des matières premières et du ralentissement des pays émergents, avec en contrepartie, une augmentation des défaillances d’entreprises. Le taux de sinistralité progresse à 53,3 % (48,8 % en 2014) et le ratio combiné net s’établit à 80,1 % (après 75,4 %).
Par grande région, ce sont les marché émergents qui ont tiré la croissance de l’activité d’Euler Hermes : le chiffre d’affaires a ainsi été en retrait dans ses plus gros marchés européens ( -1 % à 751,9 M EUR dans l’ensemble Allemagne-Autriche-Suisse, – 1,8 % à 391,8 M EUR en France) ou en légère progression (+1 ,2 % en Europe du Nord à 557,5 M EUR). La croissance a été beaucoup plus dynamique dans la zone Méditerranée-Moyen-orient-Afrique (+6,7 % à 344,2 M EUR), sur les marchés américains (+ 22,5 % à 326,5 M EUR) et en Asie Pacifique (+ 32,4 % à 143,3 M EUR).
Pour 2016, la prudence et la rigueur sont de mise : « la volatilité et l’incertitude constante des marchés exigeront une plus grande sélectivité et encore plus de prudence dans notre approche commerciale », indique le groupe qui promet ainsi « discipline tant dans la tarification de nos polices que dans la souscription des risques, tout en continuant à fournir un service de qualité à nos clients ».
Numéro 2 : Atradius
L’assureur-crédit d’origine espagnole (Grupo Catalana Occidente, GCO) a réalisé un chiffre d’affaires consolidé de 1717,8 M EUR en 2015, dont 1537 M EUR en primes d’assurance, en progression de 5,4 %, et 180,8 M EUR en services (+6,9 %). Selon son communiqué, sa progression a été alimentée par « toutes les régions du monde à l’exception de la région du Nord, qui a été affectée par les prix de l’énergie et la demande réduite à l’export ». Le chiffre d’affaires assurance a néanmoins progressé en Europe (+ 3,4 %), et notamment dans ses deux plus importants marchés que sont l’Espagne (+2,5 %) et l’Allemagne (+3,2 %), mais la progression a été double (+6,6 %) « en dehors de ces deux marchés ».
Le bénéficie net est de 178,2 M EUR, en hausse de 10,6 %, et le ratio combiné brut atteint 80,6 %. Dans l’assurance, le taux de sinistralité s’établit à 43,6 %.
La priorité 2016 affichée par son P-dg Isidoro Unda : « poursuivre l’enrichissement de son offre en innovant, et optimiser sa structure d’entreprise afin d’améliorer son efficacité ».
Numéro 3 : Coface
L’assureur-crédit français, qui a fait son retour en Bourse l’an dernier après avoir opéré un recentrage drastique sur l’assurance-crédit, a vu son chiffre d’affaires consolidé progresser de 3,4 % (+1,2 % à périmètre et change constants) à 1489 M EUR, dont 1185,9 M EUR en primes brutes acquises (+ 2 %). Selon le groupe, cette croissance a été portée par les pays émergents. « Aux États-Unis, la réorganisation du réseau d’agents sur l’ensemble du territoire américain explique la performance en retrait », explique le groupe dans un communiqué, alors que « dans les marchés matures, plus rentables, la concurrence reste vive et pèse sur les prix ».
De fait, en Europe, le chiffre d’affaires de Coface est plutôt en retrait (-1 % en Europe de l’Ouest à 457,2 M EUR, – 4,9 % en Europe du Nord à 334,9 M EUR), alors qu’il progresse de seulement 1,4 % en Europe centrale (114,9 M EUR) et de 15,4 % en Amérique du Nord (131,3 M EUR). Il connaît des taux de progression plus soutenus en Méditerranée et Afrique (+8,8 % à 246,4 M EUR), en Asie Pacifique (+25 % à 121,3 M EUR) et en Amérique latine (+9,6 % à 83,5 M EUR).
Son résultat net (part du groupe) a été de 126,2 M EUR, en hausse modérée de 1 %, et le ratio combiné net de réassurance s’affiche à 83,1 % (après 79,7 % en 2014). Le taux de sinistralité s’est établi à 52,5 % (50,4 % en 2014).
Alors que l’année 2016 va être historique pour Coface avec le transfert de la gestion des garanties publiques export (assurance-crédit, cautions, et autres mécanismes de soutien à l’export) à la banque publique Bpifrance, au sein d’une nouvelle structure dénommée Bpifrance assurance export, les priorités affichées par son nouveau directeur général, Xavier Durand : poursuite des ajustements « de nos expositions » au risque chaque fois que nécessaire ; amélioration de « l’efficacité opérationnelle » ; et « trouver des leviers et dégager les moyens qui permettront d’insuffler une nouvelle dynamique commerciale ».
Si ces groupes sont incontournables, les exportateurs ne devront pas toutefois négliger les acteurs locaux et les « challengers » qui, à l’instar du Belge Credendo ou du LLoyd’s de Londres, peuvent fournir des solutions privées intéressantes pour couvrir des risques financiers export.
Christine Gilguy