L’indicateur Export Credit Business Confidence de l’Union de Berne*, baromètre de conjoncture issu d’une enquête trimestrielle auprès de ses membres assureurs-crédit et agences publiques de crédit export (ECAs pour le sigle anglais) est un bon thermomètre du climat des affaires à l’exportation. Sans surprise, les signes d’inquiétude se multiplient au troisième trimestre 2022, avec une baisse de l’appétit pour les risques export, selon les résultats publiés le 25 août**.
Première source de pessimisme pour les assureurs et ECAs : un environnement mondial des risques pesant sur les crédits ou les investissements qui se dégrade.
Les conséquences de la pandémie de Covid-19 « n’ont été qu’exacerbés par la guerre Russie-Ukraine, avec des perturbations les chaînes d’approvisionnement, les pénuries de main-d’œuvre et l’inflation des prix – en particulier dans l’alimentation et l’énergie – aggravant la pression sur aussi bien les entreprises que les gouvernements » résume la note de l’Union de Berne. « Les hausses de taux d’intérêt se traduisent par des coûts d’emprunt plus élevés, ce qui, avec des prix élevés, freine potentiellement à la fois la demande à court terme et les investissements à plus long terme ».
De fait, les commandes de l’industrie manufacturière à l’export, un des principaux moteurs du marché de l’assurance-crédit export, sont en repli dans le baromètre : elles « baissent chaque mois depuis mars 2022 », relève la note. S’y ajoute l’augmentation continue des faillites d’entreprises dans le monde depuis le début de l’année tandis que les risques de « défauts souverains semblent également de plus en plus probables ». Une allusion aux difficultés de remboursement de dettes publiques auxquels sont confrontés un certain nombre de pays émergents face à l’inflation et à l’augmentation des taux d’intérêt.
La demande globale d’assurance-crédit à l’exportation reste « forte »
Malgré ces sombres perspectives, « ou peut-être en partie à cause d’elles » remarque la note, la demande globale d’assurance-crédit à l’exportation reste « forte » selon l’indicateur. Le moteur de cette demande ? Des exportateurs et investisseurs craignant une montée des risques d’impayés, mais aussi « l’incertitude découlant de l’environnement géopolitique actuel ».
La demande de couverture à court terme (ST, moins d’un an le plus souvent) aurait ainsi été vigoureuse au 2ème trimestre, essentiellement tirée, selon l’Union de Berne, par le secteur des matières premières. « Cela devrait se poursuivre au 3e trimestre 2022, bien qu’à un rythme légèrement niveau inférieur » estime la note.
La tendance est moins nette pour les demandes de couverture à moyen/long terme (MLT, plus d’un an), avec des demandes de couverture en baisse au 1er trimestre, puis en hausse au 2e trimestre. Pour le 3ème trimestre, les assureurs s’attendent à une augmentation très faible des demandes, principalement en raison des hésitations des investisseurs sur de nouveaux grands projets, dont la perception des risques est élevée.
Une appétit des assureurs en baisse au 3ème trimestre
Côté souscripteurs, après une augmentation relative jusqu’en 2021, l’appétit des assureurs pour le risque ST est resté stable au 1er semestre. Mais le climat a changé : le 3ème trimestre marque une tendance au resserrement, « avec des perspectives plus pessimistes basées sur l’impact aggravé de la guerre sur les prix, les chaînes d’approvisionnement et les faillites à venir ».
Pour les couvertures MLT, les assureurs « continuent de faire preuve de prudence » dans leur souscription, avec un appétit global plus serré cette année que l’an dernier, mais qui demeure stable d’un trimestre à l’autre. Les pays particulièrement sous surveillance sont, selon la note, « ceux qui sont le plus durement touchées par la hausse des prix alimentaires et des taux d’intérêt », pour la plupart émergents ou en développement.
Vers une augmentation des déclarations de sinistres
Enfin, les assureurs s’attendent en 2022 à une augmentation des déclarations de sinistres, soit des demandes d’indemnisation de leurs assurés, pour les activités MLT et surtout ST, après une embellie fin 2021.
Des retards de paiement directement causés par la guerre Russie/Ukraine sont ainsi en train de se matérialiser au 3ème trimestre pour certains assureurs. Par ailleurs, on s’attend, selon la note de l’Union de Berne, à une augmentation des faillites dans le monde, liée aux restrictions de liquidités et à la hausse des taux d’intérêt.
Conséquences : les assureurs anticipent une « augmentation substantielle des sinistres payés » dans le cadre des activités ST. Cet impact sera toutefois plus long à se matérialiser pour les activités MLT, qui concernent des projets dont la mise en œuvre est sur plus longue période, « à moins que d’autres défauts souverains ne commencent à se matérialiser fin 2022 ».
C.G
*L’Union de Berne (Berne Union), dont le siège est en Suisse, à Berne, est l’association internationale des assureurs de crédit et d’investissement, privés et publics. Ses membres délivrent annuellement des couverture contre les risques d’impayés pour 2500 Md USD (13 % du commerce international de biens) aux exportateurs, banques et investisseurs.
**Pour consulter l’intégralité de la note (en anglais) de l’Union de Berne Export Credit Business confidence, Q3.22 Aug 2022, cliquez ci-après.