« Contrairement à une idée répandue, les Français ne sont pas mauvais en langues, estime Anthony Harvey, directeur France et Benelux, University of Cambridge ESOL Examinations. Ils sont pénalisés par l’évaluation négative en vigueur dans un système scolaire qui souligne les fautes en rouge. La méthode de Cambridge Esol préfère récompenser ce que les élèves savent faire. »
Manifestement, le message est passé. Le ministère de l’Éducation nationale a choisi (sur appel d’offres) Cambridge Esol pour valoriser les acquis des lycéens anglicistes scolarisés dans les sections européennes. Ceux-ci pourront obtenir la certification de niveau B1 (les hispanistes pourront faire de même avec l’Institut Cervantes, et les germanistes avec la KMK, Conférence permanente des ministres de l’éducation des Länder). Très optimiste pour l’enseignement primaire et secondaire « qui ont complètement intégré le cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) », Antony Harvey s’inquiète pour l’université où « on voit des étudiants arriver avec un niveau A2 après 7 ou 8 années d’études ») et où « le niveau B2 n’est exigé pour les enseignants que depuis 2010 ». Plus optimiste, Jean-Claude Lasnier, expert auprès du Conseil de l’Europe, se réjouit du « remue-méninges » suscité par le CECRL, constatant que « beaucoup d’enseignants, en particulier dans les sections LEA (langues étrangères appliquées) saisissent l’occasion de faire évoluer leurs méthodes pédagogiques ».
De son côté, le ministre de l’Éducation, Luc Chatel, multiplie les annonces en faveur de l’apprentissage des langues dès le plus jeune âge. Sur le salon Expolangues, où l’arabe était à l’honneur cette année, il a notamment promis une « campagne de sensibilisation » en faveur de cette langue. L’arabe est, en l’occurrence, un bon exemple des faiblesses françaises. Très peu enseignée dans les écoles publiques, la deuxième langue la plus parlée en France est abandonnée à l’enseignement confessionnel ou associatif. En 2009, ils n’étaient que 0,1 % des collégiens et lycéens à la choisir, contre 97,9 % l’anglais, 41 % l’espagnol, 15,4 % l’allemand, 0,4 % le chinois ou 0,3 % le russe. Résultat, sur les 15 sections internationales implantées dans les lycées – et qui offrent la possibilité pour les élèves de terminale d’obtenir le bac avec option internationale (OIB) – on ne compte que deux sections arabes, soit autant que de danoises et moins que de chinoises, polonaises (4 sections chacune) ou néerlandaises (3), loin derrière les sections espagnoles (11), allemandes (6) italiennes (7) et très loin derrière les sections anglophones (25).
Ainsi Nassif Hitti, ambassadeur de la Ligue arabe à Paris sur le salon Expolangues, a eu des mots très durs lors d’une conférence sur « La langue arabe, un atout professionnel et économique » : « Je ne suis pas content de l’apprentissage de l’arabe en France. Nous vous connaissons mieux que vous ne nous connaissez. Il faut essayer de rééquilibrer cela. » « Dans le monde professionnel, a-t-il ajouté, on ne peut pas travailler avec les pays arabes sans en comprendre le mode de pensée. » C’est d’autant plus vrai que, selon un représentant du quai d’Orsay présent à cette conférence, l’arabe est redevenue la première langue de communication professionnelle dans les pays du Maghreb devant le français et « sa maîtrise même partielle ouvre des portes ». Et les pays de langue arabe représentent un marché porteur de 300 millions de personnes, a rappelé Hervé Piquet, diversité Bercy.
Sylvette Figari
Témoignage : David Lecuyer, V.I.E pour Veolia Environnement
« J’ai accompagné des PME en Arabie Saoudite »
Père français, mère d’origine indienne, rien ne prédestinait David Lecuyer à travailler en Arabie Saoudite. Et pourtant, il a été recruté en février dernier comme V.I.E (volontaire international en entreprise) par Veolia Environnement dans ce pays. Un V.I.E de huit mois, pour compléter les 16 mois de V.I.A (volontaire international en administration) à la Mission économique à Ryiadh qu’il avait initialement obtenu, ce type de contrat ne pouvant pas excéder 24 mois. Avant de partir, ce titulaire d’un master 2 en relations internationales (Paris 1 Sorbonne) avait pris des cours d’arabe à l’Inalco, dont il vante la qualité, déçu de ne pas avoir trouvé l’équivalent sur place. « Cela m’a permis de nouer des contacts amicaux avec de jeunes Saoudiens qui ont facilité mon acclimatation. Sur le plan professionnel, i’ai participé à des missions d’accompagnement de PME françaises et à la promotion des produits français auprès d’acheteurs saoudiens. »
S. F.