Champion mondial de la croissance en 2007, l’Angola est appelé à connaître un développement économique important pendant les prochaines années. Profitant de la manne pétrolière et de financements internationaux, le gouvernement a lancé des plans de reconstruction des infrastructures, totalement dévastées après vingt-six ans de guerre civile et de paralysie des investissements. Mais le boom économique s’accompagne aussi de l’émergence d’une classe moyenne et de nouveaux marchés de consommation. En dépit d’une forte concurrence internationale, les entreprises françaises sont bien placées pour gagner des contrats.
31 %, telle est la hausse du PIB de l’Angola en 2007 prévue par le Fonds monétaire international (FMI). Fait peu connu, ce pays exportateur de pétrole de l’Afrique sub-saharienne sera, cette année, l’un des champions mondiaux de la croissance. En 2006, la progression avait été de 18,6 %. Même si un ralentissement est prévu à partir de l’année prochaine, le boom n’est pas près de se terminer : les experts du FMI tablent sur une hausse moyenne du PIB de 7,5 % pendant la période 2008-2012.
Cette dynamique est liée, bien évidemment, à la bonne conjoncture pétrolière. L’Angola récolte aujourd’hui les fruits d’une politique d’ouverture aux investissements étrangers qui a permis une augmentation régulière de la production et des exportations. L’Angola est le deuxième producteur d’or noir d’Afrique après le Nigeria. L’envolée des prix mondiaux a propulsé les recettes pétrolières de l’État qui sont estimées à 18 milliards de dollars en 2007. Pays de paradoxes, bien sûr, où 70 % de sa population vit avec moins de 1,50 euro par jour.
Pourtant, cette situation change et va évoluer de plus en plus vite. À la différence d’autres pays producteurs de pétrole, l’Angola a mis de l’ordre dans ses finances. Les organismes internationaux saluent la bonne gestion des autorités angolaises. Le déficit public, qui dépassait 15 % du PIB en 1997, a été transformé en un excédent de 16,5 % en 2006. Le taux d’inflation reste encore excessif (12 % en 2006) mais le progrès est réel par rapport à 2004 (43 %) et à l’inflation à trois chiffres du début de la décennie (plus de 200 % en 2000 !). Les comptes extérieurs sont positifs et les réserves représentent l’équivalent de six mois d’importations.
Fort de ces bons résultats, le gouvernement entend utiliser la manne pétrolière pour développer les infrastructures économiques et sociales. Car les défis sont immenses. Entre 1975 et 2002, le pays a été appauvri par le départ des Portugais qui assuraient le fonctionnement de l’économie, la mise en place d’un système d’économie planifiée et la guerre civile qui a entraîné des destructions massives et une paralysie des investissements. Pendant presque trente ans, le développement du pays a été mis entre parenthèses.
Un récent rapport de l’OCDE et de la BAD estime que « la tâche de réhabilitation et de développement des infrastructures de transport est gigantesque ». C’est tout le réseau ferroviaire hérité des Portugais qui est à remettre en marche. Les routes sont notoirement insuffisantes et en mauvais état. Le vieux port colonial de Luanda est totalement inadapté : les navires doivent attendre en mer pendant deux semaines avant de pouvoir décharger les conteneurs à quai !
Mais c’est dans le domaine social que la situation est la plus grave. Ce même rapport évoque des « niveaux alarmants » pour des indicateurs tels que l’espérance de vie, la malnutrition et l’accès à l’eau potable. L’Angola a le troisième taux de mortalité infantile dans le monde. La malnutrition affecterait près de la moitié des 7,4 millions d’enfants angolais. Au moins 70 % de la population vit dans une situation de pauvreté.
Or, c’est bien la volonté manifeste des autorités angolaises de faire face à ces carences et la disponibilité des moyens qui fait de l’Angola un marché très prometteur. L’attribution de contrats se multiplie dans les domaines les plus variés. Force est de constater que les entreprises françaises sont bien placées pour profiter de cette embellie. Total est un acteur central dans le secteur des hydrocarbures et l’industrie française du parapétrolier est bien implantée sur place. De grands groupes français comme Castel ou Bic sont présents dans ce pays depuis plusieurs décennies. Les exportations françaises vers l’Angola ont fait un bond en avant de 69 % en 2006. Elles ont pratiquement quintuplé depuis 2000.
Le succès de la mission organisée par Medef International (3-6 juillet 2007) et l’organisation d’un pavillon France à la Foire de Luanda (10-15 juillet) sont la preuve de l’intérêt des entreprises françaises. Mais celles-ci ne doivent pas relâcher l’effort car l’Angola attire les firmes du monde entier.
Le Portugal a gardé des liens avec son ancienne colonie et c’est le premier partenaire commercial de l’Angola. Le boom économique a entraîné une forte augmentation des exportations portugaises et d’anciens « colons » ont décidé de revenir pour développer des entreprises. Les grandes entreprises portugaises, notamment celles du BTP, et les banques ont pignon sur rue à Luanda. Le Brésil, qui cherche à développer sa présence en Afrique ainsi que les relations sud-sud, voit dans l’Angola un excellent point d’appui pour ses entreprises. Mais la percée la plus surprenante est celle de la Chine.
L’Angola est devenu le premier fournisseur pétrolier du géant asiatique et son premier partenaire commercial en Afrique sub-saharienne, dépassant ainsi l’Afrique du Sud. La Chine a mis en place des financements, ce qui lui a permis d’obtenir des contrats de gré à gré. Les entreprises chinoises sont présentes, principalement dans la réhabilitation du réseau ferroviaire, le pétrole et le bâtiment. « La rivalité entre les industries pétrolières occidentales, russes et chinoises placent l’Angola au croisement de l’actuelle géopolitique énergétique. Le pays est devenu, pour l’empire du Milieu, une source fondamentale de ressources énergétiques, d’où les énormes emprunts et aides au développement qui proviennent de la Chine et envahissent, aujourd’hui, le pays en multiples investissements », souligne Antonio Vilar.
Il y a fort à parier que cette forte concurrence internationale va encore s’intensifier à l’avenir. Mais ce qui est sûr, aussi, c’est que la croissance de l’économie angolaise ne va pas faiblir et que les possibilités d’affaires vont augmenter, et ce, dans les domaines les plus divers. Même si la population de l’Angola (16 millions d’habitants) est inférieure à celle du Nigeria (130 millions), ce pays va continuer à bénéficier de la rente pétrolière et de financements internationaux. Le seul vrai risque pour les Français est de voir les opportunités s’échapper faute d’avoir réagi à temps.
Daniel Solano