Dans un communiqué publié le 24 septembre, le jeune collectif Export & Souveraineté alimentaire demande à trois des nouveaux ministres du gouvernement Barnier, dont celui du Commerce extérieur, de faire de la relance des exportations agricoles et agroalimentaires une « priorité » pour enrayer un déclin sensible depuis plusieurs années. Jérôme Despey, président du CNPA et principal initiateur de ce collectif, nous en dit plus sur ses attentes immédiates.
[Mis à jour le 24/09/2024 à 11H57 avec les déclarations au Moci de M. Despey]
Après les exportateurs d’armagnac et de cognac, les filières agricoles et agro-alimentaires. Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt, sa collègue Sophie Primas, en charge du Commerce extérieur et des Français de l’étranger et enfin Antoine Armand, ministre de l’Economie, des finances et de l’industrie : à peine nommés, pas moins de trois ministres du nouveaux gouvernement Barnier sont nommément interpellés par le collectif Export & Souveraineté alimentaire, un lobby créé en février dernier à l’initiative du Centre national pour la promotion des produits agricoles et alimentaires (CNPA) et rassemblant une bonne partie des organisations professionnelles et interprofessionnelles des filières agricoles et agroalimentaires françaises*.
« Les membres du collectif Export & Souveraineté Alimentaire comptent sur la connaissance très fine des enjeux agricoles, agroalimentaires et de nos territoires d’Annie Genevard, de Sophie Primas et d’Antoine Armand pour donner un nouvel élan aux exportations françaises, offrir des perspectives aux acteurs de la filière et garantir notre souveraineté alimentaire, écrit Jérôme Despey, président du CNPA, dans un communiqué de presse. Cela passe par une plus grande cohérence, une plus grande ambition des politiques publiques ; et une fierté renouée à défendre et promouvoir la » ferme » France ».
Après son lancement, le collectif dont le président du CNPA a été l’initiateur, avait défini des priorités d’actions pour redresser la situation, parmi lesquelles faire de l’export une priorité, accélérer la simplification des formalités administratives pour les entreprises, redresser la compétitivité, assurer un soutien politique total des pouvoir public aux exportateurs agricoles y compris dans le réseau diplomatique, promouvoir plus activement les actions collectives sous une même bannière France dans les salons internationaux… « Les enjeux de l’export ne sont pas suffisamment mis en avant dans les réflexions autour du sujet de la souveraineté alimentaire » explique au Moci Jérôme Despey. « Mais le vrai sujet aujourd’hui est de partager le constat et de faire de l’export une cause nationale pour nos filières » complète-il. « Dans la précédente législature, nous avions reçu un super accueil, je ne doute pas qu’il en sera de même avec la nouvelle » ajoute le président du CNPA.
Partager le constat du déclin et faire émerger « une grande ambition »
Alors que le nouveau gouvernement vient d’être nommé, il s’agit donc de relancer la dynamique en « mobilisant les décideurs -gouvernements, parlementaires pour positionner l’agriculture et l’agroalimentaire comme des enjeux à l’export », et voir émerger « une grande ambition » dans ce domaine, insiste Jérôme Despey.
Quel est le constat ? Pour ce collectif, il s’agit d’enrayer le déclin de la France en tant que puissance agricole et agro-alimentaire mondiale : en vingt ans, elle a été reléguée du 2ème au 6ème rang des exportateurs mondiaux. Or, c’est le symptôme d’une dégradation de la compétitivité du secteur qui n’est pas sans impact négatif sur son avenir : « cette perte de compétitivité à l’export, en Europe et dans le monde, est à la fois la conséquence et un accélérateur de la crise agricole française, qui a des répercussions sur l’ensemble de l’économie, des territoires et des consommateurs » estime le collectif dans un communiqué.
Car selon le collectif, la perte de parts de marché à l’export a des conséquences en chaîne en privant les producteurs des débouchés et sources des revenus supplémentaires qui leur permettaient de renforcer leur compétitivité et de maintenir leurs capacités de production sur le sol français. « L’export est un élément vital pour le secteur et pour la maîtrise de notre destin alimentaire » estime-t-il.
Il s’appuie notamment sur une étude prospective du cabinet Astères, publiée lors de son lancement, le 6 février dernier : la part de marché française dans les exportations mondiales du secteur est passé de de 5,7% en 2010 à 4,5% en 2022. En tendance, hors vins et spiritueux, la valeur des exportations stagne plus en valeur (+0,5 % entre 2012 et 2019) et leur volume baisse (-1,1 % par an en moyenne ces dix dernières années).
Dans l’hypothèse où les exportations en volume poursuivraient leur chute, d’ici douze ans, la perte nette annuelle pour l’économie française atteindrait 11 milliards d’euros (Md EUR) d’activité, 1,6 Md EUR de recettes publiques et 33 000 emplois. A l’inverse, si la filière pouvait augmenter sa production et relancer ses exportations pour regagner les parts de marché perdues depuis 2010, le gain estimé serait, d’ici 12 ans, de 24 Md d’activité supplémentaire et 3,5 Md de recette publiques chaque année, et la création de 75 000 emplois.
Pour l’heure, alors que les nouveaux ministres sont en train de constituer leur cabinet, le collectif ne veut pas se faire oublier. Les courriers de demande de rendez-vous sont en cours. « Nous attendons un signal fort » souligne Jérôme Despey.
A suivre…
C.G
*En sont membres l’Ania, Anivin de France, Chambres d’agriculture France CNIPT, CBMCCA, Fnsea, Inaporc, Intervev, Intercereales, Interfel, Coopération agricole, Medef.