« L’Afrique est convoitée, c’est la dernière frontière, le dernier continent fertile », mais « la France a aussi perdu du temps », parce que « longtemps elle l’a considéré comme une chasse gardée ». C’est pourquoi, « aujourd’hui, nous voulons rétablir le fil de cette relation », a expliqué Pierre Moscovici, le ministre français de l’Économie et des Finances, dès l’ouverture, le 4 décembre, du forum économique France-Afrique « pour un nouveau modèle de partenariat économique entre l’Afrique est la France ».
Initiateur de cette journée, organisée à Bercy par Medef International devant un parterre de 600 personnalités et entrepreneurs de France et d’Afrique, le ministre a rappelé que la France a perdu sur ce continent des positions depuis une dizaine d’années, sa part de marché chutant ainsi de 10,1 % en 2000 à 4,7 % en 2011. « Les partenaires traditionnels ont à travailler plus pour nous convaincre de travailler avec eux », a prévenu, pour sa part, Ngozi Okonjo-Iweala, ministre des Finances du Nigeria.
François Hollande fixe trois principes
Pour réussir ce nouveau partenariat, François Hollande, qui clôturait le forum économique, a fixé trois principes : le premier, la « colocalisation », pour que « l’investissement qui va se porter en Afrique, dans toute l’Afrique francophone, anglophone, lusophone, arabophone, puisse avoir un effet en France » ; le deuxième, « la transparence dans les mécanismes d’aide au développement » et en même temps « la transparence dans les appels d’offres » ; et le troisième, « l’engagement dans la durée ». Le suivi de ces principes devant soutenir un objectif : doubler les échanges, « dans les deux sens, exportations et importations », a précisé le président, selon lequel « deux cent mille (le nombre d’emplois en France) pourraient être créés en cinq ans ».
Le matin même, la ministre du Commerce extérieur, Nicole Bricq, avant de s’envoler vers Bali pour la conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), avait indiqué que ce n’était pas seulement « la qualité de l’offre française » qui est cause, mais aussi sa capacité à respecter « les équilibres de chaque pays », à « proposer du contenu local, des partenariats avec les entreprises privées, avec des compagnies publiques, opérer des transferts de technologie et de savoir-faire et de la formation ».
Les sociétés de l’Hexagone doivent contribuer plus à la réalisation des infrastructures en Afrique. « Peu de grands contrats majeurs (eau, énergie, ferroviaire) ont récemment été emportés par des entreprise françaises », selon la ministre, qui rappelle que l’OCDE a évalué à 50 milliards d’euros pendant dix ans les besoins en infrastructures du continent.
Nicole Bricq demande aux entreprises de s’adapter
Mais surtout, les entreprises tricolores doivent s’adapter à « l’émergence de la classe moyenne », qui impose de se renforcer dans « les secteurs de l’innovation, des nouvelles technologies et de tous ceux qui ont trait à la ville durable ». « Plus de 80 % de la population africaine est connectée à un réseau de téléphonie mobile », constate, notamment, Nicole Bricq, qui a cité comme exemplaire l’Alliance numérique franco-tunisienne, conclue le 5 juillet dernier, lors de la visite de François Hollande en Tunisie. Vingt binômes franco-tunisiens sont déjà ainsi formés dans l’e-santé, les incubateurs numériques, les systèmes d’information géographique ou l’édition logicielle.
La ministre, qui a annoncé l’ouverture de bureaux d’Ubifrance « au Sénégal et au Congo-Brazzaville l’an prochain », s’est aussi engagée à renforcer les capacités de financement, « en déployant sur tout le continent nos moyens d’action », à savoir la Réserve pays émergent (RPE) et le Fonds d’étude et d’aide au secteur Privé (Fasep). Peut-être s’inspirera-t-elle du rapport « un partenariat pour l’avenir », remis à Pierre Moscovici, par la mission « Védrine », proposant, entre autres mesures, de « rapprocher Bpifrance et le groupe AFD (Agence française de développement) pour qu’ils structurent une offre commerciale qui dynamise le financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire françaises vers l’Afrique » et « d’inclure les autres dispositifs publics existants (RPE, Fasep…) dans cette offre ».
François Pargny