Chef de la représentation en France de la Commission européenne, Gaëtane Ricard Nihoul avait réuni l’ensemble des médias tricolores, notamment les grands titres de la presse écrite, pour la rentrée parisienne du commissaire européen, en charge des Affaires économiques, financières, de la fiscalité et des Douanes, le Français Pierre Moscovici. En place à Bruxelles depuis dix mois, l’ancien ministre de l’Économie et des finances des gouvernements Ayrault (2012-2014) s’est montré très appliqué, au point de donner parfois l’impression de débiter un texte appris par cœur et soigneusement préparé autour des grands thèmes du moment : croissance et emploi, crise grecque, transparence fiscale (échange automatique d’informations…), taxe sur les transactions financières, changement climatique, etc.
Dans une Union européenne (UE) en panne de confiance, tant du côté d’une partie de la classe politique que de l’opinion publique, Pierre Moscovici s’est dit convaincu que le produit intérieur brut progresserait de 1,5 % dans la zone euro en 2015 et 1,9 % en 2016. « Le retour à la croissance est là. Nous sommes sortis de la crise économique et financière, la phase de redressement est devant nous et chaque État membre doit amplifier cette reprise », a plaidé Pierre Moscovici.
Une bonne nouvelle, certes, mais « il faut rester vigilant », a ajouté l’ex-ministre des Affaires européennes de Lionel Jospin (1997-2002), qui estime, notamment au regard de la crise grecque – « la Grèce est sortie de l’impasse », mais « le Parlement européen n’a pas été assez associé » – qu’il faut « rapidement » instiller plus de démocratie dans l’UE, mener une réforme institutionnelle et « approfondir l’Union économique et monétaire (UEM) ».
Un Parlement, un gouvernement et un budget propres
S’exprimant à titre personnel, car « il y a des sensibilités différentes et il en faut donc en discuter », y compris au sein du « collège » auquel il appartient, Pierre Moscovici s’est déclaré favorable à « un Parlement de la zone euro » et à « un gouvernement spécifique, avec un budget propre pour plus de convergence, sous la responsabilité d’une sorte de ministre des Finances qui doit être membre de la Commission européenne ». Selon lui, un ministre des Finances et un Parlement de la zone euro permettraient d’associer « discipline et solidarité », « débat démocratique et approche économique » et « il faut dans les années à venir trouver un chemin économique global pertinent ». « Il faut aller vite » et, pour lui, « dans les deux ans, tout doit être précisé », ajoutant que « dans la crise grecque, il y a eu un déficit démocratique » et « qu’il ne faut pas laisser çà ».
« Ce débat sur l’approfondissement de l’UEM, a rappelé Pierre Moscovici, s’est ouvert à la faveur du rapport des cinq présidents en juin dernier», un document signé conjointement par les premiers dirigeants de la Commission européenne, du Conseil européen, de l’Eurogroupe (ministres des Finances de la zone euro), de la Banque centrale européenne et du Parlement européen. La chancelière allemande, Angela Merkel est également intervenue à plusieurs reprises pour soutenir l’idée d’une réforme institutionnelle et, plus récemment, le ministre français de l’Économie, Emmanuel Macron, a exprimé publiquement son soutien à la constitution d’un « noyau dur » de la zone euro et d’un gouvernement dirigé par un commissaire européen aux compétences élargies.
« Une position de principe »
A la presse qui lui demandait s’il souhaitait devenir le ministre des Finances de la zone euro, Pierre Moscovici a répondu qu’il s’agissait d’une position qu’il défendait avant d’être en poste à Bruxelles et que, donc, « c’est une position de principe, pas une position de candidature quelconque à un poste de cette nature ». Au passage, il a précisé que la réforme institutionnelle est suivie directement par le président de l’exécutif européen, Jean-Claude Juncker, et que ce dossier « sera au menu ces prochaines semaines ». S’agissant des pouvoirs dont pourraient disposer un ministre des Finances de la zone euro, Pierre Moscovici, insistant encore une fois sur le fait que « c’est une vision personnelle, pas celle de la Commission européenne », a indiqué qu’il devrait « posséder des compétences budgétaires, la maîtrise du Trésor européen et assurer la présidence permanente de l’euro ».
François Pargny