Yves Zlotowski, chef économiste de Coface, a accepté d’expliquer au Moci l’impact des crises au Mali et en Algérie pour les opérateurs économiques. Il se déclare plutôt confiant quant à l’évolution des économies africaines.
Le MOCI. On sent depuis des mois un regain d’intérêt de la part des
entreprises du monde entier pour l’Afrique, qui dépasse largement le cadre de la seule Afrique du
Nord. Et pourtant l’instabilité y est forte au Sahel, voire en Afrique de
l’Ouest ou en République démocratique du Congo ?
Yves Zlotowski. La croissance du continent reste très
forte. La sous-région subsaharienne, en particulier, devrait enregistrer une
croissance économique de 5,2 % cette année, après avoir affiché une hausse de
4,4 % de son produit intérieur brut en 2012. Il s’agit d’une performance
enviable. Toutefois, nos évaluations risque pays du continent restent
contraintes par les problèmes de gouvernances et de tensions politiques et
sociales.
Le MOCI. Est-ce que la prise d’otages toute récente en Algérie et le
conflit militaire au Mali doivent inciter les opérateurs économiques à plus de
prudence ?
Y. Z. Le problème n’est pas la croissance économique, il est
ailleurs. S’agissant du Mali, nous nous sommes interrogés sur les fragilités
politiques de ce pays, sur la capacité à gérer les chocs politiques, militaires
et sociaux. Le risque sur les entreprises maliennes est donc très important. En
mars 2012, nous avions déjà dégradé le Mali, qui se trouve depuis avec le
risque le plus élevé qui soit, avec l’évaluation pays D. Quant à l’Algérie,
évaluée en A4, c’est très différent. Il faut surtout éviter de sur-réagir. La
prise d’otages, qui, est, certes, un évènement grave, ne modifie en rien les
fondamentaux du pays, qui bénéficie d’une situation économique et financière
très favorable.
Le MOCI. Et que pensez-vous de l’évolution de la Côte d’Ivoire, de
l’Afrique du Sud et du Nigeria, qui sont trois poids lourds de l’Afrique
subsaharienne ?
Y. Z. Pour des raisons différentes, il faut suivre de près
l’évolution en Côte d’Ivoire et en Afrique du Sud. En Côte d’Ivoire, malgré le
rétablissement de la situation économique et financière, les tensions politiques
restent fortes et la réconciliation peine à gagner toutes les couches de la société. En Afrique
du Sud, les grèves dans les mines ont été particulièrement violentes et la
situation sociale se détériore. Le chômage des jeunes, notamment, y est
supérieur à 40 %. Le risque s’y dégrade lentement mais surement. Quant au
Nigeria, notre évaluation de ce pays reste D. La croissance économique y est
confortable, la situation financière y est favorable, mais les obstacles
structurels sont toujours là, liés à une gouvernance difficile.
Propos recueillis par François Pargny
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