« Notre ambition n’est pas de se substituer à la Commission européenne, qui négocie, mais de savoir où sont nos intérêts », a justifié Nicole Bricq, la ministre française du Commerce extérieur, à l’issue de la mise en place du comité de suivi et de réflexion de l’accord de partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement ou Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP) entre l’Union européenne et les Etats-Unis.
Chargé d’échanger sur les enjeux et d’éclairer la position française au fur et à mesure de l’avancée des négociations, le comité est composé d’une quinzaine de membres (voir le communiqué du ministère en fichier joint), représentants de l’agriculture, l’agroalimentaire, de l’industrie en général et des services, y compris financiers, ainsi que de parlementaires nationaux et européens « de façon à pouvoir relever le défi démocratique » que représente un tel accord, a souligné Nicole Bricq.
Ne pas manquer la deuxième vague du numérique
« Nous avons intérêt à ce que l’Union européenne soit bien identifiée en faveur de la protection des investisseurs, le protection des consommateurs ou encore la protection numérique », a poursuivi la ministre, qui rappellera, un peu plus tard lors d’une conférence de presse, que l’UE avait « manqué la première vague du numérique » contrairement aux États-Unis, faisant ainsi allusion aux géants américains Google, Microsoft ou Apple.
C’est pourquoi « il ne faut pas rater la vague suivante », a averti Nicole Bricq, en se félicitant de la présence dans le comité de suivi de Benoît Thieulin, qui préside le Conseil national du numérique. « C’est un outil unique en Europe », s’est-elle encore réjouie au moment où « on passe des enjeux numériques privés à la numérisation de l’économie ».
En raison du blocage budgétaire aux États-Unis, le deuxième tour des négociations a dû être reporté. Ce qui n’empêchera pas le comité de suivi de se réunir en décembre prochain, avec, parmi les thèmes majeurs de réflexion, la convergence règlementaire. L’Union européenne (UE) a bien l’intention de défendre ses normes en matière d’environnement ou de travail.
Parmi les autres sujets sensibles dont le comité devra traiter tout au long des négociations bilatérales, figurent les marchés publics, très fermés aux entreprises européennes outre-Atlantique, du fait de Buy American Act qui privilégie l’offre américaine, l’accès aux marchés, avec les barrières tarifaires, et le règlement des différends. Nicole Bricq observe que « le coût des procédures est élevé », outre-Atlantique, mais « surtout » elle craint « la puissance des lobbies et des lawers américains ». Le risque serait que « l’Union européenne et ses États membres ne puissent plus réguler par la loi ».
Les États-Unis plus compétitifs grâce à l’énergie, la main d’œuvre, le
crédit
La première session de travail du comité de suivi a été consacrée à un tour de table des différents secteurs d’activité (agriculture, agroalimentaire…), à l’impact du futur accord sur les pays émergents, notamment la Chine, et aux différences de compétitivité des deux côtés de l’Atlantique. Les États-Unis possèdent des avantages par rapport à l’UE dans l’énergie – la compétitivité en Europe en souffre dans plusieurs activités, comme les engrais et plus généralement la chimie – la main d’œuvre – si les hauts salaires sont plus hauts outre-Atlantique que sur le Vieux continent, les bas salaires y sont aussi plus bas – le financement – les États-Unis ont, pour leur part, réglé la question de l’accès au crédit.
L’économiste Elie Cohen, membre du comité de suivi, explique ainsi que si l’automobile américaine a pu réaccélérer, elle le doit notamment à la conjugaison des bons tarifs de l’énergie, du coût raisonnable du personnel et du retour à l’accès au crédit.
Les avances technologiques des États-Unis et de l’UE ont aussi été évoquées. A cet égard, Nicole Bricq a rappelé des avantages de la France : crédit impôt recherche et allégements fiscaux, des charges sociales et des cotisations patronales pour les jeunes entreprises innovant dans le numérique. La ministre a, enfin, indiqué que le comité de suivi se réunira tous les trois mois.
François Pargny
Pour en savoir plus :
Consultez en fichier joint le communiqué de presse du ministère du Commerce extérieur sur le TTIP