Le 30 mars
dernier, lors d’une réunion à Magnitogorsk de la Commission pour la
modernisation de l’économie, thème phare de la présidence de Dmitri Medvedev,
ce dernier a annoncé une série de mesures visant à assainir le climat des
affaires. Et à attirer les investisseurs étrangers.
Ca ressemble
à un coup de poing sur la table. Parmi les 10 mesures prises par le président
russe, la plus spectaculaire concerne l’abandon des fonctions des membres du
gouvernement au sein des entreprises publiques afin de ne plus prêter le flanc
aux critiques d’ingérence de l’Etat. A la stupéfaction générale, Dimitri
Medvedev, souvent perçu comme une marionnette évoluant dans l’ombre de son
Premier ministre Vladimir Poutine, lui a en effet donné jusqu’au 1er juillet
pour lancer le processus de démission de 8 ministres et vice-ministres siégeant
aux conseils d’administration de 17 grandes sociétés publiques du pays.
A moins d’un
an des élections présidentielles, alors que Dimitri Medvedev et Vladimir
Poutine ne sont pas encore prononcé sur leurs candidatures respectives, cette
mesure vise en particulier le vice-Premier ministre Igor Setchine (président du
géant pétrolier Rosneft), réputé proche de Vladimir Poutine, mais aussi le
ministre des Finances Alexeï Koudrine (président de la banque VTB et membre du
conseil d’administration du groupe minier Alrosa), le ministre des Transports
Igor Levitine (président d’Aeroflot) ou encore le premier vice-Premier ministre
Viktor Zoubkov (président du conseil d’administration de Gazprom et de la
banque Rosselkhozbank).
Volontaire,
le discours de Dmitri Medvedev intervient dans un contexte de fuite massive des
capitaux. En 2010, le reflux net de capitaux s’est élevé à 38,3 milliards de
dollars, dont 22,7 milliards de dollars pour le seul quatrième trimestre. Un
exode handicapant pour l’économie russe qui ne peut se passer des investisseurs
étrangers pour financer son développement, en particulier celui de nouvelles
infrastructures. D’où l’annonce d’une série de mesures, moins tonitruantes que la
mise à la porte des membres du gouvernement des plus grandes entreprises du
pays, mais visant clairement à donner un signal positif à l’étranger : la
publication des enquêtes menées contre les fonctionnaires accusés de
corruption, la possibilité pour les actionnaires minoritaires d’entreprises
publiques d’avoir accès à toutes les informations financières, la création d’un
fonds avec des sociétés d’investissement étrangères ou encore la publication
avant le 15 mai d’une liste définitive d’entreprises appelées à être
privatisées cette année et l’an prochain.
Dimitri
Medvedev a par ailleurs donné six mois au gouvernement pour améliorer la
qualité des services publics utilisés par la communauté d’affaires. A savoir :
les douanes, les aéroports, les procédures de registratsia (l’enregistrement auprès des autorités auquel tout étranger et tout Russe
doivent se soumettre à chaque déplacement de plus de 72 heures), les visas, les
permis de travail et les services postaux.
Bref, des
améliorations que nombre d’investisseurs, étrangers ou non, appellent de leurs
vœux depuis longtemps dans ce pays où l’environnement des affaires est pour le
moins difficile. La Russie est classée au 146ème rang de l’index de perception
de la corruption par Transparency International et à la 123ème place (sur 180)
du classement Doing Business de la Banque mondiale.
Reste à
savoir si ces mesures seront réellement appliquées ou s’il s’agit d’effets de
manche destinés à prendre de vitesse un éventuel adversaire à la future
présidentielle. Il y a ainsi fort à parier que, siégeant ou non aux conseils
d’administration des grandes compagnies russes, les siloviki ces
dirigeants, qui comme leur meneur Vladimir Poutine sont issus de l’armée et des
services de sécurité, conserveront toute leur influence sur la vie économique
russe.
Sophie
Creusillet