Comment prévenir les impayés ? Les pays développés sont-ils vraiment plus sûrs ? La notion « d’émergent » a-t-elle encore un sens ? C’étaient quelques-unes des questions soulevées par les quatre intervenants.
« Il faut faire évoluer les mentalités et cesser de parler du “bon” client ou du client “historique” qui n’est plus depuis longtemps gage de sécurité, a alerté d’emblée Jean-Claude Asfour, consultant en commerce et financements internationaux et co-auteur de l’Atlas des risques pays publié par Le Moci. Si la définition du « pays émergent » reste floue et variable, il s’agit souvent de pays « présentant les caractéristiques de pays à risque » : instabilité, corruption, lourdeurs administratives, insuffisance de devises fortes, etc. Or, « de nombreux exportateurs continuent de travailler sur ces pays sans aucune sécurisation, tablant sur la soi-disant renommée de leur client ou l’ancienneté de leurs relations commerciales ». Beaucoup d’entre eux se sont ainsi retrouvés face à des impayés sur la Côte d’Ivoire, l’Égypte, la Libye, la Tunisie… L’accent doit donc être mis sur la prévention. Le mot d’ordre : rigueur, que ce soit dans la rédaction des offres, l’analyse des risques pays et commerciaux, ou encore dans le suivi des échéances et les recouvrements. Jean-Claude Asfour préconise d’évaluer les risques liés au pays et au client, mais aussi de choisir le mode de paiement en fonction du risque. Quelques conseils : en Égypte, où les entreprises souffrent du manque de liquidités, il est impératif de ne traiter que via des transactions sécurisées ; en Tunisie, où les PME souffrent de la crise libyenne, éviter en particulier les remises documentaires.
Aujourd’hui, en cette sortie de crise, « il faut se méfier de la classification entre émergents et développés », a prévenu de son côté Patrice Luscan, directeur régional d’Euler Hermes World Agency. En ce moment, les dossiers « chauds » et les craintes des exportateurs français portent davantage sur les pays d’Europe du Sud que sur les émergents, a-t-il confié. Et des complexités peuvent exister également dans les pays qui paraissent sûrs. Fait peu connu, par exemple, les entreprises allemandes ne donnent pas leur bilan. Surtout, la notion de pays émergent a peut-être de moins en moins de sens dans un contexte de mondialisation qui a créé depuis quelques décennies une sorte de continuum. La crise a en outre changé la donne et c’est la volatilité qui est devenue un élément prépondérant dans l’analyse. Dans ce contexte, le risque pays évolue et deux nouveaux outils viennent désormais compléter la notation d’Euler Hermes : les indicateurs de vulnérabilité cyclique et financière. Enfin, une vraie difficulté pour les credit managers réside dans l’éloignement culturel, a-t-il souligné par ailleurs.
Autre intervenant, Philippe Johann, responsable commerce international du réseau France de la Société Générale (SG), a mis en avant le réseau international de sa banque capable d’apporter aux exportateurs une connaissance des marchés locaux, ainsi que ses partenariats avec Ubifrance, Coface, Altares, ou Kompass. Il a par ailleurs conseillé de ne pas aller à l’international sans avoir sécurisé ses paiements, de bien choisir son Incoterm, de ne pas oublier de confirmer ses crédocs par la banque, ou encore de penser à utiliser la « stand-by », une garantie de paiement alternative très sécurisée et simple à mettre en œuvre, pour les entreprises qui ont des acheteurs à l‘étranger ne voulant pas gérer le crédit documentaire. Pour un exportateur, avoir comme partenaire bancaire un groupe possédant un vrai réseau international est un atout. SG, qui est présente en direct dans 37 pays, est capable de fournir un accompagnement ciblé à ses clients dans des pays comme la Russie, le Vietnam, l’Algérie ou encore le Brésil, comme l’a confirmé Ramilya Moreau, qui anime le réseau de SG à l’étranger.
Natasa Laporte