Sécuriser ses actifs stratégiques est un préalable lorsqu’on s’implante dans un pays émergent. Conseils experts et témoignage d’un investisseur prudent ont été fournis lors de cette session.
« Le risque zéro n’existe pas, mais la fatalité non plus. » Gianmarco Monsellato, directeur général de la société d’avocats Taj, a ouvert la session consacrée à la sécurisation des actifs en exhortant les entreprises à maîtriser leur risque fiscal. Surtout dans les pays émergents où, prévient-il, « l’augmentation des barrières fiscales a progressivement remplacé la diminution des droits de douane ». « Les entreprises françaises, a-t-il insisté, doivent intégrer ce risque dans leur plan de financement » car la gestion de la fiscalité a un impact sur le cash flow – la capacité de financement – au point parfois de remettre en cause l’investissement dans le pays. Son conseil ? Anticiper « parce que lorsque le problème se pose, il est trop tard ».
Pour anticiper les risques, Benoit Mercier, directeur de projets au sein de Geos Business Intelligence (groupe Geos) a recommandé de « trouver un bon partenaire local ». Dans un contexte où « l’hypercompétitivité contraint les entreprises à agir très vite pour avoir la prime au premier concurrent sur les marchés », il a conseillé aux opérateurs d’établir une cartographie du risque pays, « ce que ne font pas la moitié des PME qui vont à l’international ». Puis de sélectionner leurs partenaires selon leurs propres objectifs, sans oublier de s’informer sur eux, qu’il s’agisse de personnes morales ou d’individus. Et de conclure en comparant le coût de la prévention et celui d’une gestion d’une crise, estimant que le différentiel va de 1 à 30, en faveur du premier…
C’est dire l’importance d’établir un bon business plan qui prévoit ces coûts, un point souligné par tous les intervenants. Jean-Christophe Hamann, responsable du bureau de Nantes du cabinet de conseil en propriété industrielle (CPI) Schmit-Chrétien, a par exemple conseillé aux opérateurs en Chine de prévoir le coût de la protection intellectuelle, sous la forme de dépôt de brevets, voire de marques, dessins, modèles, dans ce pays et sur tous les marchés cibles. Pour lui, s’il faut conserver la marque française, gage de renommée, il ne faut pas négliger d’y ajouter une translitération locale, voire changer le nom comme l’a fait Nestlé, devenu « nid de moineaux » en chinois, pour ne pas choquer la culture locale.
La prise en considération de ces différents risques est à la portée des PME. Ils ont ainsi incité Maurice Gorgy, président de la PME familiale Gorgy Timing, leader européen des systèmes d’équipements horaires de haute précision, à ne pas brûler les étapes avant de s’implanter en Chine.
L’homme d’affaires a expliqué avoir commencé son « apprentissage asiatique » en ciblant des pays plus petits et où il n’existait pas de produits concurrents : Taïwan, Singapour, Hong Kong. Puis, en 2006, il a abordé la Chine avec l’appui du Grex (centre de commerce international de la Chambre de commerce et d’industrie de Grenoble) et d’Oséo, mais en se positionnant sur des marchés de niche technologique où il ne risquait pas d’être copié. Ce n’est qu’en 2008 qu’il a constitué une joint-venture avec le groupe chinois Polaris, sans oublier d’imposer un accord de confidentialité dans le contrat. « Je pense que si nous n’avions pas fait une joint-venture, nous aurions mis beaucoup plus de temps à percer ce marché », indique l’investisseur qui encourage ses pairs à refuser les transferts de technologie sur les produits de haute technicité.
Sylvette Figari