Une nouvelle étape cruciale vient
d’être franchie avant le lancement formel des négociations Union européenne-États-Unis pour la
conclusion d’un accord de libre-échange (ALE). L’engagement du président Obama, le 12
février, lors de son traditionnel discours sur l’état de l’Union face au
congrès, a donné le feu vert politique au lancement de ces pourparlers. La
publication du rapport du groupe de haut niveau – mis en place en novembre 2011
pour étudier la faisabilité d’un tel accord – établit le cadre technique de ces
pourparlers.
« Ces négociations seront semées d’embûches, mais je suis confiant »,
a déclaré aujourd’hui le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, lors d’une conférence de presse
conjointe à Bruxelles avec le commissaire au Commerce, Karel De Gucht « Le rapport du groupe
de travail qui vient d’être publié est une bonne base. Nous devons donc donner
le plus vite possible le coup d’envoi de ces négociations, encore sous
présidence irlandaise. Plus tôt nous commencerons, plus tôt nous pourrons
conclure cet accord qui sera le plus important du monde », a conclu le président
de la Commission européenne.
Lever les barrières non tarifaires
Objectifs de l’exécutif européen :
entamer les pourparlers avant l’été et boucler le processus « d’ici à deux
ans », a indiqué Karel De Gucht. Et la priorité ne concernera pas les droits de
douane déjà très bas « à seulement 4 % pour les importations », précise le commissaire au Commerce. Ce sont les obstacles non-tarifaires – normes,
règlements techniques, certifications – qui devront être levés. « C’est vraiment
là que nous pouvons apporter des économies à nos entreprises » a-t-il ensuite
insisté prenant l’exemple de l’automobile.
Actuellement, les constructeurs
européens sont surtout freinés par des règles américaines très strictes en
matière de sécurité. Une harmonisation des normes, dans ce secteur et dans
d’autres, permettra d’éviter les doubles coûts auxquels les industriels sont
aujourd’hui confrontés. Et si les échanges entre les deux blocs sont déjà très
importants, de l’ordre de 2 milliards d’euros par jour, ce futur partenariat
transatlantique pour le commerce et l’investissement, « pourrait permettre à
l’économie européenne de gagner ½ pourcentage de produit intérieur brut (PIB) », a fait valoir José
Manuel Barroso.
Et pour ce dernier, malgré les
difficultés qui attendent les négociateurs, tous les éléments sont aujourd’hui
réunis pour mener à une solution « gagnant-gagnant ». D’abord, des deux côtés de
l’Atlantique, les économies sont en crise et font face à de grandes difficultés
budgétaires. Or, le commerce est le moyen le moins coûteux de relancer la
croissance. Ensuite, face à l’échec du multilatéralisme, tant les Européens que
les Américains ont lancé, et parfois conclu, des accords de libre-échange
bilatéraux.
Une plus grande convergence sur l’agriculture
Pour le président de la Commission européenne, « il serait donc étonnant que
les deux économies les plus importantes au monde, mais aussi les plus proches,
ne soient pas capables de s’entendre ». Troisième élément : une plus grande
convergence aujourd’hui sur le dossier agriculture. « Les Européens ont des
intérêts offensifs aux États-Unis », a souligné José Manuel Barroso, précisant
que l’UE était désormais exportateur net dans le secteur.
Dernier facteur, la
volonté politique de part et d’autre : aux États-Unis, où Barack Obama entame
son dernier mandat, et au sein de l’UE où il existe maintenant un consensus fort
entre les 27 pour donner un coup d’envoi rapide à ces négociations. Enfin, si la
raison n’est pas officiellement évoquée, il est aussi évident que la concurrence
chinoise servira aux deux partenaires de moteur pour dépasser les difficultés
annoncées de ces négociations. « Ensemble, nous aurons une influence encore plus
grande », a souligné Joao Vale de Ameida, l’ambassadeur de l’Union européenne à Washington. Au
delà de l’influence politique, les gains économiques estimés sont considérables.
A la Commission européenne, ils sont évalués à 275 milliards d’euros par an et le nombre
d’emplois créés à 2 millions.
Kattalin Landaburu, à
Bruxelles