Malgré les trois plaies de l’Irak (insécurité, manque de compétences et inorganisation), le pays regorge d’opportunités pour les entreprises françaises. C’est le constat que l’on pouvait tirer à l’issue d’un petit déjeuner organisé par Ubifrance sur ce pays, le 8 juin dernier à Paris.
L’Irak aiguise les appétits : Turcs, Coréens ou Chinois sont intéressés par la
reconstruction de ce pays. A raison. D’après le Fonds
monétaire international, la croissance économique devrait s’y élever entre 9 et
11 % par an durant les quatre années à venir. « La production de
pétrole a, d’ailleurs, fortement augmenté, ce qui est bon signe, atteignant un
niveau de 3 millions de barils par jour, et les exportations sont parvenues à
3,6 millions de barils jour », se réjouit Denis Le Fers, chef du Service
économique en Irak.
Dans ce contexte plutôt
favorable, la France a augmenté de 52 % ses exportations en 2011, les portant
ainsi à 793 millions d’euros (438 millions dans les équipements mécaniques et
électriques, 100 millions dans la pharmacie et 81 millions dans les véhicules
lourds…). Reste que les implantations françaises se comptent sur les doigts de
la main : Lafarge, Orange, Total, Schneider, Renault Trucks, CMA-CGM. Et
que dans toute une série de secteurs, comme l’agroalimentaire, la présence
tricolore est faible, voire nulle.
Le 8 juin dernier à Paris,
l’ambassadeur d’Irak en France, Fareed Yasseen, n’a pas manqué de souligner le
dynamisme de la Turquie, l’investissement de ses entreprises dans l’hôtellerie
et la construction. « Les Turcs investissent en masse et dans la
durée », a-t-il ainsi souligné fort adroitement à l’intention des
entreprises françaises réunies par Ubifrance.
« La présence de la Turquie
est particulièrement visible dans le BTP », confirme Sébastien Joly,
responsable pays de Riou Glass, fabricant de verre pour le bâtiment et la
sécurité (boucliers de protection…). A l’instar de Riou Glass, nombre de PME
rencontrées l’an dernier à la Foire internationale de Bagdad confiaient
qu’elles hésitaient à se déplacer en Irak pour des raisons de sécurité.
La Foire de Bagdad est une
vitrine, un lieu de rendez-vous avec les administrations. L’an dernier,
Ubifrance et la société
BOI (Bureau des opérations internationales) y avaient emmené
une quarantaine de sociétés. Cette année, 700 m2 de surface y sont
réservés ainsi que 40 chambres à l’hôtel Rachid. Cet évènement (1er-10
novembre 2012) offre aussi l’opportunité de trouver un partenaire local susceptible
de suivre l’évolution des affaires et du marché. La difficulté est de sélectionner
des agents avec des compétences techniques. Riou Glass recherche toujours un
relais.
De son côté, Jeannine Vaillant,
la directrice générale de Douaisis, reconnaissait sans enthousiasme, lors du
séminaire d’Ubifrance, qu’elle devrait sans doute un jour choisir un agent en
Irak. « A l’exception de la Mauritanie, nous avons l’habitude de livrer
sans intermédiaire dans la vingtaine de pays où nous exportons nos rouleaux de
manutention et tambours. Et en Irak, précisait-elle à moci.com, il faudra de
toute façon que je me déplace régulièrement pour assurer l’assistance
technique ». La PME de Douai vise le marché des rouleaux de bandes
porteuses dans les cimenteries.
Depuis la guerre d’Irak, le pays
manque de compétences. « A partir de 2003, il y a eu un exode massif de
ressources humaines », explique Pierre Fournol, fondateur du cabinet
d’avocats éponyme spécialisé sur l’Irak. L’État manque aussi de fonctionnaires
compétents, l’administration est inorganisée. La quatrième session d’enchères
pour des contrats d’exploration sur douze sites pétroliers et gaziers s’est
soldée par un échec. Faute d’incitations suffisantes, les majors, comme Total,
n’ont pas soumissionné. Seules quelques petites compagnies ont pu être
retenues.
Or, les hydrocarbures demeurent
la priorité du gouvernement. Dans ce secteur, les entreprises françaises
peuvent espérer emporter des contrats d’équipements. La rénovation et
l’agrandissement des raffineries, les engrais agricoles et la pétrochimie, de
façon plus générale, doivent encore les intéresser. « Une dizaine
d’entreprises françaises sont ainsi déjà inscrites au troisième salon du
pétrole et du gaz de Bassora, du 6 au 9 décembre », se félicite Christian
Valéry, directeur associé de BOI, qui organise le Pavillon France, labellisé
par Ubifrance.
Autre grande priorité,
l’électricité bénéficie d’un budget d’investissement de 21 milliards de dollars
en 2011 et 2016. Alstom a empoché une affaire de 50 millions d’euros, concernant
la réhabilitation de deux unités de la centrale électrique au gaz de Khor Al
Zubair (district de Bassora), après avoir obtenu celle de l’unité 1 de la
centrale électrique au gaz de Najaf (sud). Le groupe français a également gagné
le contrat de construction de la centrale à gaz d’Al-Mansuriya (nord-est).
Dans le transport ferroviaire, « Alstom s’est positionné pour la réalisation d’une ligne à grande vitesse entre Bagdad et Bassora »,
rappelait, lors du séminaire d’Ubifrance, son directeur Afrique-Moyen-Orient,
Paul Moneyron. « La liaison existe, mais il faut la réhabiliter pour
permettre aux trains de rouler à 250 kilomètres heure. En outre, précisait-il
alors, nous agirons par étape en répondant à chaque fois à un besoin local, par
exemple en commençant par le tronçon allant jusqu’à la ville sainte de Karbala ».
D’autres projets dans le transport concernent la rénovation des
infrastructures aéroportuaires, la modernisation du port d’Umm Qasr et la
création du nouveau port d’Al-Fao, doté de 100 quais, soit un investissement
global de 4,6 milliards de dollars.
Aujourd’hui, le marché des
voitures neuves – 115 000 unités vendues en 2011 – en croissance de 10 %
par an en moyenne, est tenu par les constructeurs coréens, chinois et iraniens.
Dans l’automobile,
Denis Le Fers conseille de « nouer des partenariats industriels ou
commerciaux publics ou de distribuer avec un partenaire privé ».
Des fonds sont aussi prévus dans
l’eau : 3,4 milliards de dollars pour l’assainissement, la potabilisation,
la réhabilitation et le transport. Dans la santé aussi : 4,2 milliards,
dont 630 millions d’investissement. Les opportunités ne manquent donc pas en
Irak.
François Pargny
Pour en savoir plus:
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1 Le GPS Business du MOCI. Tapez
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2 Les fichiers joints : interventions
de Denis Le Fers, de Pierre Fournol, présentation par BOI de Basra
International Oil & Gas Conference & Exhibition et plaquette d’Ubifrance sur la Foire de Bagdad
Contacts :
1 Foire internationale de Bagdad
Ubifrance, Jacqueline Huguin
Tél. : 01 40 73 37 72
2 Basra
International Oil & Gas Conference & Exhibition
BOI, Christopher da Silva
Tél. : 01 45 35 48 48