Pour assister au redressement des comptes extérieurs de la France, il faudra encore attendre. Si la compétitivité de ses entreprises s’améliore, leurs produits resteraient trop chers. Résultats : sa part de marché (PDM) dans les exportations de biens et services de la zone euro continue à diminuer, de 13,6 % en 2015 à 13,4 % l’an dernier. Pour corser le tout, la balance des transactions courantes plonge, passant à un déficit de -27,9 milliards d’euros, soit -1,3 % du produit intérieur brut (PIB). Tel est le constat plutôt négatif que vient de délivrer Coe-Rexecode, un institut d’études économiques proche du patronat, dans une note intitulée « La compétitivité française en 2016 » (voir fichier joint en pdf).
Encourager encore les gains de productivité
Une bonne nouvelle est toutefois relevée par l’Institut : la modération du coût salarial unitaire en 2016 (+ 0,9 %) par rapport à la zone euro (+ 1,3 %), notamment l’Allemagne (+ 1,9 %). Cette tendance n’est pas nouvelle : de 2012 à 2016, les écarts de progression, en fait, sont impressionnants avec + 0,8 % seulement en France, contre + 3,7 % dans la zone euro et + 9,1 % en Allemagne. Ce rebond de la compétitivité-coût dans l’Hexagone peut être un atout pour l’avenir.
Mais, toujours selon Coe-Rexecode, il faudrait mieux faire en matière de prix. D’après une enquête « Compétitivité » commandée à TNS Sofres et réalisée auprès de 480 importateurs de biens de consommation tricolores, si les équipements de logement et surtout les produits agroalimentaires s’en sortent bien, en offrant un bon rapport qualité-prix, c’est le contraire dans l’habillement et les accessoires, tout comme dans la pharmacie.
Ainsi, les marges supplémentaires des entreprises acquises depuis 2014 n’auraient pas suffi : malgré le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Cice), des baisses de cotisations familiales, du coût des approvisionnements pétroliers et des taux d’intérêt, les entreprises françaises n’ont pas repris les chemins du grand large. Or, la remontée des prix du pétrole et des taux d’intérêt menace le redressement des marges.
Pour Coe-Rexecode, « il est nécessaire, de contenir, dans la durée, les hausses de salaires au-dessous des gains de productivité et de poursuivre les politiques d’allégement des coûts ». En outre, le taux de pénétration du marché domestique par les importations, stabilisé depuis l’an dernier avec la diminution des prix, risque à nouveau de monter : il est estimé à 23,6 % des ressources de biens et services (PIB+ importations) pour les trois premiers trimestres de 2016.
L’Espagne a réussi son ajustement par les salaires
Sur une période longue, le constat est carrément alarmant, puisque la PDM française à l’export était de 17 % dans la zone euro en 2000, soit 3,4 points supérieurs à ce qu’elle est aujourd’hui. « Si la part de marché était restée à son niveau de 2000, le montant des exportations de biens et services de la France serait plus élevé de 170 milliards d’euros en 2015, pour un manque à gagner de 1 470 milliards d’euros en 15 ans », avance Coe-Rexecode.
La France, à l’instar de l’Italie, aurait ainsi « structurellement perdu des parts de marché », alors que l’Allemagne et, depuis la crise, l’Espagne « en ont structurellement gagné ». C’est « notamment en raison d’un ajustement à la baisse des salaires » que ce voisin de l’Europe du Sud a retrouvé sa compétitivité, selon Coe-Rexecode.
Fortement corrélée au recul des PDM à l’export, la part de la France dans la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière dans la zone euro y recule donc. Elle était ainsi de 17,3 % en 2000, 15 % entre 2007 et 2012 et 13,4 % au deuxième trimestre 2016. Du coup, le déficit des échanges industriels (hors produits pétroliers et agroalimentaires) s’est aggravé de – 6,7 milliards d’euros en 2005 à – 44,4 milliards l’an dernier. Seul motif de satisfaction, les matériels militaires, avec un excédent de +4,4 milliards, mais qui ne représente, cependant, que 0,2 % du PIB.
F.P.
Pour en savoir plus :
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