Comment sécuriser la chaîne logistique dans des pays comme la Russie ou l’Algérie ?
En mettant en place des procédures internes pour maîtriser le transport, en s’informant des évolutions, en s’adaptant aux réglementations divergentes et en protégeant ses données.
Dès qu’une marchandise entre dans un pays, il y a un risque douanier, qui est principalement un risque fiscal et financier. « Et si la réglementation offre de plus en plus de simplifications, elle est aussi de plus en plus complexe et potentiellement source d’erreurs », explique Jean-Michel Thillier, sous-directeur du commerce international à la direction générale des Douanes et des droits indirects.
C’est pourquoi les entreprises doivent s’informer. Ainsi, avec l’entrée en vigueur de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Corée du Sud, le 1er juillet prochain, le certificat d’origine préférentielle Eur 1, qui conférait certains avantages à l’exportateur, est abandonné. « Il sera remplacé par une autorisation de la Douane donnant à l’entreprise la qualité d’exportateur agréé (EA), ce qui permettra à l’EA de bénéficier du taux zéro à l’entrée sur le marché coréen », précise Jean-Michel Thillier.
De même, les exportateurs ont tout intérêt à s’adapter aux règles en vigueur, différentes selon les pays. En Russie, le délai de dédouanement est d’une demi-journée à deux jours. « C’est beaucoup plus qu’en France, où 6 min 19 s en moyenne sont nécessaires pour une opération d’import-export, mais c’est beaucoup moins qu’en Algérie, où il faut compter cinq jours ouvrables », compare Hubert Paquentin, responsable des douanes France chez Daher.
À l’inverse, le coût de dédouanement est bien supérieur en Russie : 450 à 1 000 euros. « Il faut y intégrer le prix de certaines pratiques locales qualifiées de rémunérations parallèles et le poids d’une documentation étonnante et aberrante à produire à chaque opération », expose encore Hubert Paquentin. Toutefois, selon Catherine Joffroy, associée chez Salans et spécialiste de l’Europe orientale, la situation pourrait changer dans les mois à venir, avec la mise en place en juillet de l’Union douanière entre la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan. La documentation papier pourrait être remplacée par un système informatique. Toujours est-il qu’aujourd’hui, les tarifs de dédouanement en Algérie sont moindres : entre 80 et 260 euros, en fonction du mode de transport.
Le transport est un élément de la chaîne logistique, qu’il faut « absolument maîtriser en interne », insiste Michel Abgrall-Lévy, consultant spécialiste du transport et de la logistique, co-auteur du guide Moci Les Règles Incoterms 2010. « Externaliser cette fonction pour que cela coûte moins, certes. Mais il faut d’abord penser à la maîtriser chez soi, afin de pouvoir exercer un contrôle quand elle est externalisée », souligne-t-il. D’où l’importance de connaître parfaitement son outil informatique.
« Il y a 25 ans, l’informatique douanière n’existait pas. Aujourd’hui, les flux documentaires, à l’import comme à l’export, sont dématérialisés. Pour s’adapter, les entreprises doivent s’assurer que les données sont bien protégées », conseille Alban Gruson, P-dg de Conex, éditeur de logiciels douaniers. Parmi les nations émergentes, la Russie est aussi le pays le plus risqué en matière d’assurance. Les compagnies spécialisées ne sont pas toutes fiables et les couvertures proposées sont de qualité inégale. « Dans l’Union européenne, un assureur français peut délivrer des prestations de services d’assurances au bénéfice d’une entreprise implantée dans un autre État membre. Ce système, dit de la LPS, est interdit dans les pays émergents », observent François Sivignon et Denis Fleureau, respectivement responsable du développement transverse (Afrique) et conseiller technique ferroviaire de Groupama Transport. Il convient donc de souscrire une assurance, dite de rang 1, auprès de l’assureur agréé sur place et, si la réglementation locale ne l’interdit pas, une assurance offshore, dite de rang 2, permettant de compléter les garanties locales.
François Pargny