La dernière réunion des ministres et secrétaires d’Etat en charge du Commerce du G20 –les 20 premières puissances qui cumulent 80 % du commerce mondial-, à Shanghai les 9 et 10 juillet, en vue de préparer le Sommet du G20 des 4 et 5 septembre prochain à Hangzhou, n’aura pas permis d’avancée vraiment décisive sur les dossiers qui préoccupent actuellement les dirigeants économiques de la Planète, en premier lieu l’atonie de l’économie mondiale. Mais elle a été marquée par une évolution dans la volonté politique de s’attaquer à certaines causes du marasme actuel.
Le contexte, rappelé par la déclaration finale, est en effet morose. Le commerce international n’a pas retrouvé sa vigueur d’avant la crise de 2008, progressant à un rythme inférieur à 3 % l’an depuis 2009 au lieu de 7 % par an en moyenne entre 1990 et 2008. Et dans le contexte du ralentissement économique mondial, le protectionnisme est en forte hausse, y compris dans les pays du G20 eux-mêmes….
D’un côté engagement d’ouverture, de l’autre montée du protectionnisme…
La déclaration finale reflète cette atmosphère paradoxale, comme le soulignent de nombreux commentaires des journaux*.
Car d’un côté la déclaration finale affirme que « la reprise économique mondiale demeure inégale » et que « le commerce et l’investissement doivent rester les moteurs essentiels de la croissance », s’engageant à promouvoir « une croissance durable, inclusive et robuste du commerce et de l’investissement » et à « mieux communiquer les bénéfices d’une ouverture » des échanges à un « plus large public ».
De l’autre elle constate que « en dépit d’engagements répétés, le nombre de nouvelles mesures imposées par les membres du G20 et restreignant les échanges de biens et services atteint un rythme mensuel record depuis que l’OMC a commencé ses décomptes en 2009″. En outre, « environ les trois quarts des mesures enregistrées depuis 2008 sont toujours en vigueur, le nombre de mesures protectionnistes imposées par les membres du G20 affectant tout autant les biens que les services a atteint la moyenne mensuelle la plus élevée depuis que l’OMC a commencé ses décomptes, en 2009 »
Cependant, la déclaration finale reconnaît aussi la persistance de « problèmes structurels » et de leur impact négatif sur « le commerce et les travailleurs », incluant « les surcapacités dans certaines industries», dont l’acier, problèmes qui appellent des « réponses collectives ». Une reconnaissance jugée importante alors que le G20 commerce se tenait en Chine, à l’origine de la surproduction mondiale actuelle d’acier qui lui vaut en retour une avalanche de mesures antidumping, et que la réunion était présidée par le ministre chinois du Commerce Gao Hucheng. A la presse, le vice-ministre chinois au Commerce Wang Shouwen s’est d’ailleurs lâché : « Pendant que certains pays (également responsables) débattent encore des mesures souhaitables, les autorités chinoises sont déjà dans l’action » pour restreindre l’appareil de production des groupes étatiques aurait-il lancé à la presse.
Adoption d’une stratégie de croissance commerce global
Au-delà des déclarations d’intention générale, plusieurs documents importants et nouveaux ont été adoptés lors de cette réunion et figurent en annexe du texte final : la stratégie du G20 pour une croissance du commerce global /SGTG (G20 Strategy for Global Trade), destinée à contribuer à l’objectif d’atteindre 2 % de plus de croissance mondiale à l’horizon 2018, et des Principes directeurs pour l’élaboration des politiques d’investissement (G20 Guiding Principles for Global Investment Policymaking)*.
La SGTG, notamment, identifie sept priorités dont : la réduction des coûts du commerce grâce à l’adoption de l’accord sur la facilitation du commerce (Trade Facilitation Agreement / FTA), en cours de ratification dans le monde ; le renforcement de la cohérence des politiques commerciales et d’investissement ; la stimulation du commerce des services ; le renforcement des sources de financements du commerce, notamment dans les pays les plus démunis ; le développement d’un indicateur des perspectives du commerce mondial ; la promotion du développement e-commerce ; mieux relier le commerce et développement.
Engagement à conclure avant fin 2016 l’accord sur les biens environnementaux
La déclaration finale relève également que les accords « plurilatéraux » sous l’égide de l’OMC, avec une « large participation », peuvent jouer un rôle important pour compléter les initiatives plus globales favorisant la libéralisation des échanges.
Ont ainsi reçu le soutien du G20 l’Accord sur les technologies de l’information et sa récente extension (Information Technology Agreement et Expansion Agreement), le projet d’Accord sur le commerce des services (Trade in services Agreement), dont les négociations sont en cours, et enfin l’Accord sur les biens environnementaux (Environmental Goods Agreement / EGA), également en cours de négociation. Concernant l’EGA, le G20 s’est engagé en particulier à conclure les négociations avant la fin de l’année, à l’occasion d’une réunion ministérielle spécifique qui suivra le Sommet de Hangzhou.
Dans un communiqué, le secrétaire d’Etat français au Commerce extérieur qui représentait la France à ce G20 ministériel, a salué ce dernier engagement. « En réduisant les droits de douane sur les biens qui contribuent à faire baisser les émissions de CO2 et protègent l’environnement, EGA est la première étape de la mise en cohérence des politiques commerciales et environnementales souhaitée par la France » commente Matthias Fekl.
Ce dernier indique également avoir « pour la première fois présenté et défendu le modèle de cour de justice des investissements dans une enceinte multilatérale ». Une référence au projet de cour de justice internationale devant remplacer l’arbitrage privé dans les nouveaux accords de libre-échange négociés par la Commission européenne et « accepté par plusieurs partenaires internationaux comme le Canada ».
C. G.
*Les versions en anglais de la déclaration finale et des différentes annexes sont d’ores et déjà téléchargeables sur le site suivant de l’Université de Toronto, très complet sur le suivi des réunions du G20 : www.g20.utoronto.ca/
Pour prolonger :
– Technologies de l’information / OMC : accord à Nairobi sur le calendrier ITA de baisses des droits de douane sur les produits TIC
– Commerce international/TI : accord à l’OMC pour réduire les droits de douane sur plus de technologies de l’information
– UE/OMC : la ratification de l’Accord sur la facilitation des échanges en bonne voie
– OMC : l’accord sur la facilitation du commerce sur les rails