Lors du diagnostic export, on va s’intéresser à tous les services de l’entreprise pour valider ensuite, service par service, les forces et faiblesses au regard d’une démarche export.
En premier lieu, et même si parfois le dirigeant de la société s’en étonne, il faut commencer par le « service décisionnaire » dans l’entreprise, c’est-à-dire la direction.
2.1 La direction / le management
Les points à aborder et à investiguer sont les suivants :
– L’histoire de l’entreprise, son actionnariat, son dirigeant
Ceci permet de s’imprégner de la culture de l’entreprise. C’est une première approche de la logique d’entreprise, de sa stratégie. Dans cette partie, on va aussi s’intéresser au métier de l’entreprise.
– Le projet de l’entreprise à l’international
Il est nécessaire que le dirigeant s’exprime sur son implication personnelle et son engagement dans le processus de validation du projet de l’entreprise à l’export.
Important !
Lorsque le dirigeant n’est pas convaincu du bien-fondé de la démarche de son entreprise à l’international, le projet export est voué à l’échec.
Il est aussi intéressant que le dirigeant s’exprime sur l’image qu’il a de son entreprise : la considère-t-il comme une entreprise leader ou plutôt suiveuse sur son marché ? Ainsi pourra-t-on comparer sa perception à celles de ses collaborateurs voire à celle du marché lors de l’étude de marché (voir Étape 3 « L’étude de marché »).
– L’environnement concurrentiel
Le dirigeant a généralement une bonne connaissance de ses concurrents. Des questions précises relatives aux concurrents directs permettront de confirmer le cas échéant sa position de leader sur son marché domestique, démontrant ainsi ses qualités potentielles à l’international.
– Le métier de l’entreprise
Comme nous venons de l’évoquer, le primo-exportateur, qui connaît bien son métier et ses concurrents français, peut également bien connaître ses concurrents internationaux, car ceux-ci sont peut-être déjà présents sur son marché domestique.
Dans cette phase, il est nécessaire de déterminer les segments de marché/les activités dans lesquels l’entreprise occupe une position de leader, ou encore les segments de marché où la société est innovante, voire les segments de marché porteurs. En effet cela permettra d’affiner la gamme de produits à exporter ainsi que les segments de marché qu’il faudra cibler en priorité lors de la démarche export.
Le chef d’entreprise doit s’interroger sur ses principaux clients : ceux-ci sont-ils connus à l’international ? Cela permettra le cas échéant de mettre en avant la notoriété du primo-exportateur en tant que fournisseur et constituera par ailleurs un point positif dans le diagnostic export.
– L’organigramme
Comme on s’intéresse aux divers services de l’entreprise, il faut examiner l’organigramme. Celui-ci permet d’identifier facilement les services et les responsables qui seront concernés par la démarche export.
– Les chiffres
Il est intéressant à ce stade de savoir si l’entreprise est en progression en termes de chiffre d’affaires, si sa santé financière est bonne, si elle réalise déjà des ventes à l’export, même très limitées.
L’évolution à la baisse du nombre de salariés dans l’entreprise peut soit traduire une baisse d’activité, soit au contraire une rationalisation de la production par des investissements indiquant une volonté ou une nécessité d’exporter.
2.2 Le service production
C’est un point évident à vérifier dans le cas des primo-exportateurs ayant une activité industrielle.
– Capacité de production
La première question à poser est : l’entreprise a-t-elle une capacité suffisante pour faire face à un surcroît de commandes en provenance de l’export ? Outre ce point important, il faut s’interroger sur sa capacité à stocker les commandes export avant expédition et aussi à stocker les matières premières complémentaires liées à ces commandes.
– Évolution de la capacité de production
Il est également nécessaire de valider l’évolution de cette capacité de production : soit l’entreprise fait appel à la sous-traitance, soit elle a les moyens financiers en interne pour investir ou la possibilité de trouver des financements extérieurs. Dans ce dernier cas, le délai de réalisation de l’investissement doit être vérifié.
– Flexibilité de l’outil de production
La flexibilité de l’outil de production est primordiale pour que l’entreprise soit capable de répondre rapidement à une demande de client export urgente ou encore livrer la marchandise en temps et en heure, avant le départ d’un navire, par exemple.
– Conditionnement/emballage
Souvent dépendant en partie de la production, ce service doit être en position d’offrir des conditionnements et emballages adaptés au transport export et ce, en liaison avec le service achats.
– Coûts de production
Si l’entreprise primo-exportatrice veut rivaliser sur les marchés export avec la concurrence, la compétitivité de ses coûts de production est essentielle. Une étude des coûts fixes et variables liés à l’opération export est indispensable.
Avis d’expert Fidal
Le diagnostic de votre produit
Avant toute commercialisation de son produit à l’étranger, le primo-exportateur devra étudier la règlementation locale applicable à son produit. Il devra distinguer les règlementations obligatoires, dont le non-respect est passible de sanctions voire d’une interdiction de mise sur le marché, des normes techniques facultatives qui, faute d’être observées, n’engendrent qu’un handicap commercial. Pour ce faire, le primo-exportateur devra identifier, parmi les normes édictées par des organismes de normalisation, celles rendues obligatoires par les autorités publiques et savoir s’il est nécessaire que la conformité de son produit à ces normes soit prouvée par une certification ou un label de conformité (le marquage CE, par exemple, atteste la conformité du produit aux exigences définies au niveau de la santé, de la sécurité et de la technicité par le Comité européen de normalisation et permet sa libre circulation sur le territoire de l’Union européenne).
2.3 Le service commercial
Il s’agit ici de repérer quelles personnes au sein du service commercial sont ou seront capables de prendre en charge le développement export.
Dans cette éventualité, les points à vérifier seront entre autres :
– la connaissance de langues étrangères ;
– l’expérience à l’international dans un poste précédent ;
– la capacité à recevoir des appels téléphoniques ou des courriels en langue étrangère…
Si aucune langue étrangère n’est parlée dans l’entreprise, il faut peut-être repérer les personnes qui,
par leurs origines ou leur goût pour les cultures étrangères, ont une capacité à travailler avec des
pays étrangers et qui pourraient être des commerciaux potentiels export ou des assistant(e)s commerciaux export.
Le conseil de Pierre
L’entreprise a peut-être parmi ses commerciaux « France » des personnes qui auraient envie de « passer » à l’export.
Ces personnes connaissent bien l’entreprise elle-même, ses produits/services.
Elles ont une aptitude à la négociation, peut-être pas à l’international soit, mais leur donner leur chance à l’export peut être un moyen d’évolution pour elles et un facteur de motivation supplémentaire !
2.4 Le service des achats
Curieusement, il est rare que dans les diagnostics export, le service achats soit audité. Il nous paraît cependant nécessaire de vérifier certains points.
Le service achats doit lui-même vérifier auprès des fournisseurs actuels de l’entreprise si ceux-ci sont à même de livrer des quantités supplémentaires en cas d’accroissement de la production.
Dans la négative, le service achats devra être capable de trouver de nouveaux fournisseurs afin de suivre le cas échéant l’augmentation des commandes !
2.5 Les finances
L’aspect financier a peut-être déjà été discuté avec la direction de l’entreprise. Néanmoins cela vaut la peine de revalider la capacité financière de cette dernière à suivre le développement international (investissements en personnel et matériel).
À ce stade, les problèmes de trésorerie, de relations avec les banques, la connaissance des possibilités d’aides financières export telles que l’assurance prospection Coface ou les prêts export d’Oséo seront abordés (voir les contacts à la fin de cette étape et le détail de ces aides financières en annexe de ce guide).
On s’intéressera aussi à la capacité du service financier à gérer des modes de paiement internationaux, des règlements en devises étrangères voire tout simplement à émettre des factures en anglais (voir Étape 7 « Sécuriser le contrat »).
Le conseil de Pierre
Une question sur les Incoterms constitue un bon indice de la connaissance ou tout du moins de l’intérêt du service financier pour l’international (voir aussi Étape 6 « Préparer l’expédition »).
Sachant qu’« exporter, c’est s’adapter », il faut également vérifier quelles sont les conditions de règlement habituelles de l’entreprise, si celle-ci est capable de les modifier pour s’adapter à des conditions de règlement plus souples (délais supplémentaires de paiement, par exemple).
2.6 Les produits/services et leur environnement
Nous abordons ici la question de savoir si l’on va exporter un produit global, c’est-à-dire identique pour tous les marchés, ou local, c’est-à-dire adapté au pays cible.
Voici les bonnes questions à se poser :
– Les produits/services sont-ils innovants ? banalisés ? haut de gamme ? bas de gamme ?…
Le but est d’essayer de comprendre les chances de succès, de définir les choix de gammes à exporter et par conséquent la politique de prix à mettre en place.
– Les produits/services sont-ils plutôt dans une phase de croissance, de maturité ou en déclin ?
Comme précédemment, la réponse à cette question nous ouvrira des perspectives à l’export. Cependant il faudra vérifier si ce produit ne se trouve pas dans une autre phase de développement sur d’autres pays ciblés.
– Les produits/services nécessitent-ils un emballage particulier pour l’export ?
Cette question est fondamentale car, même dans l’Incoterm le plus simple pour l’exportateur, la responsabilité au niveau de l’emballage revient à ce dernier (voir Étapes 6 « Préparer l’expédition» et 8 « L’expédition »).
– Les produits/services nécessitent-ils un service après-vente (SAV) local ?
Bien sûr, exporter des produits qui nécessitent un SAV est courant. Deux possibilités :
• soit votre entreprise a les moyens d’assurer un SAV efficace à partir de France ;
• soit il y a nécessité de localiser un SAV dans les pays ciblés.
– L’entreprise a-t-elle déjà réfléchi à une gamme export ?
L’entreprise a peut-être déjà réfléchi à une gamme export réduite, car il est évident que transporter des produits au-delà des océans, par exemple des solvants, même techniques, semble une gageure compte tenu du prix des produits et du coût de transport.
– Les produits/services doivent-ils se conformer à des normes spécifiques ?
Là encore l’entreprise, qui connaît son métier, n’ignore pas les normes locales sur le marché français. Même si on ne lui demande pas de connaître sur le bout des doigts les normes/réglementations obligatoires à l’international, elle doit être en position de trouver ces normes et de faire évoluer ses produits afin qu’ils y répondent. De même, elle doit être capable d’adapter les produits aux demandes des clients étrangers.
– L’entreprise a-t-elle une liste de prix pour son marché domestique et une liste de prix export ?
Cette question soulève le problème de la structure de prix pour la gamme de produits que l’entreprise veut exporter. Il est indispensable que le primo-exportateur réalise qu’il devra avoir une certaine flexibilité dans sa politique de prix export. Une politique de prix élevée ne sera possible que si le produit est innovant, unique ou de haut de gamme.
– Les produits/services ont-ils des noms de marque ?
Si les noms de marque semblent compréhensibles à l’étranger, cela constitue un point positif. Dans le cas contraire, il faudra les adapter.
– Les produits/services sont-ils protégés par des dépôts de marque ou de brevets à l’international ?
Il s’agit de voir si les produits peuvent être copiés et de s’assurer par exemple de la pérennité de la marque ou du savoir-faire (know how) à l’étranger.
– Quels sont les outils de promotion ?
Dans cette recherche, on compilera toutes les formes de documentations : plaquettes d’entreprises, sites Internet, fiches techniques des produits…
Cette étape réalisée, il faudra identifier les documents nécessaires à la promotion de l’entreprise et les faire traduire au moins en anglais voire dans la langue locale lorsqu’un pays sera ciblé (voir aussi Étape 4 « Communiquer »).
– Comment sont vendus les produits/services sur le marché domestique, et par quels réseaux de distribution ?
Cette question permettra à l’entreprise non seulement d’envisager si ce mode de distribution est compatible avec les futurs marchés export mais aussi d’établir une chaîne de distribution, en passant par les divers services de l’entreprise jusqu’au client final.
Ceci permettra par la même occasion de voir les points de blocage lié au processus de vente export.
Un point particulier sera fait sur la logistique afin de vérifier si les contraintes de livraison à l’export peuvent être compatibles avec l’organisation de l’entreprise. Si l’entreprise a déjà l’habitude de travailler avec un transitaire dit international ce point sera noté de manière favorable (voir aussi Étapes 6 et 8).
Check-list des points essentiels
– Auditer tous les services sans exception
– Valider l’engagement de la direction dans la démarche export
– Étudier avec précision les produits/services et leur environnement