Quand il faut choisir un commissionnaire de transport, plusieurs techniques peuvent être utilisées.
Le vieux copain, le copain du copain, le « bouche à oreille » ou encore le plus proche de chez soi… Ces solutions ne sont pas forcément les plus mauvaises, au moins quant au résultat. Si l’on veut adopter une démarche plus industrielle, on optera pour l’appel d’offres sur la base d’un cahier des charges.
2.1 Établir un cahier des charges
Les cahiers des charges sont des documents contractuels qui « déterminent les conditions dans lesquelles les marchés sont exécutés » (source : Article 13 de l’annexe au décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics).
Le cahier des charges et ses annexes, une fois approuvés et signés par les parties ont donc valeur de contrat.
Que doit contenir un cahier des charges ? Toutes les informations qui permettront au prestataire de bien effectuer sa prestation.
Le texte du cahier des charges présenté ci-dessous l’est à titre d’exemple et n’a surtout pas valeur de cahier des charges type. Toutefois, nous nous réfèrerons, dans le déroulé qui suit, à certaines de ses clauses.
Exemple de cahier des charges
1. Présentation de la société
2. Qualité
3. Typologie de la marchandise
4. Typologie des clients
5. Conditionnement et supports de charge utilisés
6. Manutention des marchandises
7. Étiquetage
8. Documents de transport
9. Échange des informations
10. Livraison, localisation, horaires et procédure
11. Chargement
12. Suivi des performances
13. Modes de facturation, règlement, tarifs
14. Droit applicable
15. Assurance
16. Refus/retours
17. Annexes
Joindre en annexe, si nécessaire, les documents suivants :
– le plan transport
– la carte des délais
– les consignes et le protocole de sécurité
– le cahier des performances
2.2 Critères de choix d’un prestataire
Les critères de choix d’un commissionnaire de transport doivent porter sur la probabilité pour ce commissionnaire de réaliser correctement sa prestation, à savoir :
– analyse des réponses à l’appel d’offres, en termes de techniques et de prix ;
– formulation de propositions complémentaires ;
– visite des locaux, si possible aux deux bouts de la chaîne ;
– rencontre et entretiens avec les futurs chargés du compte ;
– rencontres avec d’autres clients aux besoins comparables.
Il est toujours préférable de procéder à une analyse de résultats à plusieurs, de services différents, transport, quai de l’établissement expéditeur, de l’établissement destinataire (en intra-groupe), production ou service après-vente (SAV) si ce sont des « clients » de la prestation …
Les réponses aux points 12 « Suivi des performances » et 13 « Modes de facturation, règlement, tarifs » doivent être particulièrement étudiées car ce seront les points d’achoppement ou de réussite de la prestation.
Ne jamais oublier qu’une fois signé, le contrat peut devenir la galère de tous, commissionnaire et client. Il conviendra alors de ramer dans le même sens.
2.3 Assurer le suivi de la qualité
Si l’on a pris le temps d’écrire un cahier des charges, de faire un appel d’offres, de l’étudier et de mettre en place une solution, c’est que cela en valait la peine, que les flux étaient importants. Importants en valeur, volume, fréquence, peu importe le critère. Il faut donc suivre la qualité de cette prestation !
En fait, il s’agit de la partie la plus sensible et intéressante de la prestation. Le suivi doit être fait avec deux objectifs :
– savoir de quoi on parle ;
– améliorer la prestation.
Savoir de quoi on parle
Prenons comme exemple des expéditions d’un camion complet toutes les semaines paires (sauf août et Noël) et sur un montant de « x euros + x% de gazole ». Départ le lundi matin et arrivée le vendredi avant 17h00.
Ça, c’est la théorie, les prévisions. Mais de quoi la réalité est-elle faite ? De plein d’autres questions :
– Combien y a-t-il eu de camions, mois par mois ?
– Étaient-ils tous complets à chaque fois ?
– Les sommes réellement payées correspondent-elles au tarif négocié multiplié par le nombre de camions ?
– Ont-elles été correctement payées ? Y a-t-il eu des retards de paiement, pourquoi ?
– Les départs se sont-ils tous effectués comme prévu, le lundi matin ?
– Surtout, les arrivées se sont-elles toutes produites comme prévu, le vendredi avant 17h00 ?
– Toutes les livraisons se sont-elles passées sans dommages, y a-t-il eu des réserves, de la casse ?
Il faut récupérer ces informations de manière régulière et fiable.
Récupérer les informations
Qui est en possession de tous ces éléments ?
– Pour le nombre de camions : mon service expédition, le destinataire et le transporteur.
– Pour savoir s’ils étaient complets : mon service expédition et le destinataire.
– Pour les sommes payées : ma comptabilité (important) et le transporteur.
– Pour les départs : mon service expédition et le transporteur.
– Pour les arrivées : le destinataire et le transporteur.
– Pour les réserves à l’arrivée : le destinataire et le transporteur.
On voit qu’à l’exception du caractère complet du camion, toutes les autres informations sont connues du transporteur. Alors autant lui demander de me restituer ces informations. C’est dans le point 12 « Suivi des performances » du modèle de cahier des charges (voir § 2.1) que nous allons lui demander qu’il nous fasse parvenir régulièrement, tous les mois par exemple, un petit tableau (le tableau doit toujours être petit, sinon ça va l’effrayer) contenant ces informations.
Exemple de tableau
Rubriques à faire figurer dans le tableau à remplir par le transporteur
– Mois
– Nombre de camions
– Départs à l’heure
– Arrivées à l’heure
– Réserves
– Facturé
Prévoir des audits
Mais comment faire confiance au transporteur ? La confiance n’excluant pas le contrôle, toujours dans le même chapitre du cahier des charges, prévoir des audits. Lui préciser que une ou deux fois par an, vous ferez un audit de ces informations. Il n’y a rien de pire que d’arriver à une négociation, en cours de prestation, sans savoir le nombre de camions, les montants facturés, comment ces montants ont été payés. En ce qui concerne la qualité, nous en parlons dans le paragraphe suivant.
L’objet de cet audit est de vérifier que les informations que le transporteur nous a transmises sont exactes et qu’ainsi on a une idée des valeurs et des volumes en jeu pour la renégociation des conditions.
Plusieurs possibilités :
– quand c’est possible et judicieux, les audits sont à réaliser avec le prestataire, chez lui, au moment où la marchandise est traitée par lui ;
– dans le cas d’expédition de camions complets, en direct de chez moi à chez mon client, il n’y a pas de passage chez le transporteur, donc pas de nécessité d’y aller;
– s’il y a passage à son quai de la marchandise, il convient de faire l’audit à ce moment-là, pour voir comment la marchandise est traitée et quelles sont les (éventuelles) difficultés rencontrées par ceux qui la traitent ;
– certains donneurs d’ordres (clients) sont partisans de visites-surprises. Si la confiance n’exclut pas le contrôle, celui-ci doit être fait avec un minimum de respect du prestataire, ce que les visites-surprises ne supposent pas.
Qu’il y ait visite chez le prestataire ou pas, l’audit consiste à vérifier les données que le prestataire nous a fournies, pour une période donnée.
Exemple
Les livraisons ont commencé en septembre, nous sommes en juin et venons de recevoir les données du mois de mai. Compte tenu du nombre de livraisons par mois (2 ou 3), il n’y a pas de problème pour récupérer les informations depuis le début, soit 10 mois, soit 18 expéditions (environ).
L’audit va porter sur les départs, les arrivées et les réserves.
Pour cela, nous allons demander au transporteur de nous renvoyer les photocopies des CMR (le document de transport, la lettre de voiture) qui ont accompagné la marchandise.
En comparant les heures et dates des cases 21 et 24 de la CMR, nous avons toutes les dates et toutes les heures de départ et toutes les dates et toutes les heures d’arrivée, il reste à vérifier qu’elles correspondent aux bons lundis pour les dates de départ et aux bons vendredis pour les dates d’arrivée.
Améliorer la qualité de la prestation
Comment faire, quand ça va bien, pour que ça aille mieux ? Ici, nous allons parler de qualité des transports.
Il est primordial, pour faire de la qualité dans les transports, de partir d’une situation stable et d’un niveau de qualité satisfaisant. Grâce à l’audit, nous savons maintenant si nos expéditions sont parties à l’heure et, surtout, sont arrivées à l’heure.
Si c’est le cas, cela veut dire que le transporteur respecte bien ses engagements. C’est un bon début. Si ce n’est pas le cas, il faut étudier avec lui le moyen de respecter ces contraintes. Il n’y a pas de recette miracle, c’est dans la discussion, l’échange que l’on peut trouver la solution.
Ne pas oublier qu’une solution est de modifier les contraintes. Si un départ lundi matin pour une arrivée vendredi avant 17h00 est trop court, irrégulièrement suivi, alors il faut allonger le délai. Essayer un départ le dimanche soir ou une arrivée le samedi matin. L’objectif est d’arriver à une situation saine, où le transporteur respecte ses engagements quasiment « à tous les coups ».
À partir de là, est-il possible de mieux faire ? C’est d’abord avec le transporteur qu’il faut voir ça.
Avec le temps, vous pouvez vous apercevoir que les heures peuvent « glisser ». Par exemple, qu’au lieu de partir avant 12h00, le camion part vers 14h30, 15h00 ou 16h00 ; et qu’au lieu d’arriver avant 17h00, il arrive avant 16h00, 15h00 voire en fin de matinée.
De ces constats, il faut suivre une piste qui est la suivante : si cela arrive une fois, que faut-il faire pour que ça arrive tout le temps ? En clair, qui doit faire quoi ?
En discutant avec le transporteur, quelquefois avec le chauffeur pendant le chargement (si la langue le permet), on peut trouver des possibilités d’améliorations.
Dans le cas d’un complet de porte-à-porte, c’est-à-dire d’un camion qui est chargé dans l’usine de départ et déchargé dans l’usine d’arrivée, il faut bien avouer qu’il n’y a pas beaucoup de pistes d’amélioration des délais. Avec des flux répétitifs, il faut absolument approcher les 100 % de délais respectés sans casse ni réserve.
Bien sûr, le bon sens est de rigueur. Dans l’exemple précédent, une expédition par semaine paire, sauf août et Noël, cela laisse un peu plus de 20 expéditions par an. Alors un raté = 4,5 à 5 % des expéditions. N’empêche, de 5 en 5, il faut approcher 100 !
Check-list des points essentiels
Pour choisir un commissionnaire de transport, les points essentiels sont :
– bien définir les besoins de l’entreprise dans le cahier des charges ;
– impliquer les différents services de l’entreprise dans le cahier des charges ;
– bien définir les critères de choix de mon prestataire ;
– impliquer les différents services de l’entreprise dans l’établissement des critères de choix ;
– définir des critères-qualité raisonnables ;
– impliquer les différents services de l’entreprise dans le suivi qualité, chacun pour ce qui le concerne ;
– les impliquer dans les audits.