Par Laure Marcellin
Quelle que soit l’activité et la taille d’une entreprise, a fortiori celles tournées vers l’international, il est important, pour maîtriser ses coûts et donc sa rentabilité, d’avoir une politique d’achat organisée, sérieuse et rigoureuse.
Que le service achat soit représenté par une seule personne ou un service complet, il est devenu ces dernières années une fonction clé. En effet, face à la stagnation des chiffres d’affaires, acheter bien devient aujourd’hui un passage obligé pour maintenir, voire améliorer les marges de toute entreprise. Un autre événement est venu renforcer le rôle de l’acheteur : la mondialisation. On n’achète plus seulement sur son territoire mais dans le monde entier.
Mais savons-nous vraiment quel rôle tient cette fonction ? Et plus particulièrement les personnes en charge de ces fonctions ? Qu’est-ce qu’un acheteur ? Quelles sont ses missions ? Quelles sont ses fonctions ?
Enfin, comment devient-on acheteur ? Quelles sont les formations à ce métier ?
Voici un panel de questions auxquelles nous allons répondre pour vous aider à comprendre le rôle essentiel de cette fonction dans toute entreprise et, surtout, pourquoi l’acheteur à l’international requiert des capacités et des connaissances précises et pointues.
Acheter, en reprenant la définition du dictionnaire : « Acquérir un bien ou un service contre paiement. »
Acheter peut sembler une simple formalité.
Pourtant, la mission de l’acheteur ne se limite plus au simple acte de choisir et payer un produit ou un service : le métier a beaucoup évolué au cours des trente dernières années.
1.1 L’évolution de la fonction
Dans les entreprises, avant de parler achat, c’est la notion d’approvisionner qui était employée. Il fallait s’assurer que le stock était suffisant, de s’approvisionner en conséquence et de connaître les termes de contrat avec les fournisseurs.
Puis l’acheteur est apparu. Il est devenu la personne chargée de rechercher les fournisseurs « pouvant répondre aux besoins de l’entreprise en termes de qualité, de coûts et de délais ». C’est ainsi que les appels d’offres et contrats ont fait leur apparition.
Au début des années 2000, l’acheteur devient un cost killer, « un tueur de coûts » où le seul leitmotiv est de réduire les factures, d’acheter au plus bas. Au détriment parfois de la qualité, du service et de l’éthique.
Aujourd’hui, la fonction d’acheteur s’est valorisée, ennoblie, voire enrichie : l’acheteur est celui qui permet de nouer des partenariats, de conserver des marges, de rechercher l’innovation jusqu’à contribuer à améliorer ou à maintenir l’image de l’entreprise à travers le développement d’une politique d’achats durables. Ainsi, la fonction achat s’étend dans l’entreprise : on assiste à l’arrivée des « gestionnaires de dépenses ».
Il existe toutefois une différence notable chez l’acheteur selon que l’on soit dans une petite ou une grande entreprise.
1.2 Les différentes organisations
Il convient de distinguer deux grands axes. L’organisation de la fonction achat ne sera pas la même selon la taille et l’organisation de l’entreprise.
Dans les PME
Dans les PME, la mission de l’acheteur est d’acheter les produits ou les services dans les meilleures conditions (coûts, marges, qualité, délai de livraison). Le travail va consister en :
– définir, avec les services concernés ou la direction générale, les produits à acheter ;
– prospecter et sélectionner les fournisseurs à travers le monde ;
– choisir et tester les produits ou les services ;
– participer à des salons professionnels internationaux ;
– mener les négociations avec les fournisseurs en fonction des termes de ventes souhaités ;
– résoudre les litiges commerciaux et financiers.
L’organisation sera plus centralisée : une direction unique ou un poste unique (souvent une seule personne rattachée à la direction générale), soit parce que c’est stratégique, soit à cause de la petite taille de l’entreprise (jusqu’à environ 250 personnes).
Cette fonction peut être aussi gérée par le Directeur administratif et financier. Mais dans ce cas, la fonction achat est reléguée à une simple démarche de réduction des coûts, sans toujours tenir compte des autres aspects essentiels à l’activité, à savoir la qualité, l’innovation et la pérennité.
On peut gérer à la fois les achats production et hors production. Dans les petites entreprises, c’est souvent la même personne qui gère les services généraux et/ou la logistique : il est souvent multitâche pour des raisons d’organisation et de coûts.
Dans les plus grandes entreprises
L’organisation est souvent décentralisée, les achats étant dans ce cas rattachés à une « business unit » ou une direction.
Dans l’industrie, on retrouve ce schéma où l’acheteur fait partie d’un service structuré aux responsabilités bien définies et est spécialisé sur un métier.
Exemple d’une organisation achat chez un grand industriel français tourné vers l’international
Diverses activités, dans l’entreprise AL, nécessitent des achats. Les achats recouvrent des rubriques aussi diverses que les frais généraux (voyages, consultants…), l’énergie (électricité et gaz naturel), les achats de maintenance (pièces de rechange, prestation) et les achats d’investissement. Il y a une spécialisation et organisation particulière à chacune ;
– Les achats de frais généraux sont traités au niveau corporate.
– Les achats d’énergie (contrats complexes) sont fortement centralisés.
– Les achats de maintenance sont traités par des centres régionaux avec un management par zone (Europe), certains achats stratégiques sont centralisés au niveau de la zone.
– Les achats d’investissement sont traités par des centres internationaux d’ingénierie (Europe, Chine, États-Unis, Inde).
Concernant les achats d’investissement, il y a trois types d’acheteurs :
— le category director fixe la politique d’achat dans leur catégorie au niveau international. Le profil est international. À la base, presque toujours un profil d’ingénieur avec une formation complémentaire dans les achats, puis évolution au sein de la société ou expérience d’acheteur de haut niveau dans une autre société. Les category managers, profils de haut niveau, ont pour relais locaux les category buyers ;
— le category buyer décline au niveau de son centre la politique achat décidée par le category director mais il renseigne aussi le category director sur les tendances du marché dans sa zone géographique. Le category buyer est responsable de la négociation des achats des long lead items/équipements stratégiques. Le recrutement est local (par le centre), le profil est plutôt un profil d’ingénieur (souvent généraliste) compte tenu de la spécificité des achats, mais aussi des profils d’école de commerce (HEC, Essec…) avec une formation achat. Les category buyers peuvent évoluer à l’international comme category director. Profil de personne ayant un potentiel évolutif, parfois un premier poste après l’école, souvent une évolution après une première expérience technique dans le domaine de sa category ;
— le project buyer exécute le plan d’achat décidé dans le cadre d’un projet. Le profil est plus un AMT, recrutement local, souvent une évolution après un métier technique ou administratif. Ce type de mission peut être facilement sous-traité car ne fait pas appel à une spécificité de notre métier. Des sociétés de prestation peuvent offrir ses services (sous-traitance logée). Pour gérer plusieurs project buyers sur un même projet, il y a un procurement project manager (pas besoin de compétence technique forte mais d’une grande expérience des processus achats ; souvent sous-traitance logée).
Les achats de maintenance sont traités par des centres régionaux avec un management par zone (Europe). Donc, un profil recrutement local pour les régions avec un profil international pour les managers de la zone.