Matthias Fekl n’a pas manqué une occasion de le marteler avant de s’envoler pour le sommet des ministres européens du Commerce de Bratislava (23 et 24 septembre) : « La France va demander l’arrêt des négociations » du projet de traité de libre échange transatlantique, le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) a-t-il déclaré hier matin 23 septembre, à l’ouverture des rencontres AfricaFrance 2016 parrainées par son ministère (notre photo).
S’exprimant devant un public de chefs d’entreprises et hommes d’affaires français et africains, le secrétaire d’Etat français au Commerce extérieur s’en est même pris pour la première fois à la pratique américaine de l’extraterritorialité des lois : « nous souhaitons des négociations d’égal à égal », « nous souhaitons, quand on parle de partenariat, que l’on n’applique pas de lois extraterritoriales ». Une référence explicite aux sanctions infligées par les tribunaux américains à des banques françaises et européennes pour avoir effectué des transactions jugées illégales au regard des embargos américains du seul fait qu’elles ont été faite en US dollar.
Une déclaration commune de douze fédérations professionnelles
Ce durcissement de la position française a suscité l’inquiétude des milieux d’affaires français qui ne veulent pas d’une rupture dans les discussions. Dans un communiqué commun publié le 23 septembre, 12 fédérations et organisations professionnelles se disent convaincues que ce traité pourrait être « une opportunité pour les entreprises françaises, et particulièrement les PME » appellent à une poursuite des négociations : « Les entreprises françaises de l’industrie, des services et du commerce, représentées ici par leurs organisations respectives, demandent la poursuite des négociations entre l’Union européenne et les Etats-Unis jusqu’à ce qu’elles atteignent des résultats ambitieux et équilibrés sur l’ensemble des chapitres » indique ce texte commun.
« Nous sommes conscients qu’en l’état actuel des négociations, les propositions des Etats-Unis ne sont pas acceptables, les avancées étant largement insuffisantes, notamment sur l’accès des entreprises européennes aux marchés publics américains, souligne le texte. A cet égard, il faut éviter des négociations bâclées et conclues dans la précipitation, qui se feraient au détriment des intérêts fondamentaux des entreprises françaises ». Mais pas question de rompre : « l’abandon pur et simple de ce projet transatlantique, de portée historique, après seulement trois ans de discussions, nous paraît être un acte d’extrême gravité, lourd de conséquences, et à ne pas commettre de façon précipitée ».
Quoiqu’il en soit, l’Europe étant divisée sur ce sujet -12 Etats membres sont favorables à la poursuite des négociations **-, et la position de Paris étant interprétée par de nombreux observateurs comme ayant tout autant des objectifs d’influence sur les positions des négociation que des objectifs de politique intérieure (rassembler à gauche), le mandat de la Commission européenne, qui négocie pour les 28, ne devrait pas être remis en cause.
C.G
* Sont signataires : Association nationale des industries alimentaires (Ania) ; Cercle de l’Industrie ; Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA) ; Fédération de la plasturgie et des composites ; Fédération des industrie mécaniques ; Fédération française de l’assurance ; Groupe des fédérations industrielles (GFI) ; Chambre de commerce internationale (ICC) ; Les Entreprises du médicament (LEEM) ; Mouvement des entreprises de France (Medef) ; Union des industries chimiques (UIC) ; Union des industries textiles (UIT).
** Lire : UE / États-Unis : le TTIP ou la chronique d’une mort annoncée