« En Chine, les
premières victimes de la contrefaçon ne sont pas les entreprises étrangères,
mais les entreprises chinoises », déclare Raphaël Chantelot, avocat associé France-Chine du cabinet Lefèvre Pelletier & associés, lors d’une conférence sur la propriété
intellectuelle donnée par le cabinet le 23 février. La problématique du respect de la
propriété intellectuelle en Chine est partagée par les autorités chinoises qui
sont entrain de mettre en place un cadre juridique renforcé. En effet, les entreprises chinoises, rappelle Raphaël Chantelot,
déposent plus de 90 % des marques et brevets.
Les Chinois, explique Astrid de Pelleport, juriste au bureau de Shanghai de Lefèvre Pelletier, ne veulent plus du
« Made in China »,
désormais ils veulent du « Invented in China » et ils veulent que leurs marques apparaissent parmi
les 100 plus grandes marques mondiales. A cela s’ajoute le fait que le cadre juridique
a été renforcé, les autorités locales sont mieux sensibilisées aux
problématiques de propriété intellectuelle.
Les organes compétents
En Chine, le ministère du
Commerce et de l’industrie (SAIC) supervise l’Office des marques de la police
administrative (CTMO). L’autorité chargée de la qualité (AQSIQ) s’occupe, elle, uniquement de la
qualité des produits et non pas du droit des marques. Celle-ci
chaperonne le bureau de supervision de la qualité (BQTS). Le ministère de la sécurité
publique (MPS) chaperonne, pour sa part, le bureau de police (PSB). Enfin, l’autorité des douanes supervise le bureau des douanes.
Aussi, si la Chine possède environ 3 000
tribunaux, il faut s’adresser aux bons, prévient Astrid de Pelleport.
Pékin, Shanghai et notamment Canton possèdent des juridictions familières
avec les litiges impliquant des parties étrangères.
Les litiges qui concernent la
propriété intellectuelle ou des entreprises étrangères sont jugés en général au niveau de
la ville ou au niveau provincial. L’audience est courte, mais le rendu du verdict
est très long, avertit Astrid de Pelleport.
Quelle stratégie mettre en place
En premier, il faut adopter une stratégie de défense. Les Chinois, note Raphaël Chantelot,
commencent à être offensifs pour s’attaquer aux entreprises étrangères. L’offensive marche dans les deux sens. Lorsque l’adversaire attaque, il faut
contre-attaquer en choisissant une stratégie juridique qui sera pénale, administrative ou civile.
1/ L’entreprise peut faire appel aux autorités pénales.
Celles-ci vont effectuer des enquêtes via le bureau de police et les autorités
judiciaires qui vont identifier les contrefaçons. Il faut aller à la
source et s’attaquer aux sites de production ou aux sites de transport de la
marchandise.
La procédure pénale s’applique aux produits de qualité inférieure, la saisie sur le lieu du raid devant s’élever au minimum à 50 000 RMB
(environ 5 900 euros). La peine d’emprisonnement qui peut aller de 2 à 15 ans
dépendra du montant des ventes de produits saisis.
2/ La procédure administrative
est rapide mais les amendes restent très faibles et il n’y a pas de dommage et
intérêt, les ressources sont limitées. L’action administrative, indique Astrid de
Pelleport, n’est pas très efficace, celle-ci ne permettra pas de démanteler un
vrai réseau de contrefaçon.
3/ En procédure civile,
les dommages et intérêts sont calculés sur la base de la saisie effectuée sur le lieu du raid, autrement 500 000 RMB (environ 59 000 euros) est le montant maximum qu’on peut obtenir en dommages et intérêts. La
procédure civile, explique Astrid de Pelleport, est une stratégie juridique longue
et coûteuse, mais qui s’avère efficace. Ses fondements juridiques sont la violation du droit des marques et la concurrence déloyale.
Aussi, avant d’engager une
de ces procédures, il faut au préalable constituer des preuves. « La
constitution de preuves est très stricte en Chine », avertit Astrid
de Pelleport. Il faut certifier la conformité des preuves. Et lorsqu’on a recours à une société spécialisée dans
les enquêtes pour constituer des preuves, il faut là aussi se méfier. Il arrive, en effet, qu’il y ait collusion entre le contrefacteur et
la société d’enquête, informe la juriste.
L’enregistrement de la marque
Il existe deux types différents de dépôt de marque.
1/ Avant d’aller en Chine, l’entreprise peut déposer une marque auprès de l’INPI et doit
l’étendre à la Chine. Il y a en amont un travail d’extension internationale de
la marque.
2/ Aussi, une fois en Chine, il y a un
dépôt domestique, il faut déposer la marque en caractères latins et chinois
avec son logo auprès de l’office des marques chinois.
Pour déposer sa marque, la société pourra choisir
entre ces deux modes.
Astuce : avant de procéder au dépôt d’une marque en Chine, un déposant étranger doit faire appel à un agent des marques accrédité par le gouvernement car la demande d’enregistrement doit être rédigée en chinois. Par ailleurs, avant de déposer une marque, il faut s’assurer que celle-ci soit enregistrable. Attention par exemple à ne pas déposer de nom générique comme « Paris », insiste Raphaël Chantelot.
Enfin, pour mieux se protéger en Chine, les entreprises étrangères, conclut Raphaël Chantelot, peuvent enregistrer leur produit sur la
liste des douanes.
Venice Affre
MOCI Pratique :
Contacts :
Bureau de Shanghai – Lefèvre Pelletier : http://www.lpalaw.com/fiche_international.php?rub_id=5
Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) : http://www.inpi.fr/
L’annuaire MOCI des avocats d’affaires à l’international – Edition 2012, qui répertorie les coordonnées d’avocats français situés en Chine
Pour en savoir plus :
Consulter notre Guide business Chine 2012, dans notre magazine Le Moci N° 1909 du 1er mars 2012 (en vente à partir du 2 mars sur notre site Internet.
Lire notre dossier « Propriété industrielle, mode d’emploi pour se protéger à l’international«
Au sommaire de ce dossier trois PME témoignent sur leur expérience en Chine – Se protéger en Chine : trois cas d´entreprises