La Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED) est une direction du renseignement moins connue du grand public que la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE) ou la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI). Elle contribue pourtant pour une part non négligeable à l’équilibre des finances publiques tout en apportant une contribution importante au renseignement français, mais aussi à la police judiciaire. Un tour d’horizon s’impose.
I/ Le cadre général
La Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières, à l’origine Direction Nationale des Enquêtes Douanières (DNED), est née dans le courant des années 1930 de la nécessité tant de procéder à des enquêtes douanières après le passage des marchandises ou des voyageurs au contrôle des vérificateurs douaniers, que de lutter contre la contrebande, c’est-à-dire contre les importations ayant échappé à la douane le plus souvent parce qu’elles sont prohibées ou fortement taxées.
La DNRED lutte depuis son origine contre l’importation illégale de produits particulièrement sensibles comme les stupéfiants ou les armes, ou de produits fortement taxés comme le tabac, qui font toujours l’objet d’une importante contrebande. Elle mène également aujourd’hui un combat résolu contre les contrefaçons, qui portent une atteinte directe à l’économie nationale.
C’est en 1988 qu’a été adjointe à la Direction nationale des enquêtes douanières, une direction du renseignement dont l’objet est de recueillir des informations en vue de les rendre opérationnelles. Ces informations, ainsi transformées en renseignement, sont destinées aussi bien aux équipes de la DNRED qu’à l’ensemble des services douaniers français et, éventuellement communautaires et étrangers.
Elle a été rattachée à la communauté du renseignement en 2008.
Repère
La contrebande du tabac moins forte en France
D’après la DNRED, la France n’est pas un pays de consommation de tabac de contrebande, contrairement à l’Espagne, l’Italie ou la Grande-Bretagne, c’est-à-dire des pays où le réseau des distributeurs est soit inexistant soit secondaire – C’est le cas de l’Espagne, pays dans lequel il est plus facile d’acheter du tabac dans la rue ou sur les étals des marchés que chez les débitants de l’État. En Grande-Bretagne, l’institution du club favorise le tabac de contrebande. Les quantités de cartouches saisies ont été inférieures à la tonne, ce qui est insignifiant par rapport aux quantités de tabac de contrebande qui transitent par la France.
II/ Compétence et missions
La compétence des agents de la DNRED est nationale :
• DED (Direction des Enquêtes Douanières) et DRD(Direction du Renseignement Douanier) opèrent depuis le siège à Ivry-sur-Seine.
• La Direction des Opérations (DOD) dispose de vingt-trois services sur l’ensemble du territoire français, dont quatre pour la zone Antilles-Guyane – Guyane, Martinique, Guadeloupe et Saint-Martin.
• La DED dispose également d’un service à Fort de France opérant dans la zone Antilles-Guyane.
Les agents de la DNRED ont également vocation à se déplacer à l’étranger, mais n’y conduisent jamais d’actions complètement clandestines, agissant toujours sous la couverture d’un service ami ou allié dans le cadre d’une assistance administrative mutuelle.
La DNRED n’est pas un service de police judiciaire, aussi son action est-elle purement administrative.
Elle entretien des rapports avec les services de la justice et les offices centraux de la police ou de la gendarmerie, notamment leurs sections de recherche. Toutefois, dès que ces services agissent en phase judiciaire, que ce soit dans le cadre d’une enquête préliminaire contrôlée par un juge d’instruction ou par un parquet, ou sur commission rogatoire, elle n’a pas d’autre choix que de s’inhiber, n’ayant pas de compétence de police judiciaire. Sa mission consiste à réunir des éléments qui permettront aux services de police judiciaire, et notamment le service de la douane judiciaire, de travailler sur la base du code de procédure pénale.
Bon à savoir
Contrairement aux services frères, le code des douanes aide les agents de la DNRED en matière de communication des renseignements. Ainsi l’Article 65 du code des douanes donne aux agents des douanes le pouvoir de demander communication, notamment aux entreprises de télécommunications, de tout élément relatif à une activité ayant des ramifications internationales dès lors que la personne concernée est en lien, même diffus, avec une activité économique, commerciale ou de contrebande internationale.
III/ Structure et budget
Les effectifs et les services
En 2013, la DNRED était forte de 717 agents, dont 200 agents qui sont répartis à part égale entre la Direction des Enquêtes Douanières (DED) et la Direction de Renseignement Douanier (DRD), et quelque 450 agents relevant de la Direction des Opérations Douanières (DOD), qui est le service action de la DNRED.
Quant aux agents restants, ils sont affectés aux différents services centraux : Agence de Poursuite (AP) des infractions douanières, qui représente la DNRED ainsi que les douanes parisiennes devant les tribunaux, Recette Régionale (RR) pour la perception des droits et taxes et le recouvrement des amendes, Gestion des Ressources Humaines (GRH) et Budget Opérationnel de Programme Logistique et Informatique (BOPLI).
Le budget
Le budget en 2013 s’élevait à 52 millions d’euros en personnel et à 6,9 millions d’euros en fonctionnement – déduction faite de la réserve des 6 %.
Ses activités étant celles d’un service de renseignement (moins de 7 millions d’euros en fonctionnement, ce qui est peu), elle dispose également de ressources provenant du fonds de concours de la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie (MILDT) vraisemblablement de l’ordre de 450 000 euros en 2013, alors qu’elles étaient de 600 000 euros en 2012).
Les postes importants du budget de fonctionnement sont les déplacements opérationnels et l’acquisition de logiciels ou de matériels allant des véhicules (parfois atypiques dans l’administration) à des matériels spécialisés. Au sein de la Direction de Renseignement Douanier (DRD), les bases de données, matériels informatiques et logiciels destinées à la surveillance du cybercommerce, représentant aussi un poste budgétaire important.
IV/ Méthodes, résultats et actions
Faire l’économie de la DNRED impliquerait d’en confier les missions pour partie à la Direction Générale des Finances Publiques (DGFIP) et pour partie à la police judiciaire, avec quelques morceaux à la DCRI et à la DGSE. Elle a ainsi réalisé plus de la moitié des résultats des 17 000 agents des douanes en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants.
Contrefaçon
Sur la lutte contre les contrefaçons chinoises entrant sur le territoire français, les résultats sont réguliers mais insuffisants. La DNRED saisie surtout, en provenance de Chine, des contrefaçons de marques de produits de grande consommation, des textiles, des porte-clés, des bouchons de valve de pneus d’automobile, des stylos, des équipements sportifs, des chaussures, des médicaments, etc.
Le second problème concerne des produits dont les droits d’importation au tarif douanier commun ont été payés lors de leur entrée dans l’Union européenne, essentiellement par la Belgique ou les Pays-Bas mais de plus en plus aussi par l’Espagne ou l’Italie, mais qui, par la suite, ont disparu en circulant librement dans l’Union sans acquitter la TVA dans le pays de destination et il ne revient plus à la douane de contrôler le paiement de la TVA depuis 1993. Si les services de la DNRED ne trouvent pas physiquement la marchandise, il est impossible d’en percevoir la TVA.
Les médicaments constituent une des grandes préoccupations en matière de risque économique. Si la France est encore protégée en raison de l’existence d’une autorisation de mise sur le marché, Internet constitue toutefois un risque majeur : chacun peut acheter aujourd’hui sur Internet des médicaments produits en Inde qui possèdent les mêmes principes actifs que leurs équivalents vendus en Europe. Il ne s’agit pas forcément de contrefaçons. Ces pays pourront à l’avenir d’autant mieux inonder le marché de médicaments aussi efficaces que les nôtres que la législation européenne en libéralisera la commercialisation. D’où l’intérêt de la vigilance assurée sur Internet par cyberdouane.
Finance
Afin de renforcer l’action de la division d’enquête chargée du suivi des mouvements financiers, il a été créé au sein de la Direction des Opérations Douanières (DOD), un groupe de lutte contre les circuits financiers clandestins qui travail en liaison étroite avec TRACFIN sur de nombreux objectifs.
Terrorisme
Il existe également au sein de la DNRED un groupe opérationnel de lutte contre le terrorisme, qui est plus particulièrement attaché à la recherche d’éléments financiers en rapport avec le terrorisme. Ce groupe peut travailler en liaison avec la DGSE, DCRI et l’Unité de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT) notamment.
Cyberdélinquance
La DNRED a amélioré ses performances en matière de lutte contre la cyberdélinquance qui se développe de plus en plus. La « Cyberdouane » a déjà remporté quelque succès, en matière non seulement de médicaments et de cigarettes mais aussi de contrefaçons, internet étant un lieu privilégié d’échanges. À cette fin, la DNRED mutualise ses efforts également avec la gendarmerie, qui dispose en la matière d’un service efficace.
Bon à savoir
La douane française s’est remarquablement adaptée puisque nous sommes passés d’un service dur à un service très conciliant. Alors qu’autrefois, une vérification douanière dans une entreprise était relativement brutale, aujourd’hui, la douane assure un accompagnement des entreprises et se montre compréhensive. En 2011, la Direction Générale des Douanes et Droits Indirects (DGDDI) a signé conjointement avec le MEDEF, une charte des contrôles douaniers.
Bernard Parent, expert
Source : Assemblée Nationale (XIV Législature) de février 2013.
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