Le 1er janvier 2011 sont entrées en vigueur dans l’Union européenne de nouvelles règles d’origine préférentielle avec certains pays, dans le cadre du Système de préférences tarifaires généralisées (SPG). Objectif : simplifier leur application, notamment pour les pays les moins avancés (PMA). Des règles clés pour les opérateurs du commerce international, notamment à l’importation.
1/ Le contexte et les grandes lignes du nouveau règlement
Depuis quelques années, la Commission européenne avait en projet de mettre en place un nouveau dispositif pour l’application des règles d’origine en faveur des pays bénéficiant d’un régime préférentiel avec l’Union européenne.
Dans une première étape, ce sont les pays en développement qui appliqueront le nouveau dispositif pour les produits importés dans le cadre du SGP.
Bon à savoir
Pour mémoire, le SPG provient des arrangements spéciaux qui ont été mis en place pour répondre aux besoins particuliers des pays les moins avancés (PMA), à la suite de la règle « Tout sauf les armes » (TSA, en anglais Everything but arms – EBA) introduite en 2001.
C’est un régime unique. Le régime spécial pour les PMA qu’il comprend – en l’occurrence, l’arrangement incitatif spécial pour le développement durable et la bonne gouvernance dénommé « SPG Plus », issu de la règle « Tout sauf les armes » – fait partie du SPG, et les mêmes règles s’appliquent.
La Commission européenne a adopté le 18 novembre 2010 le nouveau règlement (UE) n° 1063/2010, portant modification du règlement (CEE) n° 2454/93 (ce dernier fixait certaines dispositions d’application du règlement CEE n° 2913/92 du Conseil établissant le Code des douanes communautaire).
Ce nouveau règlement va considérablement simplifier les règles d’origine afin qu’il soit plus facile pour les pays en développement de les comprendre et de les respecter.
2/ Les nouveautés dans la preuve de l’origine et les opérations
Les nouvelles règles prennent en compte les spécificités des différents secteurs de production, notamment les exigences de traitement. En outre, des dispositions spéciales sont incluses pour les PMA. Elles leur permettent de revendiquer l’origine de nombreux produits qui sont transformés sur leur territoire, même si 70 % (maximum) des matières premières ne sont pas originaires de ce territoire.
Preuve de l’origine
Le dispositif met en avant une nouvelle procédure pour l’établissement de preuves de l’origine, ce qui place davantage de responsabilités sur les opérateurs. À partir de 2017, le système actuel de certification de l’origine effectuée par les autorités des pays tiers sera remplacé par des déclarations d’origine établies directement par les exportateurs enregistrés via un système électronique.
La mise en place de la base de données appelée Rex (Registre des exportateurs) entraînera la suppression des certificats d’origine Form A en 2017.
Pour les exportations depuis la France, il y aura l’obligation d’avoir le statut d’exportateur agrée (EA), voir le BOD n° 6833 du 2 juillet 2009.
Opérations minimales
La liste des opérations minimales se trouve dans l’article 78 des DAC (modifié par le règlement n° 1063/2010).
Règle de tolérance générale d’incorporation de matière non originaire
La règle de tolérance générale est de 15 % du poids du produit pour les produits agricoles, à l’exception des produits de la pêche transformés du chapitre 16 de la nomenclature douanière SH, et 15 % du prix départ usine du produit final, sauf pour les produits textiles relevant des chapitres 50 à 63 du SH qui bénéficient de tolérances spécifiques (article 79 des DAC).
L’application de cette règle de tolérance ne peut pas se cumuler avec la règle de tolérance d’extraterritorialité, prévue dans certains accords, qui permet la réalisation d’une ouvraison en dehors du pays de production.
Produits entièrement obtenus
Les produits répondant à la notion de « produits entièrement obtenus », et donc « originaires », figurent dans une liste exhaustive. Celle-ci comprend notamment :
– les produits minéraux extraits du sol ;
– les produits végétaux qui y sont récoltés ;
– les animaux vivants qui y sont nés et élevés ;
– les produits de la chasse et de la pêche qui y sont pratiquées (dans les rivières, les lacs et eaux territoriales) ;
– les produits de la pêche et autres produits tirés en dehors des eaux territoriales (12 miles pour la Communauté européenne) par leurs navires ;
– les articles usagés qui y sont collectés pour autant qu’ils ne puissent servir qu’à la récupération des matières premières ;
– les déchets provenant d’opérations manufacturières qui y sont effectuées et les marchandises fabriquées exclusivement à partir de ces produits.
Produits suffisamment ouvrés ou transformés
Un produit est considéré comme « suffisamment ouvré ou transformé » lorsque les matières non originaires utilisées dans le processus de fabrication ont subi les ouvraisons exigées pour ce produit (voir l’Annexe 13 bis du règlement (UE) n° 1063/2010).
Bon à savoir
Ouvraisons ou transformations insuffisantes pour conférer l’origine
Tous les systèmes préférentiels prévoient que certaines opérations, en raison de leur importance mineure, ne confèrent jamais le caractère originaire à un produit.
Parmi ces ouvraisons, on peut citer :
• les manipulations destinées à assurer la conservation en l’état des produits pendant leur transport ou leur stockage ;
• le nettoyage, le lavage ;
• les opérations simples de peinture et de polissage ;
• le dépanouillage, le blanchiment, le lissage et glaçage des céréales et du riz ;
• les opérations d’addition de colorants dans le sucre ou de formation de morceaux de sucre ;
• toute opération simple de conditionnement :
• le simple mélange de produits, même d’espèces différentes, etc.
3/ Des assouplissements en matière de cumul
Dans tous les systèmes préférentiels, dès qu’une matière non entièrement obtenue dans le pays où s’effectue la fabrication d’un produit est utilisée, cette matière doit y être suffisamment ouvrée pour que le produit obtenu puisse acquérir l’origine de ce pays.
Dans tous les accords conclus par la CE ou dans le cadre des régimes de préférence qu’elle accorde à certains pays, ce principe est toutefois assoupli au bénéfice des matières qui sont originaires du pays ou des pays partenaires à l’accord, dès lors que le produit ainsi obtenu est exporté vers le ou les pays partenaires de cet accord.
Les différents types de cumul
• Le cumul bilatéral
Il s’applique entre les deux parties contractantes à un accord.
Les matières originaires d’un pays sont considérées comme étant originaires du pays dès lors qu’elles subissent dans ce pays une ouvraison allant au-delà des « ouvraisons insuffisantes ».
Pour que ce cumul d’origine fonctionne, les matières destinées à être ouvrées dans le pays partenaire doivent justifier de leur caractère originaire par une preuve d’origine.
• Le cumul diagonal
Le cumul diagonal est basé sur le même principe que le cumul bilatéral, mais il est étendu à plusieurs pays parce qu’ils appartiennent à une même zone de libre-échange.
• Le cumul régional au sein du Système de préférences généralisées
Ce cumul est applicable au sein des trois groupes régionaux suivants :
– groupe I : Brunei-Darussalam, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam et Cambodge ;
– groupe II : Costa Rica, Honduras, Guatemala, Nicaragua, Panama, Salvador, Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou et Venezuela ;
– groupe III : Bhoutan, Bangladesh, Inde, Maldives, Népal, Pakistan et Sri Lanka.
En application des règles de cumul régional, les matières originaires d’un pays d’un groupe régional qui sont utilisées dans la fabrication d’un produit dans un autre pays du même groupe régional sont réputées originaires de ce pays et ne sont pas soumises à l’obligation d’y être suffisamment ouvrées.
En cas d’application du cumul, le pays d’origine est le pays de groupe régional dans lequel la dernière ouvraison ou transformation a été effectuée à condition que :
– la valeur ajoutée conférée par la transformation ou l’ouvraison soit supérieure à la valeur en douane la plus élevée des produits utilisés originaires d’un des autres pays du groupe régional. La « valeur ajoutée » est le prix départ usine diminué de la valeur en douane de chacun des produits incorporés originaires d’un autre pays du groupe régional ;
– l’ouvraison ou la transformation effectuée ne soit pas une ouvraison insuffisante (liste reprise à l’article 70 des DAC ou, pour les produits textiles, à l’annexe 16 des DAC).
À défaut, le produit acquiert l’origine du pays du groupe régional d’où sont originaires les matières ayant la valeur en douane la plus élevée parmi les matières originaires utilisées provenant d’autres pays de groupe régional.
• Le cumul total
Il y a cumul total lorsque, dans un même système préférentiel regroupant plusieurs pays, sont pris en compte pour déterminer si le produit final a acquis le caractère originaire :
– non seulement les matières qui en sont originaires ;
– mais également les ouvraisons ou transformations qui y sont effectuées sur des matières non originaires.
Ce type de cumul n’entre pas dans le cadre SPG.
4/ La règle du transport direct
Le transport des produits « originaires » est considéré comme direct lorsqu’il s’effectue sans emprunt de territoires autres que ceux de l’Union européenne ou du pays partenaire (ou des pays partenaires dans le cas de pays partie à un même système préférentiel).
En cas d’application du cumul régional de l’origine dans le cadre des SPG, les produits dont le transport s’effectue par un autre pays du même groupe régional sont considérés comme transportés directement du pays bénéficiaire dans l’Union européenne. La preuve du respect de la règle du transport direct peut être apportée par la présentation d’un titre de transport unique couvrant le passage des marchandises par le pays de transit ou par une attestation de non-manipulation délivrée par les autorités douanières du pays de transit.
Important
La date de mise en œuvre des nouvelles règles d’origine du SPG est le 1er janvier 2011 pour les règles de la détermination de l’origine et le 1er janvier 2017 avec la possibilité d’une période transitoire jusqu’au 1er janvier 2020 pour le système des exportateurs enregistrés.
Le règlement (UE) n° 1063/2010 du 18 novembre 2010 est consultable sur le site de la douane française : www.douane.gouv.fr ou sur le site de l’Union européenne : http://eur-lex.europa.eu
Bernard Parent, expert