Les nouvelles téléprocédures communautaires entrent en application le 1er janvier 2011. Elles suscitent quelques inquiétudes chez les opérateurs (voir Le Moci n° 1877 du 11/11/2010, p. 16). Voici un petit rappel de dernière minute des dispositions à prendre d’urgence pour éviter un blocage des marchandises aux ports et aéroports.
1/ Le contexte général
• Les États-Unis, suite aux événements du 11 septembre 2001, ont mis en place l’initiative sur la sécurité des conteneurs (Container Security Initiative – CSI) et le programme C-TPAT (US Customs-Trade Partnership Against Terrrorism) en 2003.
• L’Organisation mondiale des douanes (OMD) a adopté de son côté le cadre de normes Safe visant à sécuriser et à faciliter le commerce mondial. Ces normes ont mis en place un statut d’opérateur économique agréé ou assimilé valable partout dans le monde.
• En Europe, la Commission européenne a présenté une série de mesures de sécurité/sûreté avec l’apparition du concept de système harmonisé de gestion des risques. Il s’appuie sur deux piliers réglementaires :
1° Le règlement CE n° 648/2005 du 13 avril 2005 qui modifie le Code des douanes communautaire (CDC) en instaurant de nouvelles mesures de sûreté/sécurité des échanges. La sûreté aux frontières de l’UE repose sur un système harmonisé de gestion des risques comportant les axes suivants :
– obligation pour les opérateurs de fournir aux administrations douanières des informations sur les marchandises préalablement à leur importation (ICS) ou à leur exportation (ECS) ;
– possibilité pour les opérateurs fiables d’obtenir des simplifications de procédures grâce à un statut d’opérateur économique agréé (OEA) ;
– mise en place de nouveaux systèmes informatisés de gestion de la douane : ICS et ECS dans un cadre commun de gestion des risques en matière de sûreté/sécurité permettant un niveau équivalent de contrôle douanier par tous les États membres.
2° Le règlement n° 1875/2006 du 18 décembre 2006 concernant les dispositions d’application du CDC qui constitue le suivi du règlement n° 648/2005. Ces dispositions règlent les détails opérationnels des procédures douanières relatives aux mesures sécuritaires.
2/ La téléprocédure ICS (Import Control System) à l’importation
ICS prévoit le traitement des pré-déclarations d’arrivée et la liaison de ces informations avec l’analyse de risque.
2.1/ Les obligations des opérateurs au 1er janvier 2011
Avant la présentation en douane de la marchandise, la déclaration sommaire d’entrée sûreté/sécurité ENS (Entry Summary Declaration) devra être transmise par voie électronique au premier bureau de douane d’entrée dans l’UE pour toutes les marchandises à bord d’un moyen de transport (exceptions pour le fret express, les envois postaux), avant l’arrivée dans le territoire douanier communautaire.
Les délais légaux de transmission de la déclaration préalable à l’import varient en fonction du moyen de transport.
• Transport maritime
– Cargaison conteneurisées : au moins 24 heures avant le chargement dans le port de départ.
– Cargaison en vrac/fractionnées : au moins 4 heures avant l’arrivée au premier port situé sur le territoire douanier de la CE.
• Transport aérien
– Vols court-courriers : au plus tard au moment du décollage effectif de l’avion.
– Vols long-courriers : au moins 4 heures avant l’arrivée au premier aéroport de l’UE.
• Transport ferroviaire/eaux intérieures : 2 heures avant l’arrivée au bureau de douane d’entrée dans l’UE.
• Transport routier : au moins une heure avant l’arrivée au bureau de douane d’entrée dans l’UE.
Le contenu de la déclaration
Les informations préalables, essentiellement logistiques et commerciales, sont précisées à l’annexe 30 bis du règlement (CE) n° 1875/2006. Elles concernent 29 données à fournir à l’importation et la liste réduite (10+1) pour les titulaires du statut OEA n’est pas acceptée actuellement par la Commission.
Pour la donnée portant sur la désignation de la marchandise, la douane française recommande de fournir soit une « description en langage clair », soit de fournir le code SH 4 ou au mieux le SH 6.
2.2/ Le redevable des données de sûreté
À titre général, le redevable est le transporteur qui achemine les marchandises. Cependant, cela pourrait être l’importateur, le consignataire, l’agent, le transitaire/commissionnaire en douane ou le représentant de l’un ou de l’autre.
La personne qui dépose l’ENS est responsable des informations qu’elle transmet vis-à-vis des autorités douanières.
Il n’y a aucun lien entre la déclaration de sûreté et la déclaration douanière de dédouanement.
La notification d’arrivée (de 17 données minimum) du moyen de transport devra être faite par l’exploitant du moyen de transport ou son représentant au premier point d’entrée dans l’UE. Cette notification devra contenir tous les ENS déposées pour toutes les marchandises transportées.
La transmission des données (déclaration ENS) devra être faite sous mode EDI (échange de données informatisées) ; cependant, à partir du premier trimestre 2011, elles pourront être traitées sous mode DTI via le site de la Douane française https://pro.douane.gouv.fr avec transmission à l’automate de sûreté. Un Bulletin officiel des douanes sur ICS devrait faire l’objet d’une publication avant fin 2010 !
Attention aux sanctions
Les sanctions relèveront de l’article 410 du Code des douanes français, qui correspond à des contraventions et non des pénalités.
Le taux sera de 300 euros à 3 000 euros par infraction (exemples d’infractions : défaut de déclaration ENS, erreurs, etc.).
3/ La téléprocédure ECS (Export Control System) à l’exportation
Le système ECS a été prévu en 2 phases, dont une déjà opérationnelle.
3.1/ Phase 1 : ECS fiscal
Ce système est en place depuis le 1er juillet 2009, date à laquelle les déclarations douanières à l’exportation ont été dématérialisées (BOD n° 6830 du 1er juillet 2009 – D.A. n° 09-049 du 29 juin 2009).
Le visa au bureau de sortie de l’UE de l’exemplaire n° 3 du DAU (document administratif unique) a été remplacé par le visa électronique dans le système ECS.
Les marchandises circulent entre le bureau d’exportation et le bureau de sortie sous le couvert d’un document d’accompagnement export (EAD – Export Accompanying Document) où figure un numéro de mouvement (MRN – Movement Reference Number) et d’un code à barres.
Pour que l’exportateur puisse obtenir l’exonération de la TVA à l’exportation, le bureau de douane d’exportation a l’obligation de lui certifier par voie électronique la sortie physique des marchandises de l’UE.
En cas de recours à la procédure de secours ou simplifiée (papier), nous revenons à la justification classique précédente avec visa manuel par le bureau de sortie et en cas de non-retour du justificatif, il n’y aura plus que le recours aux preuves alternatives de sortie qu’il faudra présenter lors d’un contrôle fiscal.
Bon à savoir
Le Décret n° 2010-233 du 5 mars 2010, recense les preuves alternatives à l’exportation de biens bénéficiant de l’exonération de la TVA et ceci en cas de défaillance du système. Ce décret modifie l’article 74 de l’annexe III du Code général des impôts (CGI) pour s’adapter aux formalités dématérialisées à l’export ECS.
Quelques exemples de preuves alternatives : la déclaration d’importation authentifiée par la douane du pays de destination finale ou une attestation de cette administration, le document de transport avec visa du destinataire, preuve bancaire du paiement des biens par le client établi hors de l’UE ou d’un DOM, etc.
3.2/ Phase 2 : ECS sûreté
Comme pour le système ICS à l’importation, le système ECS sûreté export fonctionnera avec transmission des données de sûreté électroniquement au bureau de sortie du territoire douanier de l’UE.
Contrairement à l’importation, le redevable des données de sûreté à l’export ne sera pas le transporteur prioritairement mais l’exportateur.
Il est évident que lors de chaque opération de dédouanement à l’exportation, l’exportateur ou son représentant, qui peut être un commissionnaire en douane (transitaire), pourra transmettre au bureau de sortie de l’UE la déclaration sommaire (ENS).
Même s’il n’y a pas de lien entre les deux déclarations, les données douanières seront identiques, ce qui ne sera peut être pas toujours le cas à l’importation.
4/ Les risques de blocage au démarrage
La douane prévoit quelques blocages et risques de mise en quarantaine dans les ports et les aéroports au 1er janvier 2011 avec des retards de livraison. Aussi, afin de maintenir la fluidité des importations à cette date, les entreprises ont tout intérêt être prêtes à l’échéance 2011, même s’il est acquis que la douane mettra en place une période transitoire.
Les acteurs de la mise en place de la procédure ICS, administrations douanières et opérateurs, sont cependant conscients qu’il faudra faire face à de nombreux écueils, notamment :
– un nombre trop important d’intervenants dans une opération d’importation qui ne disposent pas nécessairement de la totalité des informations ;
– des contrats de transport variés que l’importateur ne maîtrise peu ou pas ;
– des chaînes logistiques plus ou moins sécurisées ;
– le délai variable en heure et jours des temps de transport ;
– risque de non-embarquement au départ ;
– les risques communs gérés par 27 États membres + 2 (Suisse et Norvège) avec des systèmes informatiques différents dans chacun, etc.
Pour qu’ICS fonctionne bien, il est essentiel que tous les partenaires d’une opération d’importation puissent partager l’information. Ce n’était pas encore le cas il y a quelques semaines : beaucoup d’entreprises en France ne sont pas prêtes et un certain nombre de leurs partenaires méconnaissent ICS.
Bernard Parent, expert
Important :
Les opérateurs doivent informer leurs fournisseurs étrangers de la mise en place d’ICS.
Des modalités pratiques et plusieurs recommandations peuvent être faites aux responsables des opérations d’importation dans l’entreprise.
Il est nécessaire d’envisager des surcoûts dans les opérations d’importation.