Au moment où la Chine connaît un net ralentissement de sa croissance économique, la catastrophe de Tianjin a de quoi inquiéter ses principaux partenaires commerciaux, principalement des pays asiatiques comme la Corée du Sud, Hong-Kong, le Japon, mais aussi les États-Unis, l’Allemagne, les Pays-Bas.
Mégalopole portuaire de 15 millions d’habitants, Tianjin est le poumon économique de Pékin. D’après les données fournies par la base de données GTA/GTIS, spécialisée dans les statistiques du commerce mondial des marchandises, la part des importations et des exportations chinoises ayant transité en 2014 par le district de Tianjin s’est élevée respectivement à 6 % et 4,7 % du total chinois en valeur, représentant ainsi des montants de 118,5 milliards et 109,9 milliards de dollars. Une proportion en forte croissance, puisque, si la valeur des importations transitant par Tianjin n’a progressé que de 3 % par rapport à 2013, celle des exportations s’est envolée de plus de 10 %.
Ouverture d’une zone de libre échange
Personne ne peut dire aujourd’hui si la montée en puissance de Tianjin peut être durablement freinée. Cette catastrophe, qui a détruit une part importante des infrastructures du port, est arrivée quelques mois après l’ouverture en avril 2015 d’une zone de libre échange pour développer l’industrie du nord de la Chine, avec plus d’opérations commerciales et d’investissements étrangers.
Le port est en effet un maillon essentiel, car l’essentiel du commerce extérieur chinois via Tianjin est effectué par voie maritime : 79,3 % à l’import et 87,44 % à l’export, d’après GTA/GTIS, en 2014. A l’import, l’autre grand mode de transport, l’aérien, a gagné du terrain, passant d’une part inférieure à 16 % en 2012 à 20,38 % en 2014. A l’export, l’aérien a plutôt régressé, puisque sa part relative est tombée dans le même temps de 11,29 % à 10,52 %. Ce qui montre bien la vocation maritime de Tianjin.
Toutefois, au regard des différents classements mondiaux, on s’aperçoit, néanmoins, que l’importance de ce grand port du nord de la Chine pour son économie et son commerce extérieur est à relativiser : il est, certes, classé numéro quatre mondial, tout type de trafic confondu, derrière deux autres ports chinois, Ningo-Zhoushan (province du Zhejiang, au sud de Shanghai) et Shanghai (est de la Chine) ainsi que Singapour, mais il pèse plus difficilement dans la partie la plus moderne du transport par mer : le conteneur. En effet, le cabinet de conseil spécialisé sur le maritime Alphaliner le place au 11e rang mondial en matière de trafic de conteneurs en 2014, avec un volume de 14 millions de conteneurs standards transportés, en hausse de 8 %.
Des pertes estimées à 1-1,5 milliard de dollars
Minerai de fer, acier, charbon, pétrole… Tianjin est cependant un ouvrage majeur pour la chaîne logistique des commodités. Le fait que l’incendie et les explosions qui ont détruit le port soient partis d’un site de stockage de produits chimiques destinés à l’industrie minière le montre. Mais il est aussi important aussi pour les biens de consommation, la pharmacie avec GlaxoSmithKline, l’automobile ou l’aéronautique, avec Airbus.
Rappelons que Renault a perdu quelque 1 500 véhicules dans les incendies, Volkswagen 2 500. Les analystes de Fitch et de Crédit Suisse ont d’ailleurs évalué entre 1 et 1,5 milliard de dollars le coût pour les assureurs de la catastrophe de Tianjin.
Dans l’immédiat, plusieurs industriels ont décidé de relocaliser des activités. Le spécialiste américain des engins spéciaux John Deere a décidé de fermer provisoirement son site de production de Tianjin, qui lui permettait jusqu’à aujourd’hui d’arroser le marché asiatique. Le constructeur automobile japonais Toyota a aussi décidé de suspendre la fabrication de son usine pour quelques jours, le temps de réfléchir, comme son compatriote Mitsubishi Motors ou l’allemand Volkswagen, à utiliser d’autres ouvrages. Shanghai pourrait ainsi en profiter pour se renforcer.
François Pargny